Ce n’est pas un ministère que dirige le ministre de la Santé, mais un véritable bazar. D’après les dernières déclarations du ministre, personne n’est responsable de quoi que ce soit à la Santé, à commencer par lui-même. Si c’est le cas, pourquoi est-ce qu’on lui paye des centaines de roupies mensuellement : pour l’entendre débiter des âneries remplies de contradictions au Parlement et à la télévision ?
Au Parlement, en réponse à une question du leader de l’Opposition qui a révélé le scandale Molnupiravir, il a fait deux déclarations pour justifier l’achat d’un million de doses du médicament à un prix supérieur à celui du marché. La deuxième déclaration, qui était supposée corriger la première, en était une de trop. Comme celles qui ont suivi. Pressé de questions sur l’achat du médicament, le ministre a avancé qu’il ne peut pas commenter l’affaire, vu qu’une enquête de l’ICAC est en cours. « Je n’ai pas l’intention de démissionner car je connais bien ce dossier et je n’ai rien fait de mal. » Il ajoutera après que si l’ICAC le convoque, il répondra à cette convocation. Comment justifier que ce ministre qui dit « bien connaître le dossier » ne se rende pas de son propre chef à l’ICAC pour faire la lumière sur cette affaire qui éclabousse le ministère dont il est responsable ? Après avoir déclaré qu’il « connaissait bien le dossier », le ministre a fait machine arrière pour soutenir qu’il ne s’occupe pas des achats de médicaments et autres produits, en ajoutant : « Je ne peux pas suivre tous les dossiers », en demandant aux journalistes qui le pressaient de questions : « Dois-je tout vérifier, un par un ? » Allant plus loin pour essayer de justifier ses déclarations contradictoires, le ministre a déclaré qu’il n’a pas questionné les fonctionnaires qui lui ont donné les informations pour sa réponse à la PNQ.
Ce qui veut dire que le ministre ne vérifie même pas l’exactitude des déclarations qu’il fait au Parlement. Plus loin, le ministre ira même jusqu’a soutenir que l’ex-Senior Chief Executive (SCE) Officer de son ministère, mis prématurément – opportunément, disent certains – à la retraite, ne peut tout contrôler.
Si on additionne les « arguments » du ministre pour essayer de se défendre, une conclusion s’impose : le ministère de la Santé est un bazar où chacun fait ce qu’il veut, achète au prix qu’il veut et dépense l’argent public sans avoir à rendre des comptes. Puisque le ministre de la Santé ne peut pas « suivre tous les dossiers », puisque le SCE « ne peut pas tout contrôler », qui dirige donc ce ministère dont le budget, un des plus importants de l’État, se chiffre en milliards de roupies ? Le ministre et les hauts fonctionnaires sont, donc, payés pour ne pas assumer de responsabilités, pour ne pas suivre les dossiers, pour ne pas tout contrôler ?
Mais les marchands bazar contrôlent la qualité et le prix des légumes qu’ils achètent et revendent, l’état de leur stock qui est loin, bien loin, de valoir des millions de roupies. Ils assument leurs RESPONSABILITÉS, ce que ne fait pas le ministre de la Santé. Il a adopté, dans cette affaire, la tactique maintes fois utilisée par feu sir Anerood Jugnauth. Souvenez-vous : à chaque fois qu’il était interpellé sur une décision controversée, il sortait la phrase devenue historique :
« pas moi ça, li ça. » Cette tactique est toujours utilisée au MSM, comme le démontrent les dernières déclarations du ministre de la Santé ciblant les fonctionnaires comme boucs émissaires. Le Premier ministre n’a pas fait autre chose en déclarant que c’est au Parlement qu’il avait découvert, le 10 décembre, le scandale du Molnupiravir. En oubliant qu’il avait déjà annoncé, la veille, que le gouvernement avait fait l’acquisition d’un million du désormais fameux comprimé ! Selon la logique du gouvernement MSM, les responsables qui n’assument pas leurs responsabilités sont toujours innocents. Les coupables sont les fonctionnaires.
Il ne faut pas se leurrer : pas mal de fonctionnaires sont devenus, au fil des dernières années, non seulement des yes men des ministres prêts à tout pour les satisfaire, mais également leurs complices dans des détournements de fonds publics au profit des proches, cousins, copains et autres petites copines. Si ce n’était pas le cas, comment est-ce que la Santé aurait accepté d’acheter – au prix fort et sans respecter les procédures – des médicaments et des équipements médicaux à des quincaillers, des marchands de poisson, des bijoutiers et autres publicitaires ? Mais fort heureusement, semble-t-il, il y a encore des fonctionnaires dignes de ce nom dont le travail est de veiller au respect de procédures établies et aux dépenses justifiées de l’argent public. C’est grâce à certains de ces fonctionnaires lanceurs d’alerte que le leader de l’Opposition a pu révéler le scandale du Molnupiravir. Ces fonctionnaires méritent d’être salués pour avoir fait leur devoir. En dénonçant la politique de « protez nu dimoun » qui est en train de transformer le ministère de la Santé en un bazar !