Dans trois jours sera donné, à Paris, le coup d’envoi des XVII Jeux paralympiques avec une cérémonie d’ouverture qu’on annonce grandiose, Place de la Concorde. Cela, après le coup doublement réussi des cérémonies des Jeux olympiques tenus d’abord sur la Seine, puis au stade de France. Preuve que les organisateurs veulent surfer sur la vague du succès en profitant de l’enthousiasme qui perdure en France.
S’il est certain que les stades n’afficheront pas complet, le fait demeure qu’ils ne seront pas vides comme à Tokyo alors que sévissait la Covid-19. On annonce même une foule de 65 000 personnes mercredi soir lors de l’ouverture. L’occasion pour les Mauriciens de voir à nouveau flotter le quadricolore dans les rues de la capitale française. Cela, après le rendez-vous raté des JO, loin d’avoir gâché la ballade ces gens heureux du Comité olympique mauricien à Paris !
Le Mauritius paralympics committee (MPC) ne fait également pas dans la dentelle. Les six qualifiés seront accompagnés de 9 dirigeants dont certains n’ont visiblement pas leurs places dans cette délégation ! Même que le Rodriguais Eddy Capdor a fait le déplacement sans son entraîneur, tout comme c’était le cas pour le sprinteur Noa Bibi, éliminé au deuxième tour du 100m aux JO.
Le MPC s’est déjà expliqué et pour lui, la polémique est close. Tout tourne autour d’une question de quota, un peu à la manière du COM ! Peu importe, les jeux sont déjà faits sur ce dossier et c’est désormais sur la piste d’athlétisme du stade de France que s’écrira peut-être une nouvelle page de l’histoire du para-athlétisme mauricien d’ici quelques jours. Celle notamment de Noemi Alphonse au 100m fauteuil T54.
Maurice a effectivement des raisons d’y croire en une première médaille paralympique, 16 ans après la médaille de bronze olympique de l’ancien boxeur, Bruno Julie, en Chine. On dira même que les ambitions de Noemi Alphonse sont légitimes après son sacre aux Mondiaux de Kobe (Japon) cette année.
La Mauricienne sait toutefois que rien n’est gagné même si elle demeure, pour l’heure, troisième mondiale avec un chrono de 15”84 derrière la Belge Léa Bayekula (15”63) et la Finlandaise Amanda Kotaja (15”53), elles qui n’étaient pas présente à Kobe. L’Américaine Tatyana McFadden, détentrice du record de l’épreuve en 15”35 depuis 2016, n’y était pas aussi, mais demeure la favorite incontestée de ce 100m, même si, cette année, elle ne possède que le quatrième meilleur temps en 15”89.
Tatyana McFadden a d’ailleurs tout en sa faveur, notamment l’expérience, mais surtout un palmarès fort éloquent comprenant 20 médailles paralympiques, dont huit en or ! Même à 35 ans, l’Américaine sera très difficile à battre et ça, Noemi Alphonse en est consciente. Sauf que son entourage et elle savent que l’exploit reste possible après le sacre de Kobe.
Qui plus est, Noemi Alphonse a prouvé, en dix ans de carrière, qu’elle a gagné en maturité, mais aussi le respect des meilleures mondiales. Et ça, ce n’est pas rien, prouvant qu’elle n’est pas une athlète comme les autres. Elle n’a d’ailleurs jamais baissé les bras face à l’adversité, non seulement d’un point de vue purement personnel, mais également face à ceux qui ont toujours voulu lui mettre des bâtons dans les roues.
À 28 ans, Noemi Alphonse sait que c’est le bon moment pour aller jusqu’au bout de son objectif, puisque désormais, elle n’a plus rien à envier aux meilleures mondiales. Son entraîneur de toujours, Jean-Marie Bhugeerathee, le sait aussi et c’est la raison pour laquelle il n’a pas caché ses ambitions lorsque Week-End l’a sollicité dimanche dernier « Nous n’avons pas fait tout ce chemin pour rien. »
Jean-Marie Bhugeerathee fonde aussi beaucoup d’espoirs sur Yovanni Philippe, médaillé de bronze au 400m T20 aux Mondiaux de 2023 à Paris. Il avait même causé une grosse surprise en battant — le temps de la demi-finale — le record de ces championnats chez les athlètes souffrants d’une déficience intellectuelle. Son seul souci, précise Jean-Marie Bhugeerathee, sera ses aptitudes à bien saisir les consignes de course afin d’espérer créer l’exploit. Et Dieu sait de quoi est capable « la fusée Philippe », s’il parvient à courir sur sa vraie valeur.
Ce qui est certain, c’est que pratiquement toute la nation mauricienne sera derrière le Club Maurice lors de ces Jeux de Paris, à l’exception de quelques têtes brûlées, malheureusement ! À nos para-athlètes de leur donner tort et de prouver, une fois encore, qu’on peut faire de son handicap une force et ainsi mériter le respect de toute une nation, si ce n’est pas déjà le cas.
JEAN-MICHEL CHELVAN