Est-ce que le MSM va réussir la où toutes les tentatives de médiation et de négociation entre les partis — grands et petits — de l’opposition se sont cassé les dents ? La question mérite d’être posée quand on se rend compte que lentement, mais sûrement, les partis d’opposition semblent se diriger, malgré leurs nombreuses dissensions et querelles d’égo, vers une position commune. Celle de se mobiliser contre le projet de loi visant à créer une Financial Crimes Commission pour mener le combat contre la fraude et la corruption, combat que le gouvernement dit mener mais dont les résultats ne sont guère convaincants. Il y a bien sûr les saisies de drogue ultramédiatisées, mais bien souvent — trop souvent même — elles n’aboutissent pas, les enquêtes prenant un temps infini, ce qui permet, dans certains cas à la drogue saisie, de « s’évaporer » de moitié. Même si elles sont gardées aux Casernes centrales. Sans compter les arrestations, elles aussi ultramédiatisées, qui finissent après des mois et des mois d’enquête au tribunal par l’abandon des poursuites, faute de preuves. C’est pour donner une nouvelle impulsion au combat — que le Premier ministre dit mener personnellement avec son radar — que le gouvernement souhaite créer le nouvel organisme. Le hic c’est que bien avant qu’on ait commencé à débattre du projet de loi au Parlement, on sait déjà qui sera le dirigeant de la nouvelle institution. Il s’agirait de l’actuel directeur de l’ICAC, dont on ne peut dire que son bilan soit particulièrement reluisant. À moins d’y faire figurer le fait qu’il a réussi à passer du statut d’accusateur à celui de défenseur dans le procès en appel devant le Privy Council, que l’ancien DPP avait logé contre Pravind Jugnauth.
Si c’est le cas, cette nomination pourrait être qualifiée de « récompense pour service rendu », un terme que l’on entend souvent dans les téléfilms sur les organisations spécialisées dans la fraude et la corruption. Ce qui correspondrait aussi à une savoureuse expression de feu le Cardinal Jean Margéot qui se passe de commentaire : « Met lisien vey sosis ! » En tout cas, en présentant ce projet de loi, le MSM a réussi à donner une raison aux partis de l’opposition de s’unir. Un exploit à mettre au crédit des stratèges de Pravind, qui œuvrent dans la fameuse kwizinn.
Pour une fois, Navin Ramgoolam a raison : Pravind Jugnauth semble obsédé par sa personne. Il semble tellement obsédé par le leader du Parti Travailliste qu’il passe un nombre considérable de son temps à essayer de le dénigrer. Et ce, alors que d’un autre côté — et comme il n’en est pas à une contradiction près-, il n’arrête pas de dire que Ramgoolam est un has-been dont personne ne veut à Maurice. Dans ce cas, pourquoi continuer à exhumer — souvent en fouillant dans des poubelles — des affaires qui sont susceptibles de discréditer celui qu’il considère, tout au moins dans ses discours, comme n’étant même pas son adversaire ? Il devrait se rappeler que son père avait l’habitude de dire que « dimounn zame avoy kot ros lor pie kip a raporte ! » S’il avait médité cette pensé de son père, et surtout s’il avait vérifié ce que ses supposés stratèges lui font dire, il se serait évité quelques own goals qui font rire à ses dépens.
Ainsi, lorsqu’il a évoqué l’affaire Macarena, il y a oublié que parmi les danseurs de cette soirée — ou plutôt parmi ceux qui regardaient de près les danseuses -, il y avait un individu qui, plus tard, après avoir changé casaque, fait aujourd’hui partie de ses chatwas. De la même manière, si au lieu d’affirmer, comme le lui a sans doute écrit un de ses stratèges autoproclamés, que Ramgoolam avait abusé des commandes de champagne quand il était chef du gouvernement, il avait vérifié les dates, il se serait épargné une belle boulette. Car le Premier ministre en poste fin décembre 2014, quand les bouteilles de champagne furent commandées était… son père, sir Anerood Jugnauth ! En multipliant ce type de boulettes, Pravind Jugnauth fournit à Navin Ramgoolam de gros paquets de bois pour le battre. Grâce à ses stratèges !