La séquence d’octobre

Il reste, bien sûr, tout à faire et à refaire, mais il serait malhonnête et, surtout, injuste de ne pas reconnaître que de réels efforts sont actuellement faits sur plusieurs fronts pour donner du sens au changement. L’Éducation va démarrer sous de bons auspices et dans un climat de sérénité qui n’a pas été vu depuis des années.
Tout n’est, bien entendu, pas parfait, mais réussir une rentrée après seulement deux mois au ministère de l’Éducation est une gageure que Mahend Gungapersad a su relever. Le test réel étant pour demain, on en saura un peu plus pour pouvoir jauger avec plus de justesse de la qualité de cette rentrée. Pédagogue lui-même, ancien recteur, le nouveau ministre de l’Éducation était attendu au tournant après des années de crispation sur tous les fronts et de tension permanente.
C’est un secteur essentiel qui n’a, malheureusement, pas cessé de se dégrader ces dernières années à force d’avoir privilégié la petite politique, le favoritisme, la protection des proches plutôt qu’une vue d’ensemble qui aurait favorisé un système qui satisfasse apprenants, enseignants et parents.
C’est un bon début, mais il s’agit maintenant d’aller beaucoup plus loin dans la voie de la réforme pour que l’éducation retrouve sa vocation première qui est de produire des citoyens capables d’affronter la vie. Il faut revenir aux fondamentaux, redonner le goût de la lecture de l’imprimé, plutôt que de se passionner pour les palabres de la toile et ses contre-vérités balancées.
Commencer par lire en classe, discuter de ce que dit ou suggère le livre lu et encourager la critique dès le plus jeune âge. Cela devrait aider ces nombreux jeunes qui, à force d’être confrontés aux véhicules de l’abrutissement des réseaux sociaux et de ses codes, ne savent plus s’exprimer avec clarté et précision.
Ça démarre bien pour l’éducation comme ça envoie aussi de très bons signaux au niveau des nominations. Alors que les dépités et les frustrés de l’ancien monde osent se plaindre de “politique de petits copains”, comment ne pas saluer les efforts faits pour nommer des personnes maîtrisant leur domaine de compétence et, surtout, pour promouvoir des femmes à des postes de responsabilité.
Les nominations dans trois des comités du plus important régulateur du pays, la Banque de Maurice, sont remarquables et rafraîchissantes. Une majorité de femmes à la Mauritius Investment Corporation et la parité aux conseils d’administration de la banque elle-même et du comité de politique monétaire.
Ceux qui ont été choisis respectent les critères de la compétence, de l’égalité de genre, de la diversité et de l’inclusion, comme l’a si bien souligné le gouverneur lui-même, Rama Sithanen. N’en déplaise aux esprits chagrins prompts à chercher la petite bête là où elle n’est pas, ça change définitivement des nominations du genre de cette activiste MSM de la circonscription de l’ex-PM Pravind Jugnauth qui s’était retrouvée sur la commission de pourvoi en grâce, celle qui avait décidé de gracier le condamné à 12 mois de prison Chandra Prakashsing Dip, alors que son père était le commissaire de police. Les révélations des Moustass Leaks ont, d’ailleurs, confirmé l’étendue des ingérences qui ont précédé cette grâce rapide, imméritée et scandaleuse.
D’un scandale à l’autre, il n’y a qu’un paragraphe parce qu’il faut aussi parler de celui qui défraie la chronique en ce moment, la Pulse Analytics Saga. Remise en perspective, la séquence sévère fort intéressante quant à l’implication active des protagonistes, y compris leurs relais, dans les médias.
C’est en juillet 2024 que cette compagnie inconnue du bataillon fait une incursion dans le paysage politique en révélant le résultat d’un sondage qui donne à l’Alliance du Changement une courte victoire de 33/27 contre le MSM et ses alliés. Ce n’était qu’un leurre pour d’éventuels tours de passe des plus abracadabrants. Et c’est en ce même mois de juillet que la première demande formulée par le sondeur d’occasion auprès de la MIC est rejetée, la compagnie ne satisfaisant pas les critères établis.
Les élections approchant, le stratagème va se mettre en place pour conditionner l’opinion et la manipuler en faveur du MSM. Le mois d’octobre est particulièrement intéressant lorsqu’on regarde de plus près cette manœuvre bien orchestrée et qui, aujourd’hui, ne laisse aucun doute quant au complot ourdi avec l’argent de l’État pour tromper la population.
Derrière Pulse Analytics de la fratrie Stéphane Adam et de sa sœur Queenie, il y a Menlo Park. Et derrière Menlo Park, en cet octobre 2024 fatidique, qui est le mois précédant les élections générales, il y a des actionnaires ayant pour noms le tandem précité ainsi que Dilshaad Bundhun et une certaine Aditi Boolell, la fille de l’ancien Directeur des Poursuites Publiques.
Aditi Boolell fera, elle aussi, en ce même mois d’octobre, une bien curieuse et inattendue incursion dans la campagne électorale en faisant son “coming out” en faveur du… MSM. Le 19 octobre, Pravind Jugnauth, intervenant lors d’une réunion de jeunes dans sa circonscription, exprimait toute sa “gratitude” à cette prise politique de poids en affirmant qu’elle avait choisi “l’avenir du pays”.
Elle est d’ailleurs promue par ceux-là même qui ont relayé les sondages bidon, trompeurs et frauduleux de Pulse Analytics. Celui du 17 octobre donne, cette fois, l’Alliance Lepep gagnante à 33/27 contre l’Alliance du Changement, et celui du 28 octobre améliore même la performance de Lepep.
C’est juste après cet épisode que Pulse/Menlo Park finira par obtenir son million de dollars (Rs 47 millions) de la MIC, argent public, bien qu’elle ne remplissait toujours pas les conditions exigées avec Rs 10 millions déjà englouties dans des extravagances à Dubai, le lieu de prédilection des actifs cachés des fraudeurs patentés de l’ancien régime.
Ceux qui connaissent un peu les actionnaires de Menlo Park s’étonnent d’ailleurs que, vu leur proximité ancienne avec une institution financière, ils ne se soient pas tournés vers une source de financement plus conventionnelle. La fraude de Rs 47 millions et la séquence d’octobre expliquent tout. Une vaste combine politico-financière, aux dépens des Mauriciens.

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JOSIE LEBRASSE

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