Savez-vous ce qui est fascinant dans les élections mauriciennes ? C’est, quels que soient
les résultats, il n’y a jamais de perdant pour les partis politiques qui n’ont pas pu faire élire leur candidat. C’est la conclusion à laquelle on peut facilement arriver quand on écoute les réactions des porte-parole autorisés depuis la proclamation des résultats de la partielle du No 18. A part Arvin Boolell qui, malgré ses plus de 4000 voix d’avance, dit qu’il faut célébrer la victoire, mais se garder de jubiler, tous les autres politiciens expliquent pourquoi leurs candidats n’ont pas tout à fait perdu. Même le PMSD, dont le slogan est
« résultat lor résultat », ne s’avoue pas tout à fait vaincu en dépit du fait que son candidat
n’a même pas réussi à récupérer sa caution ! Mais la palme dans cet exercice qui consiste à interpréter à son avantage une défaite cuisante revient, sans conteste, au MMM. Il est vrai que le parti du coeur est rompu à cet exercice après à une longue série de défaites depuis 1983 qui a fait irrémédiablement chuter sa force électorale. Pour les mauves, ce sont les autres candidats, le gouvernement, la MBC et l’abstention qui ont joué contre sa candidate aux élections de dimanche dernier. Autrement dit, s’il n’y avait pas eu d’autres candidats, Mme Nita Judoo aurait été élue en tête de liste ! A aucun moment, depuis l’annonce des résultats, le MMM ne s’est penché sur les raisons de sa énième défaite électorale. C’est-à-dire une ligne idéologique casse contour que l’on n’arrive plus à suivre et dont la finalité semble être de faire une alliance à tout prix pour affronter les élections. Avec un parti qui voudra de lui et dont il acceptera toutes les conditions. Cela a été le cas en décembre 2014
après les résultats catastrophiques que l’on sait pour les mauves. A aucun moment, depuis lundi, les membres du Bureau politique n’ont remis en question la ligne idéologique du leader, son choix personnel de la candidate, sa manière de faire campagne en utilisant les vieux arguments et les instruments qui ont valu au parti du coeur défaite après défaite depuis des années. Mais comment les membres du BP du MMM pourraient-ils contester les décisions du leader maximo alors qu’ils les cautionnent automatiquement depuis des années ? Bien au contraire, les membres de la direction vont sans doute profi ter de leur fête annuelle mardi prochain pour affi rmer, comme ils le font depuis des années, que le « MMM est plus fort que jamais ! » Savez-vous qui est le vrai perdant de l’élection partielle ?
Comme d’habitude, les contribuables. C’est de leurs poches que le gouvernement va tirer les Rs 33 millions qui ont servi à organiser cette élection partielle. Sans compter les certaines de milliers de roupies non déclarées qui ont servi à louer des bases, à nourrir les agents, à payer l’essence de leurs voitures, banderoles, orifl ammes, posters géants et
autres affiches dont on a recouvert Quatre-Bornes pendant la campagne. Tout cela parce qu’un politicien qui, n’ayant pas été nommé ministre des Finances au dernier remaniement, a voulu régler ses comptes avec son ancien parti et ses anciens amis. Tout en essayant de réaliser le rêve que lui avait prédit son père en paraphrasant Rudyard Kipling : « Un jour tu seras Premier ministre, mon fi ls ! » Gonfl é d’arrogance — comme la grenouille de la fable qui voulait se prendre pour un boeuf — il est entré pendant la campagne dans un délire verbal que les électeurs ont, heureusement, refusé de cautionner. Après avoir annoncé qu’il avait démissionné pour empêcher la construction du Metro Express, il a changé de cap en disant que son élection allait faire tomber le gouvernement ; qu’il avait déjà deux mille voix d’avance et qu’il allait faire disparaitre les dinosaures de la scène politique locale.
Dimanche dernier, les électeurs de Quatre-Bornes ont jeté le prétendu politicien moderne Roshi Bhadain dans le carreau de cannes de la défaite en élisant en tête de liste un dinosaure ! Comme quoi, et quoi que l’on pense dans les états-majors politiques, l’électeur
mauricien sait raisonner, reconnaître la démagogie et la sanctionner comme elle le mérite. Mais cette leçon aura quand même coûté Rs 33 millions aux contribuables. Il est vrai que la démocratie n’a pas de prix, mais tout de même Rs 33 millions !