Pour montrer qu’il était seul maître à bord, le Commander in Chief local, Pravind Jugnauth, avait commencé par envoyer son père et tous ses compagnons d’armes, qui avaient bâti et fait grandir le MSM, à la retraite forcée. Le nouveau PM ne voulait plus du MSM du bonhomme et l’avait remplacé par le new one dirigé par lui.
Pour être plus exact, dirigé par la kwizinn qui prétendait avoir toutes les capacités pour le faire et qu’il écoutait aveuglement. Du jour au lendemain, les vieux combattants orange ont été remplacés par des supposés jeunes ayant plus une ambition démesurée que de réelles capacités. Ils étaient «conseillés» par d’autres ambitieux dont la principale caractéristique était de savoir dire oui et d’obéir au doigt et à l’oeil aux ordres — mêmes délirants – donnés par la direction de la kwizinn.
C’est ainsi que des «stratégies» de communication pour embellir l’image du PM en faisant oublier celle de son père, ont été imaginées et exécutées. Des stratégies grossières, à l’image de ceux qui les ont inventées, et qui se sont souvent retournées contre celui qu’elles étaient censées mettre en valeur. L’histoire retiendra la longue liste de couacs ayant contribué à ridiculiser le chef du gouvernement. En l’envoyant, par exemple, jouer à M. Météo avec une carte de l’océan Indien pas à jour, en l’envoyant se faire interviewer par une journaliste de la BBC en lui faisant croire qu’elle était du même niveau que ceux de la MBC, spécialistes du léchage de bottes ministérielles.
Le problème c’est que coupé de la réalité, et n’écoutant que les gâtes-sauces de la kwizinn, les membres du MSM et les fonctionnaires, pour qui «passer le beurre» est une aptitude professionnelle, Pravind Jugnauth a fini par se convaincre qu’il était un mari Premier ministre, qu’il était même parvenu à dépasser la stature d’homme d’État de son père, alors qu’il se comportait surtout comme un chef de parti.
C’est ce qui explique le langage agressif qu’il emploie contre l’opposition, contre la presse et tous ceux qui osent le critiquer ou essayent de lui poser des questions. Se croyant au-dessus de tout et de tous, il choisit quel journal éviter à ses rares conférences de presse et les questions auxquelles il condescend à répondre. Comme il le fait au Parlement en utilisant le Speaker comme goarlie — et bouncer — pour ne pas avoir à s’expliquer sur les conditions de l’acquisition de sa résidence à Angus Road.
Dans la foulée, convaincu qu’il peut tout faire, c’est lui qui fixe le jour et l’heure de sa convocation à l’ICAC et décide que son ministre du Commerce est innocent de ce dont on le soupçonne, après avoir mené sa propre enquête. Et ce alors que ce même ministre doit s’expliquer à une cour de justice et devrait être interrogé par la police et l’ICAC. Mais même si la kwizinn et les partisans du MSM continuent à l’applaudir et à lui dire qu’il est le meilleur PM, et que malgré ses 37% de voix aux dernières élections, il va régner pour plusieurs mandats encore, Pravind a fini par entendre monter la colère du peuple. Celle des Mauriciens excédés par le développement industriel de la fraude et de la corruption, des trafics, des passe-droits, des injustices flagrantes, des abus de pouvoir, de la partialité de certains policiers, de l’impunité pour certains et de la persécution pour d’autres.
C’est pour essayer de calmer cette colère qui monte que le fiston Jugnauth et sa kwizinn ont été contraints de faire appel à celui qu’ils avaient relégué aux oubliettes pour prendre sa place. Vendredi matin, a été publiée dans un quotidien, une interview de celui que l’on surnommait autrefois Rambo. La version filmée de cette même interview a été diffusée le soir à la MBC après le JT. Les téléspectateurs ont pu assister à un pitoyable exercice de communication, de mauvaise communication, dans laquelle SAJ lit mal les réponses d’une interview préparée dans laquelle il vante les qualités de son fils et essaye de répondre à des questions d’actualité relevant de la responsabilité du ministre de l’Intérieur, qui n’est autre que son fils. C’est un SAJ mal à l’aise, essayant de lire les réponses écrites pour lui, un SAJ visiblement en mission commandée que les téléspectateurs ont découvert.
L’opération de Com était tellement grossière que l’attention du téléspectateur s’est focalisée sur le messager, pas sur le contenu du message qui se résumait en une tentative d’un père de répondre à l’appel au secours de son fils. Un fils qui, après l’avoir envoyé à la retraite forcée, n’hésite pas à essayer de l’utiliser quand il sent la situation échapper à son contrôle. En fin de compte, cette énième stratégie de Com de la kwizinn n’a fait que confirmer ce qu’on savait déjà depuis longtemps: il faudra beaucoup de temps encore à Pravind pour essayer de se hisser à la hauteur de son père.