Comment débarrasser le sport de “bann pourri ek bann trianger” comme le plait à le dire Paul Bérenger, Premier ministre adjoint ? Comment changer les mentalités en tenant compte que l’administration du sport se résume malheureusement à une question d’intérêts personnels ? Quitte à ce que l’organisation du sport, dans plusieurs fédérations, soit une faillite totale au point où performance est aujourd’hui synonyme de figuration ! Avouons que la donne n’est pas si simple à résoudre, même si le gouvernement, par le biais du ministère des Sports, a affiché sa ferme intention de remettre le sport dans le bons sens.
Déjà, le ministre des Sports, Deven Nagalingum, s’est attaqué à un point stratégique qu’est la Sports Act 2016 par le biais de premiers amendements. Il l’a annoncé mercredi et une première draft devrait être disponible cette semaine pour ce qui est considéré comme un tournant décisif en marge de la reconstruction du sport mauricien. Ce faisant, le ministre veut contribuer à un assainissement dans le fonctionnement et la gestion des fédérations en s’appuyant sur deux maître-mots: la transparence et la bonne gouvernance.
Deven Nagalingum parle aussi d’un plan d’urgence pour un sport propre et dans lequel seule la performance administrative et sportive comptera. À bas le “money politics” dictant le comportement indigeste et indigne de certains dirigeants véreux. Les fédérations seront aussi désormais appelées à justifier l’argent du contribuable qui est mis à leur disposition. Dans ce même ordre d’idées, le ministre évoque un contrôle rigoureux des clubs et fédérations dits fictifs qui, étrangement, trouvent racine à l’approche des élections du Comité olympique mauricien ! Même si, cette fois, on n’en dénombre qu’une, à savoir celle du surf.
Le gouvernement a donc décidé de déclarer la guerre à ces « fantômes » qui font obstacle au progrès et dont le but ultime est d’empêcher le changement au sein des fédérations, mais surtout à la tête du COM. La posture déclarée de son premier vice-Président, Richard Papie, en dit long sur l’état d’esprit prévalant à Trianon en marge de l’assemblée générale élective prévue samedi prochain. « Sans être prétentieux, nous serons élus », affirme-t-il sur un ton persuasif !
Reste maintenant à savoir si ces élections seront maintenues. En effet, la Mauritius Tennis Federation (MTF) recherchera cette semaine, par le biais de son président, Jean-Michel Giraud, un Ex Parte Interim Order contre la tenue de l’assemblée générale élective. Le Tribunal arbitral du Sports (TAS) sera ainsi sollicité compte tenu du fait que le COM est allé à l’encontre de ses propres règlements en ne pas respectant la durée d’une mois obligatoire entre la tenue de son assemblée générale annuelle du 30 décembre et ses élections de samedi prochain.
Le TAS devra aussi statuer sur l’existence des fédérations de tir, de pentathlon moderne, de roller et skateboard. Leur participation et vote à l’assemblée du 30 décembre dernier est aussi remise en question. Là où un amendement a été approuvé et qui permet désormais à une nouvelle fédération de participer aux élections, mais aussi d’avoir la possibilité d’aligner un candidat, même si elle n’a aucune assise sportive !
Forcément, la décision du TAS sera très attendue, notamment de savoir si ces fédérations seront autorisées à participer aux élections de samedi prochain. Idem pour l’Association mauricienne de boxe dont la fédération internationale n’est plus reconnue par le Comité international olympique, mais qui était tout de même invitée le 30 décembre !
En attendant, des questions d’importance capitale demeurent sans réponse, notamment celles liées à l’existence de la fédération mauricienne de tir. Cette même fédération dont nous questionnions, dimanche dernier dans ces mêmes colonnes, sa légalité par le biais d’une reconnaissance auprès du Registrar of Associations. Cela, en prenant en considération les procédures très strictes qu’impose le gouvernement concernant le port d’arme à Maurice.
Aussi, nous avons pris la peine d’aller vérifier, à plusieurs reprises, sur le site de l’International Shooting Sport Federation (ISSF), mais n’avons trouvé aucune trace de la fédération mauricienne ! À moins, bien évidemment, que le site officiel de cette fédération internationale (https://issf-sports.org) n’est pas le même que celui qui reconnaît la fédération mauricienne !
C’est dire à quel point le COM doit des explications à la communauté sportive. Au cas contraire, des doutes subsisteront autour de sa décision de reconnaître cette fédération et de l’avoir aussi permis d’assister à son assemblée générale annuelle du 30 décembre dernier et, qui plus est, participer à un vote pour un amendement crucial à ses statuts !
« Lorsqu’une fédération internationale reconnaît une fédération, nous devons en faire de même. Nous ne pouvons outrepasser l’instance internationale et ne pas reconnaître la fédération locale », déclarait récemment le président du COM, Philippe Hao Thyn Voon, dans le cadre d’une interview à un hebdomadaire. À lui maintenant d’assumer ses responsabilités et de venir prouver, noir sur blanc, que la fédération mauricienne de tir existe bel et bien.
Le changement sera-t-il prochainement effectif dans le décor sportif comme c’est le cas à diverses échelles économiques ? La communauté sportive l’espère ardemment. On devrait d’ailleurs avoir une indication cette semaine avec cet Ex Parte Interim Order qui sera logé devant le Tribunal arbitral du sport. La draft actuellement en préparation au ministère des Sports sur des amendements à la Sports Act 2016 sera aussi très attendue. On dira tout simplement que le sport mauricien a trop souffert sous la dictature de certains messieurs et qu’il est désormais grand temps d’y mettre un frein. Quitte à repartir sur de nouvelles bases !
Jean-Michel Chelvan