Remaniement ? on reprend les mêmes et on continue !

Annoncé depuis des mois par les sources orange comme devant être un tournant majeur dans la politique gouvernementale de Pravind Jugnauth, le remaniement de cette semaine aura été pratiquement un non event. Comme c’est souvent le cas des stratégies du MSM, la montagne a accouché d’une souris. Selon le Larousse, le mot remanier signifie « changer complètement la composition de ; modifier. » De manière générale en politique, un remaniement ministériel est un exercice qui permet à un chef de gouvernement de re-équilibrer les forces de son cabinet en se débarrassant des éléments non performants, pour les remplacer par des meilleurs. Or, au lieu de faire entrer du sang nouveau – dont il ne dispose pas –, Pravind Jugnauth a dû se contenter de reprendre les mêmes pour continuer. Ce que les chatwas du pouvoir ont qualifié de « stratégie longtemps planifiée » n’a été, en fait, qu’un simple colmatage. Cette décision a été prise dans l’urgence parce qu’avec une lecture a posteriori des faits, il est évident qu’il fallait absolument faire démissionner le PPS Rajanah Dhaliah avant le « remaniement ». Effectivement, cela aurait fait désordre d’avoir un PPS arrêté – même provisoirement – sous une accusation d’acceptation de pots-de-vin. C’est ce qui expliquerait que, dès samedi dernier, Pravind Jugnauth a publiquement demandé à Dhaliah de step down de son poste de PPS.

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Alors que cela fait des semaines que l’affaire du chassé de Grand-Bassin, impliquant deux de ses élus, a éclaté sans que le Premier ministre ne s’en émeuve. L’urgence de l’initiative de Pravind Jugnauth incite à se demander s’il n’était pas au courant du fait que son PPS allait être interpellé et arrêté par l’ICAC, cette semaine. Si c’est le cas, on pourrait se demander comment ou de qui le PM a obtenu, plusieurs jours d’avance, cette information supposée être confidentielle ? Est-ce que c’est son fameux radar personnel qui l’a informé ? À ce stade, il faut souligner que la politique d’interpellation, de convocation ou d’arrestation de l’ICAC est, pour dire le moins, élastique. Rajanah Dhaliah et Maneesh Gobin sont tous les deux impliqués dans une même affaire de pots-de-vin, mais alors que le premier nommé a été interpellé, accusé provisoirement avant d’être libéré sous caution, le second continue à faire partie – même après le remaniement – du gouvernement et conserve le portefeuille de ministre de la… Justice sans être interrogé ou interpellé! Cette politique de deux poids et de plusieurs mesures de l’ICAC n’étonne plus grand monde. Et certainement pas Ivan Collendavelloo, limogé par Pravind Jugnauth sur la base d’une lettre sans en-tête que lui avait remis un proche conseiller dans le cadre de corruption alléguée dans l’affaire Saint Louis. Trois ans après son limogeage, qui l’a fait passer de Vice PM à simple – mais fidèle – député, Ivan Collendavelloo n’a pas encore été convoqué par l’ICAC…

Quoi qu’il prétende, Pravind Jugnauth a été contraint de replâtrer en surface son gouvernement, au lieu de le remanier en profondeur avec les éléments dont il dispose, en évitant de les mécontenter en cette fin de mandat. Ne disposant pas de sang neuf, il a dû se contenter d’une espèce de musical chair en déplaçant ici pour mettre là, dans le cadre d’une opération qui tente de contenter tout le monde. Dans les milieux du MSM, on dit que Pravind Jugnauth a les mains « amarrées » et qu’il a été obligé de faire ce qu’il a fait en essayant de maintenir les équilibres de ce qu’il appelle « les réalités électorales de Maurice » en nommant deux nouveaux ministres, plus pour ceux qu’ils sont censés représenter communalement que pour leurs qualités professionnelles. De même, il a nommé PPS des députés qui se sont fait remarquer – dans le sens ironique du terme – pour leur capacité à – mal – lire sur leurs laptops les discours commençant par des louanges à Pravind Jugnauth, que leur écrivent les gâte-sauces de la kwizin qui se prennent pour des spin doctors. Parmi les « promus », se trouve le député Dhunnoo qui s’était fait remarquer en agressant physiquement un infirmier étranger dans une clinique privée et contre qui la police ne semble pas avoir ouvert la moindre enquête. Pour suivre la politique élastique de l’ICAC ?

Comme on peut le constater, rien n’a changé au MSM sinon qu’il compte désormais dans ses rangs deux députés qui fréquentent les box des accusés dans les cours de justice. Pour ce qui est du remaniement annoncé, on peut le résumer par cette phrase : on reprend les mêmes et on continue !

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