« Met lichien vey saucisse ! »

Le scénario est inépuisable. De très graves allégations de
« planting » et de complot sont formulées – font l’objet d’un affidavit de Vimen Sabapati, arrêté pour possession allégué de drogue – contre une section de la police, la fameuse SST. Silence total du côté des Casernes centrales. Interpellé au Parlement, le Premier ministre et ministre de la police dit qu’il ne répond pas à des allégations – ce qui ne l’empêche pas d’en faire contre ses adversaires, quand bon lui semble et avec la bénédiction du Speaker. La situation a changé quand des radios privées ont diffusé une partie des enregistrements, attachés à l’affidavit en question, contenant des conversations entre policiers sur la manière « d’installer » des suspects ou de les faire chanter. Ces enregistrements ayant suscité de vives réactions ont obligé le Commissaire de police à réagir. Il a fait publier un communiqué pour annoncer l’ouverture d’une enquête « approfondie sur toute allégation d’abus d’autorité ou d’actes illégaux de la part de l’un de ses agents ». Re interrogé au Parlement sur le même sujet , le PM a entonné le refrain de la chanson favorite de son père – pa moi ça, li ça – en disant que c’est la responsabilité du Commissaire de police de mener des enquêtes sur la police. En dépit de la gravité des allégations portées contre une section de la police, le PM a refusé d’envisager l’éventualité de confier l’enquête à un organisme indépendant. Non, c’est la police qui enquêtera sur la SST. Ce qui équivaut à – pour reprendre la formule imagée autrefois utilisée par feu le Cardinal Jean Margéot – «  met lichien vey saucisse ! »
La manière dont est menée « l’enquête approfondie » de la police sur elle même commence à susciter des interrogations. En effet, les limiers des Casernes centrales semblent plus intéressés à enquêter sur la manière dont les enregistrements ont été effectués, et sur ceux qui ont contribué à rédiger l’affidavit, que sur les policiers qu’ils mettent en cause. Par ailleurs, le responsable de la Special Stricking Team, dont les méthodes – et le manque de résultats – sont critiqués, a accepté de participer à un talk show radiophonique. Il était accompagné d’un duo d’avocats – les auteurs du « rapport » sur l’affaire Kistnen qui va à l’encontre des conclusions de l’enquête judiciaire – dont on ne comprenait pas la présence dans l’émission. De mémoire de journaliste, c’est la première fois qu’un haut responsable de la police se fait accompagner d’un couple d’avocats pour accorder une interview radiophonique. Au lieu de répondre aux questions du journaliste, le chef de la SST – parlant de lui à la troisième personne – s’est livré a un historique louangeur de son parcours au sein de la brigade anti-drogue, où il aurait procédé à « des milliers d’arrestations qui auraient mené à des « successful prosecutions », sans pouvoir en dire le nombre. À chaque question précise du journaliste, le chef de la SST répondait à côté, disait qu’il ne pouvait pas donner de réponse, que l’affaire évoquée était « sub judice » et que l’avenir allait lui donner raison sur toute la ligne. Il a balayé d’un revers de main les accusations de « planting » ou des liens avec des mafiosi portées contre lui et son équipe, contenues dans l’affidavit qui a contraint le CP à ouvrir l’enquête en cours. Pour le chef de la SST, ce sont des accusations « sans queue ni tête », faisant partie de complots pour empêcher les affaires d’aller en Cour ou alors que tout cela est du « komiko ». Sur un point, le chef de la SST a raison : son interview-monologue sur Top FM relevait du ton et de l’esprit «  komiko », ces spectacles comiques qui connaissent un succès mérité. Mais le problème c’est que le chef de la SST n’est pas un personnage de la troupe de Mislaine Duval, dont les dialogues sont destinés à faire rire, mais un officier de police responsable d’une section dont les actions sont de plus en plus contestées en Cour. Un officier de police dont les agissements rappellent ceux d’un autre policier qui estimait que l’uniforme qu’il portait lui donnait tous les droits, dont celui de prendre la justice entre ses mains : le fameux chef inspecteur Radhoa. Est-ce en autorisant son subalterne à faire ce genre de show radiophonique raté, dans lequel il a abordé beaucoup de questions portant sur les allégations de l’affidavit de Vimen Sabapati, que le Commissaire de police entend faire mener une enquête « approfondie » sur toute allégation d’abus d’autorité ou d’actes illégaux de la part de l’un de ses agents. ?

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour