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Pointe-aux-Sables – Éviction de squatters : « Zordi san pitie zot vini, zot kraz nou lakaz ! »

Environ une cinquantaine de maisons en tôle, construites illégalement sur un lopin de terre de l’État, rue Jean Blaize, à Pointe-aux-Sables, ont été démolies dans la journée d’hier, les familles qui y vivaient ayant été priées d’évacuer les lieux depuis le 22 mai. Même s’il n’y a pas eu de réelles tensions lors de l’opération, de nombreuses familles affirment qu’elles devront désormais vivre dans la rue.

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Tôt dans la matinée vendredi, des membres de la Special Supporting Unit (SSU) et des agents de démolition, avec leur JCB, sont venus en nombre afin de procéder à l’exercice de démolition des maisons de fortune des squatteurs qui s’étaient approprié ce lopin de terre sis rue Jean Blaize. Les occupants ont alors été priés de ramasser leurs effets personnels afin que l’exercice puisse se poursuivre. Mais pour certains, la pilule a été dure à avaler en voyant leur demeure réduite en un amas de vieilles feuilles de tôle. « Zot pena leker. Zot pena santiman. Zot fer ofisie vini pran informasion ar nou e zordi san pitie zot vini, zot kraz nou lakaz ! » déplore un des occupants.

Certains avaient eux-mêmes décidé d’enlever leurs structures avant que le JCB n’arrive. Malgré les efforts de quelques squatteurs et l’appel à des négociations, décision aura malgré tout été prise de démolir toutes les maisons qui se trouvaient sur ce terrain marécageux. « Se enn zour tre sonb pou pei ek pou Pointe-aux-Sables. Alor ki nou an plin konfinma, lakaz dimounn pe kraze. Mo dord gouvernma ti rass lakaz, zordi zot pe kraz lakaz. Mo ti fer enn lapel pou kapav trouv enn solision ansam lor sa dram  imin otour enn latab negosiasion. Plizir ofisie diferan minister ti fer lanket e ti paret pozitif. Aster, tou lakaz pe kraze. Parmi bann fami ena ki la depi tre lontan, pena oken plass pou ale. Ena nourison ki malad. Mo osi tenir fer apel responsabilite saken pou ki dimounn ki ena landrwa pou viv pa mett an peril dimounn mizer ki vrE mem pena plass pou ale », a soutenu le député de la circonscription No 1, Fabrice David, qui était sur place hier.

Environ une cinquantaine de maisons de squatteurs a été démolie. Malgré les cris de colère, les occupants n’ont pu qu’accepter leur sort. Certains, comme Anaïs, mère d’un nourrisson malade, déplore le traitement « inhumain » qu’elle subit : « Mo bebe malad e zot pena oken lamour prop, zot tir nou dan nou lakaz ek nou bann zafair pou detrir. Zot pe dir met zanfan dan kouvan. » Les forces de l’ordre, elles, étaient sur le qui-vive, parées à toute intervention au cas où la situation ne dégénère.

José Rose, un habitant des environs, déplore la manière dont ces squatteurs ont été traités, bien qu’ils occupaient un terrain illégalement. « Li vrai li danzere ress isi, li surpeple. Kan mem, gouvernma-la an tort, akoz pann trouv solision pou sa bann dimounn mizer. Ena enn period confinma, inn bizin rod enn plass pou reste akoz zot pe ress boukou dimounn dan enn sel lasam. Ti bizin par exanp fer met bann kontainer lor bann terin football fer bann fami-la reste ladan entretan. La, pe tir zot, pe met lor lari. Pe depens par miyar dan Moris, mai pou donn lakaz sa kantite dimounn ki pe rode-la, pena. » La plupart de ces familles de squatteurs soutiennent n’avoir d’autre choix que de vivre dans la rue avec leurs affaires empilées sur le sol.

ReA dénonce une « provocation sociale »

La démolition des maisons des squatteurs à Pointe-aux-Sables « prouve que le pays a basculé dans une dictature », selon Rezistans ek Alternativ (ReA). Le parti de gauche, qui animait une visioconférence hier, a déploré « la manière de faire du gouvernement, de jeter des personnes à la rue en plein confinement ». C’est une « provocation sociale », dénonce Dany Marie, porte-parole, qui estime également que le gouvernement est « en train de mettre les plus vulnérables à genoux ».

Pour Manjusha Coonjan, « il est injuste que des citoyens vivant déjà dans des logements précaires se retrouvent à la rue, en pleine crise sanitaire ». Au lieu de les protéger, regrette-t-elle, « les autorités sont en train de profiter du confinement pour faire de la répression contre les personnes vivant dans la précarité ». Surtout qu’en cette période, personne ne peut manifester pour dénoncer cette situation. « Pendant le confinement, ils ne sont pas supposés être dans la rue. En démolissant leurs maisons, on est en train de les criminaliser. Surtout quand on connaît les amendes et autres sanctions qu’ils risquent et le fait qu’ils ne pourront trouver du travail, car ce sera mentionné sur leurs certificats de moralité. »

Cette dernière est très critique envers le ministre du Logement et des Terres, Steven Obeegadoo, « un enfant de mai 1975 », évoquant à son propos « une trahison historique ». Manjusha Coonjan qualifie cette situation « d’ironique », comparée à la situation des étrangers à Maurice. « Il y a des étrangers qui ont squatté la plage de Pomponette, mais qui ne sont pas inquiétés. Il y a des villas inoccupées, alors que des citoyens n’ont pas de maison. »

Dany Marie dénonce, elle, un « manque d’humanité du gouvernement » à l’égard des squatteurs. Elle est d’avis que celui-ci est en train de faire une « provocation sociale » en mettant des personnes à la rue en pleine crise sanitaire. « La République de Maurice a basculé dans la dictature. On est en train de mettre les plus vulnérables à genoux. »

Revenant sur les propos du ministre Obeegadoo à la télévision, David Sauvage ajoute : « Il a dit que le terrain occupé était marécageux, et donc dangereux. Mais si le gouvernement avait vraiment à cœur de protéger la population des zones dangereuses, il aurait dû publier le rapport du Digital Elevation Model de 2018, avec une cartographie de ces endroits, et accompagné d’une politique de relogement. » Il ajoute que l’ancien ministre Showkutally Soodhun avait également utilisé le mot « dangereux » pour qualifier Pomponette quand elle a été déclassifiée comme plage publique. « Il semble que c’est devenu une tendance. » Il insiste pour que ceux qui sont dans la précarité aient droit au logement.

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