— Tu crois dans les malédictions, dans les mauvais airs toi ?
— Pourquoi tu me demandes ça ? Tu sais bien que je suis une bonne pratiquante qui va régulièrement à l’église.
— Une bonne pratiquante qui de temps en temps va faire voir son destin par les personnes qui savent, soi-disant, regarder dans les mains !
— Ayo, tu sais bien que je fais ça comme ça, juste pour m’amuser, pour faire comme les autres. Je ne crois pas dans ces affaires-là moi. Mais pourquoi tu me demandes ça ?
— Parce que ce n’est pas possible d’être soy à ce point-là toi.
— Soy ça veut dire quoi ?
— Ne me dis pas que tu ne connais pas le mot soy ? Ça veut dire être mofine, avoir la malchance, quoi.
— Et qui est soy, selon toi ?
— Mais le pays à cause du gouvernement-là toi. Surtout depuis que le fils a pris la place du père.
— Pourquoi tu dis ça ?
— Mais parce que ça n’arrête pas depuis que le petit est au pouvoir, toi. Quand le papa était là, on n’avait pas de cyclone. Avec le petit, on a eu deux cyclones enn lor lot. Et il paraît que ce n’est pas fini !
— Là tu es en train d’exagérer. C’est pas de sa faute, toi. C’est le réchauffement climatique.
— Pas seulement. Rappelle-toi. Comme le gouvernement est arrivé au pouvoir en 2014, on a eu l’affaire BAI et juste après l’affaire Betamax. Dans le premier cas, des centaines de Mauriciens ont perdu leur argent. C’est pareil pour la deuxième affaire.
— Encore une fois, tu es en train de causer un gros n’importe. Dans l’affaire Betamax, c’est le gouvernement qui a payé quand il a perdu le procès, pas les Mauriciens.
— Ah bon ?! Et d’après toi, d’où il sort cet argent que le gouvernement est en train de dépenser sans compter là ? Il coule du robinet ?!
— Là tu as un point, c’est vrai : tout ça vient des taxes que payent les contribuables, c’est-à-dire les Mauriciens comme toi et moi !
— Et ça ce n’était que le commencement. Après, les affaires et les scandales n’ont fait que continuer. Par exemple, la fameuse affaire Sobrinho qui a fait l’Union européenne mettre Maurice sur sa liste noire.
— Là, tu te trompes. Ce n’était pas le soy, c’était l’incompétence et le trafic d’influence, les commissions. La corruption, quoi !
— Ça même. Et le tout mélangé à une grosse dose de soy. Sans compter le Covid-19.
— Encore une fois, je ne suis pas d’accord avec toi. Tu ne peux pas dire que le gouvernement est responsable du Covid. C’est une pandémie que tous les pays du monde ont eu, toi.
— Sauf qu’à Maurice les protégés de ce gouvernement ont été autorisés à faire du big business sur le dos des malades, les victimes du Covid !
— De quoi tu veux parler, du scandale Molnupiravir, ce médicament que le ministère accepte de payer beaucoup plus cher que le prix du marché ?
— Pour cet achat, le ministère de la Santé a dépensé Rs 80 millions sans qu’aucun responsable ne soit au courant ! Mais avant ça, il y a eu les contrats d’urgence donnés à des marchands de poisson et autres quincailliers pour acheter des équipements médicaux.
— Des équipements surfacturés et dont certains étaient inutilisables. J’avais oublié cette affaire-là moi. J’espère qu’on a obligé ceux qui avaient eu les contrats à rembourser !
— Pas encore, l’ICAC n’a pas fini son enquête !
— Encore une affaire « eaten by rats » alors !
— Qu’est-ce que c’est que ça ?
— Avant, quand on ne retrouvait pas un dossier dans le service civil, on disait qu’il avait été « eaten by rats » et l’affaire s’arrêtait là même !
— Aujourd’hui, on fait des enquêtes qui n’en finissent pas de finir !
— Quand tu ajoutes toutes ces affaires, tous ces scandales au mauvais temps, tu es obligée de dire que Maurice est mari soy.
— C’est vrai que le temps est mari mauvais. Depuis les deux derniers cyclones, on n’arrête pas d’avoir des flash floods ou des avis de pluies torrentielles avec orages.
— Je ne te dis pas les inondations et les débordements qui transforment des quartiers en lacs et des rues en canaux, comme à Venise !
— Mais c’est pas le gouvernement qui fait tomber les pluies torrentielles, tout de même !
— Mais c’est lui qui donne des permis pour qu’on construise et qu’on bétonne sur les drains naturels qui se transforment en rivières quand il y a des pluies.
— Ok, pour faire avancer la discussion, je vais tomber d’accord avec toi : Maurice a un soy. Comment on fait pour nous tirer ce soy-là ?
— Il faut demander à un mari traiteur de faire un travail pour tirer ce mauvais soy-là.
— Et où on peut trouver un mari traiteur pour faire ce travail-là ?
— On dit que les tops des tops sont à Madagascar. Il faut faire venir le meilleur traiteur malgache le plus rapidement possible pour faire le travail. Pourquoi tu fais cette tête-là ?
— Je crois que tu as raison. Il y a un mari soy sur Maurice.
— Attends un peu. Qu’est-ce qui t’a fait changer d’avis un coup comme ça ?
— On ne peut pas faire venir un traiteur de Madagascar : il n’y a pas encore de vols commerciaux entre Plaisance et Tana. Tu as raison, on a un mari soy sur nous !