J’ai fait un rêve inhabituel inspiré du besoin de m’évader quelque temps, quelques jours. Ce dernier est si clair dans ma tête au réveil, qu’il me paraît être du réel. Est-ce un rêve devenu réalité ?
L’air est frais, piquant, mais d’une douceur hivernale qui invite à la promenade. Je me perds dans les ruelles d’un village italien, où l’hiver se fait sentir sans s’imposer. Les pierres des maisons, chauffées par le soleil pâle, conservent la chaleur du chauffage intérieur. Les fenêtres, légèrement embuées, laissent filtrer une lumière tamisée qui baigne l’intérieur de chaque foyer d’une lueur douce et intime.
Les ruelles pavées, souvent désertes, résonnent de mes pas solitaires. Les murs sont décorés de lierre affaiblie par la saison. De petites touches décoratives aux couleurs chaudes au pied des maisons viennent égayer l’aspect grisâtre qui prédomine. Le parfum de bois brûlé flotte dans l’air, évoquant les foyers chaleureux où l’on se rassemble pour échanger autour d’un espresso ou d’un vin brûlé.
À chaque coin, je découvre des habitants qui vaquent à leurs occupations, emmitouflés dans des écharpes et des vestes, et pas toujours prêts à échanger un sourire ou un salut. Un chat paresseux et tout somnolent s’étire sur un muret, tandis qu’un boulanger, la farine sur les mains, prépare de délicieuses viennoiseries qui embaument les alentours. Plus loin, derrière la vitrine d’un restaurant, une mama roule sa boule de pâte pour en faire des pâtes fraîches. Assise bien au chaud, à l’abri du vent glacial, elle s’affaire avec force et élégance. L’art de la fabrication des pâtes lui est facile.
Il y a dans cet hiver italien une quiétude profonde, un équilibre parfait entre la vie quotidienne et la douceur de la saison. C’est une balade tranquille, un moment tant attendu, où chaque ruelle semble chuchoter des secrets d’antan, comme si le temps n’avait pas cours ici.
Stop ou encore ?
Nous n’allons quand même pas nous arrêter en si bon chemin. Mon rêve m’a amenée bien plus loin.
Après avoir exploré les villages paisibles, je suis à Rome, une ville qui, même en hiver, ne perd jamais de sa vivacité. L’air frais de la capitale italienne me frappe dès que je mets un pied hors de la gare. Les rues sont animées, mais d’une manière différente, comme si les habitants, tout en étant pressés, s’accordent des instants pour profiter des petites douceurs qu’offre cette période.
Les monuments antiques, majestueux et imposants, se dressent sous un ciel d’hiver clair, leur pierre chaude contrastant avec le froid de l’air. Le Colisée, moins fréquenté par les foules de touristes en cette période, semble presque solennel, empreint d’une tranquillité qui invite à la réflexion.
En me dirigeant vers le Forum, je croise des groupes de Romains qui flânent, certains s’arrêtent pour discuter, d’autres prennent un café dans l’un des nombreux bistrots où les tasses fumantes ajoutent un peu de chaleur à l’atmosphère. Du Mont Palatin, je découvre un Forum désert, mais son histoire est tellement intense qu’elle en remplit ce sidérant espace de pierres.
Je m’aventure sur la Piazza Navona, où les fontaines, bien que la brillance du soleil estival soit absente, semblent presque plus belles sous les rayons doux de l’hiver. Les artistes de rue ajoutent une touche de magie. Plus loin, des arbres nus déploient leurs branches sèches vers un ciel d’un bleu clair.
Rome, en hiver, a une autre saveur : plus intime, plus personnelle. On s’y sent comme un visiteur privilégié, un témoin discret d’une ville qui, malgré les siècles, reste pleine de vie et de surprises. Les rues résonnent encore des échos d’un passé sanguinaire, mais l’hiver leur donne un charme particulier, une douceur presque irréelle.
Ici, il n’y a pas que les rues qui résonnent, mais il y a aussi les cloches des églises réputées de par le monde. Majestueuses et intemporelles, ces dernières sont portées par l’histoire. Chaque fresque, chaque colonne raconte une époque révolue, imprégnée de spiritualité. L’hiver, la lumière tamisée qui filtre par les vitraux crée une atmosphère extatique, propice à la contemplation. En ces lieux sacrés, le silence est une prière en soi.
L’Italie, berceau de tant de saints, est un véritable sanctuaire vivant où la spiritualité s‘infiltre dans la pierre. De Saint François d’Assise à Sainte Catherine de Sienne, de Padre Pio à Sainte Rita en passant par le jeune Carlo Acutis (qui sera canonisé en avril), l’influence religieuse et mystique ont marqué ce pays pétri d’une richesse spirituelle inhabituelle.
Par ailleurs, mon rêve a été si loin qu’il m’a même laissé le souvenir de plats dégustés. Les pizzas, cercles d’or qui dansent sous la chaleur du four, sont faites d’une pâte légère et aérienne, croustillante sur les bords, douce et tendre au centre. Elles s’offrent dans une explosion de couleurs et de saveurs, avec la sauce tomate rouge comme un baiser de soleil couchant, le fromage qui fond en un voile crémeux et les herbes parfumées qui viennent effleurer les sens. Chaque bouchée est un voyage, un équilibre parfait entre la simplicité et la richesse, qui s’épanouit dans une parfaite harmonie.
Les pâtes, elles, sont des fils d’or tissés avec amour et patience, enroulés comme des souvenirs d’enfance. Elles se présentent sous mille formes : entre autres, de longs “spaghettis” qui se laissent engloutir en une danse légère, aux petits “penne” qui captent chaque goutte de sauce avec une délicatesse infinie. Tout cela métamorphose un simple dîner en sublime dégustation. Chaque mouvement de fourchette est comme une caresse, chaque bouchée un doux appel à apprécier ce qui est bon.
Au loin résonne à nouveau une cloche. Celle-ci se rapproche et semble plus forte. Tellement forte qu’elle en devient même dérangeante. La sonnerie persiste, elle insiste à me tirer de cet environnement douillet.
J’entends une voix au loin qui se mélange au charme du restaurant. “Camille, Camille, il faut te réveiller”. Oh ! la la ! C’était l’alarme qui me ramenait à la réalité. “Pitié, je veux rester là-bas quelques instants encore. Je n’ai pas encore terminé mon échappée belle !” Bien qu’un peu déçue, je me réjouis néanmoins d’avoir erré dans de nouveaux horizons.
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