Questions d’actualité

En juillet 2024, la Mauritius Investment Corporation (MIC) refuse d’accorder un prêt de Rs 45 millions à Pulse Analytics — la société qui devait prédire les résultats des élections en se basant sur les « likes » et « dislikes » des internautes — parce qu’elle n’avait pas les critères nécessaires pour l’obtenir. Les propriétaires de la compagnie ont tout simplement revu leur projet en l’adaptant aux demandes de la MIC et renvoyé le dossier à la MIC — en octobre, à la veille des élections — qui cette fois l’accepte. Avec une vitesse d’exécution qui donne le vertige. En quelques heures, le prêt est approuvé, le chèque rempli et signé, le montant décaissé et transféré sur un compte bancaire à l’étranger. Où une partie sera dépensée en hôtels, restaurants et produits de luxe ! Mais à quoi servent donc les mécanismes qui sont censés s’assurer que l’argent de la MIC — c’est-à-dire des contribuables — est utilisé à bon escient et prêté à des compagnies ou entreprises qui répondent aux critères définis ? Dans le cas qui nous occupe, il ne s’agit que d’un prêt de Rs 45 millions sur les dizaines de milliards que la MIC a prêtées à des compagnies, grandes et petites, depuis sa création. Est-ce que les procédures d’extrême urgence pratiquées dans le cas de Pulse Analytics ont été également utilisées dans d’autres cas ? Est-ce que dans les cas que le nouveau gouverneur de la Banque de Maurice ne veut pas rendre publics — pour respecter les lois et règlements sur la confidentialité — il y aurait aussi des prêts accordés très rapidement à des compagnies ou entreprises ne satisfaisant pas aux critères ? Comment peut-on, face à ce qui précède, empêcher le Mauricien de dire qu’il a vécu dans un pays à deux vitesses : celle ultra rapide du lièvre pour les bien connectés et celle de la tortue pour les autres ? Car il faut rappeler que pour obtenir un prêt de Rs 45 000 d’une banque, le client normal doit remplir des tas de formulaires, fournir des garanties qui vont constituer un dossier qui sera soumis à des comités qui vont l’étudier avant de l’approuver. Si sa demande est approuvée, ce n’est pas en quelques heures qu’il obtiendra le chèque, mais après des jours et des jours, pour ne pas dire des semaines !
Une entrepreneure m’a demandé de poser la question suivante : les hôtels affichent complet en cette période de l’année, à tel point que certains d’entre eux ont (ré)institué un droit d’entrée pour les Mauriciens qui souhaitent — et ont les moyens — d’aller déjeuner ou passer une journée dans leurs établissements. Cette augmentation d’arrivées touristiques devrait signifier une conséquente rentrée de devises dans le pays, dans la mesure où le voyageur paye d’avance son billet d’avion, son séjour hôtelier — ou le campement et l’appartement —, ses transferts ou sa voiture de location. Non seulement il paye d’avance, mais il le fait en devises. Eu égard à la pénurie de devises qui oblige les entrepreneurs à faire queue devant les banques pour en obtenir, il est évident que les sommes payées en devises pour le tourisme en général n’arrivent pas à Maurice. Ou alors n’arrive chez nous qu’une partie insignifiante, insuffisante pour mettre fin à la pénurie qui ralentit l’économie. Est-ce qu’il n’y aurait pas des mesures à prendre pour mettre fin à cette situation et obliger les opérateurs touristiques à rapatrier les devises qui sont bloquées à l’étranger ? Comme le disait Xavier-Luc Duval quand il était le ministre du Tourisme : Maurice, c’est un plaisir ! Surtout pour ceux qui sont bien connectés et savent en profiter.
C’est le cas de l’ex-directeur de la Mauritius Tourism Promotion Authority (MTPA), dont on vient d’apprendre qu’entre juillet 2023 et novembre 2024 il a touché en termes de per diem pour ses « misions » à l’étranger un total de 47 000 dollars — en devises américaines — soit l’équivalent de Rs 2,2 millions. Sans compter les billets d’avion pour ces « missions » aux quatre coins du monde. Est-ce que les anciens membres du board de la MTPA peuvent justifier la nécessité de ces 37 « missions » effectuées en 16 mois et ce qu’elles ont rapporté au pays ? Terminons avec le tourisme en demandant aux membres de l’ancien conseil d’administration de la MTPA ce que l’opération « Royal Ascot », qui a permis au beau-frère de l’ex-Premier ministre d’aller parader en redingote avec haut de forme à l’hippodrome d’Ascot, a apporté au tourisme mauricien. Une opération de la MTPA qui a duré de 2016 à 2024, et couté au contribuable mauricien plus de Rs 8 millions. Sans doute payées en devises étrangères comme le per diem de l’ex-directeur général de la MTPA !

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Jean-Claude Antoine

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