« Eski atlet bizin pa manz dizef kan li Rs 14 ? » C’est le pavé dans la mare lancé par Judex Jeannot, entraîneur national de kick-boxing, lors de la semaine écoulée. Une grosse colère qui trouve sa source dans une injustice inqualifiable à l’échelle humaine. Celle du ministère des Sports qui décide de revoir à la baisse la bourse de haut niveau de ses boxeurs, contrairement aux largesses actuelles du gouvernement avec une énième révision salariale, loin d’être anodine à l’approche des élections.
Ce n’est pas la première fois que les tireurs sont injustement « sanctionnés » par le ministère des Sports et certainement pas la dernière. Sauf que, cette fois, c’est un coup pris sous la ceinture, donc non permis, et qui plus est, à l’heure où le Mauricien a perdu son pouvoir d’achat face à la cherté de la vie.
Tout simplement honteux et qui pousse Judex Jeannot à faire, avec raison, la réflexion suivante: « Est-ce à comprendre que les athlètes ne subissent pas les effets de la baisse de la roupie, du pouvoir d’achat et ne sont pas concernés par l’inflation? Le sportif n’a-t-il pas besoin de s’alimenter comme tout le monde ? »
La décision du ministère des Sports est très loin de faire l’unanimité. Elle est même hautement condamnable et donne, dans une large mesure, raison à Week-End que ce gouvernement n’a rien compris du haut niveau ou à l’excellence, si ce n’est de vanter, à la moindre opportunité, le complexe sportif de Côte d’Or. Idem pour le ministre Stephan Toussaint et d’un président du Comité olympique mauricien (COM), Philippe Hao Thyn Voon, nettement décalé de la réalité.
Faut-il, dans ces conditions, s’étonner si Maurice a, une fois encore, fait de la figuration aux Jeux olympiques ? Non sans oublier que, sur 13 représentants, cinq ont abandonné ! Nécessite-t-il de perdre notre temps pour une énième remise en question qui ne nous mènera visiblement nulle part ? Cela en sachant que le sport local navigue sans capitaine et sans gouvernail depuis de nombreuses années.
Nous savons tous que pour être performant et en mesure d’aspirer aux résultats, on demande souvent aux athlètes d’être disciplinés, réguliers et de faire des sacrifices. Est-ce cependant le cas de ceux censés compléter le travail à l’autre bout de la chaîne ? Nous n’en sommes pas sûrs. Au cas contraire, le sport mauricien se trouverait, à l’heure actuelle, à un tout autre niveau à l’échelle des valeurs.
La situation est même très inquiétante après ce que nous avons vu aux Jeux olympiques et prouve à quel point le plan établi — s’il y en avait bien un — a lamentablement échoué. Alors que pourtant on parle régulièrement de haut niveau ou encore d’excellence, des termes malheureusement banalisés en tenant compte de ce que cela implique réellement dans la pratique.
Est-ce en révisant à la baisse des bourses destinées aux athlètes dites de haut niveau que le ministère des Sports espère favoriser la performance et les résultats ? Cela, à un moment où le gouvernement a décidé de lâcher généreusement les cordons de la bourse aux salariés pour un soulagement cosmétique face au coût de la vie.
N’est-ce pas cela qu’on appelle la politique de deux poids, deux mesures ? N’est-ce pas aussi une forme d’humiliation, voire de discrimination à une section de la population ? Celle qu’on ne veut pas considérer lorsqu’il est question de révision salariale en jouant sur les mots pour parler d’allocation. D’où cette autre réflexion de Judex Jeannot qui précise: « La compensation doit concerner toute forme de revenus. » Certes, le ministère des Sports a essayé de se justifier, mais était-il le moment propice pour venir pénaliser des athlètes ? Quel signal veut-on lancer aux jeunes par le biais de cette décision bancale ?
Preuve qu’à Maurice, on est loin d’avoir compris le sens du sacrifice, sauf s’il y a un capital politique à tirer. Aller d’ailleurs comprendre pourquoi les ministres Joe Lesjongard et Fazila Jeewa-Daureeawoo, aussi bien que élues, Joanne Tour et Subhasnee Luchmun-Roy, s’étaient déplacés pour accueillir la para-athlète Noemi Alphonse après son sacre aux Championnats du monde. Pour l’amour du sport, pensez-vous ? Certainement pas !
C’est aussi dans de pareils moments que les athlètes, indistinctement de leurs disciplines, olympiques ou non-olympiques, deviennent subitement des « ambassadeurs du pays. » Alors que lorsqu’il s’agit de les valoriser, et bien, on peine à voir sur les doigts d’une main ceux qui sont vraiment sincères.
La différence avec les grandes nations, c’est que le développement du sport repose sur de bonnes bases et sur des professionnels toujours à l’affût de la moindre évolution technologique. À Maurice, hormis le fait d’être des ignorants de l’excellence, on décide de s’en prendre au gagne-pain de certains athlètes, contrairement à ces dirigeants qui ont, eux, pris le sport en otage.