Oh ! Qu’elle est inaccessible cette nouvelle Manhattan ! Nous parlons évidemment de Vacoas, le deuxième lieu choisi par l’alliance PTr-MMM-PMSD pour rallier ses partisans. Avant d’être autorisée à atterrir à la salle des fêtes de la mairie de la région le 18 août, la course d’obstacles s’est révélée bien ardue. La place des camions vis-à-vis de la station d’essence à la rue St Paul, les autorités, comprenez le MSM, l’administration locale qu’elle contrôle et la police à ses ordres, tous ont, dans une partition savamment bien orchestrée, ont dit non. Même lorsque les arguments se retournent contre eux. Ils ont anticipé un blocage de ce carrefour stratégique, admettant ainsi que la foule sera au rendez-vous.
L’aire de stationnement de Metro Express Limited vis-à-vis du marché, c’était encore plus cocasse, même si la situation est loin d’être amusante. MEL a envoyé les dirigeants de l’alliance aller chercher plutôt du côté de la police et, lorsqu’elle s’est tournée vers la police, celle-ci a fait savoir que MEL n’était pas d’accord. Un jeu de cache-cache grossier ou de ping-pong ridicule, dont le parti aux affaires en ce moment a le secret.
L’opposition a abandonné les recours à la justice pour faire respecter ses droits et on peut la comprendre après l’épisode malheureux de 2016 lorsque la saisine de la Cour suprême par le PTr s’était soldée par un échec. Pour rappel, les travaillistes avaient formulé une demande depuis le 1er décembre 2015 auprès de la mairie pour obtenir la place du marché pour son meeting national du 1er-Mai 2016. La mairie a joué les abonnés absents jusqu’à ce qu’un des conseillers en exercice du Sun Trust ne fasse lui aussi une demande au nom du MSM, le 4 janvier 2016, pour le même emplacement. Lors d’une réunion du conseil municipal du 6 janvier la mairie avait décidé d’accorder l’autorisation au MSM de tenir son rassemblement du 1er-Mai.
Bien que les représentants légaux du pétitionnaire Patrick Assirvaden aient fait valoir l’argument du preneur arrivé premier servi, le chef juge d’alors, Keshoe Parsad Matadeen, et le Senior Puisne Judge Asraf Caunhye avaient, en avril 2016, débouté le pétitionnaire en décrétant que la municipalité de Vacoas avait un pouvoir de discrétion sur l’attribution des espaces de la ville. Adieu l’impartialité de l’administration publique et l’observance de la notion la plus élémentaire de « natural justice ». Avec le fils Dip en plein procès, ce sera exactement le contraire, le président de la commission de pourvoi en grâce Keshoe Parsad Matadeen faisant jouer l’amende au lieu de 12 mois de prison pour le fils du commissaire Dip. C’est cette fois, justiciable first, justice last !
Mais le phénomène des bâtons jetés entre les roues de l’opposition parlementaire ne s’arrête malheureusement pas. Il semble que la démonstration du 28 juillet à Mare D’Albert ait donné quelques soucis au MSM. Dans la perspective du congrès de Vacoas, des réunions de mobilisation ont été organisées dans les trois circonscriptions 15, 16 et 17. Le député travailliste de Curepipe/Midlands, Michael Sik Yuen avait sollicité la mairie pour une réunion à la salle des fêtes, mais celle-ci a argumenté qu’elle ne loue pas sa structure récemment rénovée à des activités politiques. Pour celle organisée par Steven Obeegadoo le 7 juillet au même endroit, l’explication de l’administration, aussi ridicule que rageante, est que ce n’était qu’une « rencontre » pour discuter avec les Curepipiens. La salle peut accueillir les Curepipiens du Premier ministre adjoint mais, pour les partisans de Michael Sik Yuen, c’est trop « politique ».
Dans l’est, où la caravane de l’opposition projette de tenir son troisième rassemblement, c’est également mal parti. La course d’obstacles est relancée. Le conseil de district a dit oui puis non à la demande d’un activiste travailliste pour la tenue d’une réunion de mobilisation dans une salle relevant de sa responsabilité. Si la salle ne peut, selon les farceurs de l’administration locale, accueillir des activités politiques, elle peut s’ouvrir, toute l’année, aux réunions du comité régional du MSM !
Tout cela n’a hélas rien d’anecdotique. C’est, en fait, une énième manifestation du dangereux instinct de propriétaire qu’a développé le MSM. Qui ne recule devant rien pour conserver un pouvoir qu’il sait fragile, les résultats des dernières élections générales étant le baromètre infaillible pour attester du socle branlant sur lequel il tient. Les tracasseries faites à l’opposition pour de simples affaires d’emplacements s’ajoutent à la longue liste des pratiques antidémocratiques de ce régime dont l’intolérance est une affaire du quotidien. Le fonctionnement de l’Assemblée nationale a été dévoyé avec un nominé politique grossier au fauteuil de président se comportant comme un vulgaire agent du Premier ministre.
C’est le seul mandat 2017-2023 durant lequel il n’y aura eu aucun Select Committee, que ce soit sur la drogue, la réforme électorale ou de l’administration régionale, parce que cela aurait impliqué une participation de l’opposition. C’est très éloquent. Il vaut mieux ne pas parler de la MBC, qui nous rappelle tous les jours à quel point le pays « moderne », que ses dirigeants revendiquent, a une pratique arriérée de la politique de l’information à un moment où les réseaux sociaux rapportent en temps réel les événements les plus importants comme les plus banals.
Et pour couronner le tout, celui qui se prétend imbattable et qui voit du « flop » dans toutes les initiatives de l’opposition, a renvoyé les municipales pour la troisième fois. Comme on le voit, l’addition en termes de gestion autocratique et dictatoriale est salée. Et ce n’est pas une rencontre avec la presse dans le but de solliciter sa contribution à la lutte contre le trafic de drogue qui changera cette perception. Parce qu’on a toujours en tête les paroles que Pravind Jugnauth avait prononcées il y a exactement une année. Celles-ci : « Ena sertin zournalis, sertin media ki form parti de sa mafia ladrog-la e zot pe rod fer gouvernma ale. » Gouvernma ale, lapres reste !