Le système

Pourquoi est-ce que les prévisions de la météo sont si déconnectées, avec ce qui se passe sur le terrain ? Le dernier exemple en date de ce déphasage remonte à jeudi dernier. Après avoir émis des avis de veille et autres alertes depuis le début de la semaine, qui avait conduit à la fermeture des écoles mercredi, la météo enlève toutes les alertes jeudi matin. Aucune menace météorologique n’étant signalée, les écoles ouvrent leurs portes et les Mauriciens vont travailler comme pendant un jour normal. Sauf que, déjà dans la matinée, la pluie commence à tomber et s’intensifie dans l’après-midi. Ce n’est qu’après 17h, alors que les rivières sont en crue, des régions rurales sont inondées, des canalisations des villes débordent, que la conduite devient hasardeuse entre chaussée glissante et nappes de brouillard que la météo émet une alerte de forte pluie. Quand elle finit par le faire, les grosses pluies étaient devenues carrément torrentielles dans plusieurs régions du pays ! A quoi cela sert d’avoir une alerte de veille de grosses pluies si on n’est pas capable de faire des prévisions correctes pour les grosses bandes nuageuses du lendemain ? Est-ce que la météo utilise toujours ce protocole qui exige qu’on enregistre 100 millimètres de pluie dans un endroit pour décréter un avis de grosses pluies ? Pendant un bout de temps la météo justifiait l’inexactitude de ses prévisions par le fait qu’elle ne possédait pas de radar. Depuis grâce à un don du gouvernement japonais, ce manque a été comblé. Est-ce que, comme certains l’affirment, les prévisionnistes ont des difficultés à déchiffrer les données du radar offert par le pays du soleil levant ? Si c’est le cas pourquoi ne demande-t-on pas au Premier ministre de prêter son radar personnel à la météo. Celui avec lequel il surveille ses adversaires politiques !
Depuis des années les protestations se multiplient contre les permis de développement que le conseil de district de Rivière Noire semble distribuer à tour de bras. Surtout si le demandeur a les contacts qu’il faut à la hauteur nécessaire. Depuis des années les habitants du morcellement Carlos tirent la sonnette d’alarme sur ces permis de construire sur le flanc de la montage qui, non seulement défigurent la Tourelle, mais bouchent en les bétonnant les drains naturels qui permettaient à l’eau de la montagne de descendre vers la mer, en évitant les constructions. Les manifestations de protestation ont été réprimées par la police. Des manifestants sont encore poursuivis pour avoir troublé l’ordre public, alors qu’ils se contentaient de prédire ce qui allait se passer avec le bétonnage des flancs de la montagne et l’obstruction des drains. Ces prédictions se sont réalisées vendredi : ne pouvant pas descendre la montagne à travers les drains naturels bouchés ou jamais entretenus, les pluies torrentielles se sont transformées en une multitude de petites cascades traversant maisons et jardins, emportant tout sur leur passage et laissant derrière des maisons inondées, des jardins saccagés et des centaines de mètres cubes de boue. Ce qui enrage dans la situation de Morcellement Carlos — et sans doute dans d’autres localités du pays dans le même cas – c’est que les vrais responsables de ces catastrophes, ceux qui ont distribués les permis de construction et de bétonnage en dépit des mises en garde, ne seront pas mis en cause, n’auront pas à faire face aux conséquences de leurs décisions. Une situation qui va leur permettre de continuer a distribuer des permis qui vont, plus tard, provoquer d’autres catastrophes.
La colère et l’indignation, nourries par les vidéos qui montrent l’ampleur des dégâts, souvent causés par de la négligence ou le je m’en foutisme des autorités dites responsables, sont fortes, justifiées. Mais comme c’est le cas pour les scandales, le dernier dévoilé fait oublier les précédents, la dernière indignation chasse celles d’avant car le Mauricien a la mémoire courte. Une fois les réservoirs remplis et la distribution d’eau potable rétablie, on va rapidement oublier ces semaines où l’eau ne coulait que quelques minutes sans pression dans certaines régions ou qu’il fallait, dans d’autres, faire la queue pour attendre le passage hypothétique du camion citerne. A chaque fois on s’indigne, on dénonce, on menace de descendre dans la rue, mais dès que la situation est plus ou moins rétablie, on passe à autre chose. C’est cette capacité des Mauriciens de grogner avant d’accepter, de passer rapidement à autre chose qui permet au système de continuer à dysfonctionner de plus belle.
On a le système qu’on mérite.

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