On a pendant longtemps dit — et écrit — que les meilleurs agents de Pravind Jugnauth étaient l’opposition parlementaire avec ses querelles, son incapacité de parler d’une seule et même voix et les crises d’ego de ses dirigeants. Sans compter les déclarations péremptoires et belliqueuses de certains de ses membres. On dirait que depuis l’officialisation de l’alliance PTr-MMM-PMSD, la donne est en train de changer. C’est vrai que le MSM a su profiter — et même entretenir — les divisions au sein de l’opposition parlementaire qui furent nombreuses et à répétition. À tel point qu’on avait fini par croire que l’alliance que beaucoup souhaitaient — pour mettre fin à la situation de quasi dictature orange que le MSM commençait à installer — était impossible à réaliser. Chez les observateurs politiques, la phrase suivante revenait souvent dans leurs commentaires : « Avec ces oppositions incapables de s’entendre, un boulevard est ouvert à Pravind Jugnuath pour les élections de 2024. » En organisant un système de transfugisme, le MSM a cherché à maintenir cette situation. Mais le problème, c’est que malgré ses efforts, il n’a réussi qu’à débaucher que quelques seconds couteaux à la place des députés qu’il avait tenté de faire virer de bord. Il visait de gros lapias, il n’a récolté dans ses filets que des têtards.
Comme les commentateurs, le MSM avait fini par se persuader qu’il aurait face à lui pour les prochaines élections des partis de l’opposition se battant entre elles à son profit. Comme ce fut le cas aux élections de 2019, où le total des votes des partis de l’opposition divisée dépassa les 50%, ce qui permit au MSM et ses alliés de remporter la victoire avec moins de 40%. C’est sur une répétition de ce scénario que le MSM a bâti sa stratégie en faisant tout, mais alors vraiment tout, pour faire capoter l’alliance en gestation. Mais en parvenant finalement à mettre de l’eau dans leur vin, en rognant sur leurs prétentions et leurs ego et après de longues, de très longues négociations, le PTr, le MMM et le PMSD ont fini par tomber d’accord sur un programme — encore en cours de finalisation — une répartition de tickets et une distribution des responsabilités — discutée mais pas encore rendue publique. Bien que qualifié de fiasco par Pravind Jugnauth et ses chatwas attitrés — leur premier congrès à trois semble avoir déclenché un vent de panique chez les orange. En dehors des phrases lapidaires sur le rassemblement de Mare D’Albert, le MSM a tout fait — encore une fois vraiment tout — pour empêcher celui de Vacoas. Les autorisations d’abord données ont été par la suite refusées ; quand la municipalité disait oui la police répondait non ; quand le métro avait accepté, la police — encore elle — lui renvoyait la balle. La preuve de l’ampleur de l’inquiétude — ou de la panique du gouvernement — est venue d’une déclaration de la police. Elle a refusé l’utilisation de la place des taxis parce que le congrès allait causer une perturbation dans la circulation routière. Si la municipalité a fini par louer sa salle, elle a imposé toutes sortes de conditions pour tenter de bloquer les organisateurs… Comme par miracle, il y a eu une panne d’électricité pendant le congrès. Mais grâce à la collaboration des voisins, la manifestation a bien eu lieu et a connu un grand succès, comme en témoignent les photos et les comptes-rendus publiés dans la presse.
C’est Gaëtan Duval, qui a connu et vécu toutes sortes de situations et de postures au cours de sa longue carrière, qui le disait : dan politik, boul-la vire. C’est ce qui est en train de se passer à Maurice ces jours-ci, et c’est tant mieux. Le Mauricien n’en pouvait plus de vivre dans ce système où est tout est contrôlé par une famille, un clan et un parti qui ont mis le grappin sur pratiquement toutes les institutions du pays. La conclusion de l’alliance des partis de l’opposition va obliger le MSM et son leader à freiner leurs velléités dictatoriales. Avec ses tentatives de censure à tous les niveaux, le MSM est en train de devenir le meilleur agent de communication de l’alliance PTr-MMM-PMSD.
La donne est en train de changer.