La diplomatie des manchots

C’est cela la beauté de la liberté d’expression. N’importe qui peut sortir n’importe quelle thèse et la présenter comme le fruit d’une longue et profonde réflexion. Puisque ce week-end est celui de l’enregistrement des candidats pour les tant attendues municipales qui ont été fixées au 4 mai prochain, après dix ans d’un mandat interminable pour raisons de renvois successifs et, surtout, par crainte de la sanction des électeurs, comment ne pas se tordre de rire à la lecture du communiqué de la Plateforme Militante (PM) pour justifier sa fuite en avant et son absence de la prochaine joute électorale régionale.
La bande à Steve Obeegadoo avait, pourtant, fait enregistrer sa formation il y a quelques jours avec la ferme intention de briguer les suffrages surtout à Curepipe. Pour justifier cette dérobade, la PM explique qu’en l’état actuel du régime des administrations régionales, elle ne trouvait pas appropriée de participer, elle qui revendique être pour une réforme des collectivités locales et en faveur de la décentralisation des pouvoirs de gestion.
Ah bon ? Voilà un parti dont le chef était Premier ministre adjoint pendant quatre ans et ministre depuis cinq ans, qui n’a pas eu le temps de réformer les administrations régionales, et qui vient reprocher au gouvernement en place depuis cinq mois qu’il a omis de procéder à une révolution urbaine. Et si on ajoute les cinq précédentes années où les amis du Sun Trust de la PM étaient aux affaires, ça fait 10 ans apparemment que ses grands réformateurs soucieux de l’approfondissement de la démocratie y travaillent sans avoir soumis le plus petit début d’amendement au Local Gouvernment Act.
Ce régime, sèchement chassé aux dernières élections régionales, avait visiblement d’autres priorités comme accorder en 4ème vitesse un bail de 60 ans à Madame Primerose Obeegadoo pour un projet de maison de retraite sur un terrain appartenant à l’État dans la région du boulevard de Marie Reine de la Paix.
La municipalité de Port-Louis, en attendant la réforme radicale évoquée par l’ancien ministre du Logement et du Tourisme, devait probablement autoriser en mode express le permis à construire. Il y a des moments où, vraiment, la meilleure et la plus sage des options est, sans aucun doute, de se taire.
Cela dit, on peut croiser encore plus tordu, comme la déclaration de ce Monsieur Tengur, l’expert linguistique et, depuis peu, environnemental également, qui a imputé à l’échec de la diplomatie mauricienne la décision de Donald Trump d’imposer des taxes de 40% à l’île Maurice.
Cette communication de l’ancien enseignant intervient deux ou trois jours après que le Président des États Unis a donné son feu vert à un accord entre la Grande Bretagne et l’île Maurice sur l’archipel des Chagos.
C’est dans ce contexte, déjà une incongruité que de flétrir la politique internationale du pays, mais on ne sait pas si Monsieur Tengur dispensait aussi des cours en géographie, mais il aurait su que les îles Heard et McDonald ont, dans la foulée du délire fiscal trumpiste, été frappées d’une taxe de 10%.
Or, cette île n’est habitée que par une communauté de… manchots divers, royal, à jugulaire, papou et d’autres espèces rares connues comme gorfou sauteur et gorfou macaroni. On ne sait pas s’il existe une diplomatie des manchots, mais on voit mal ce qui est connu comme un patrimoine mondial et naturel de l’Unesco, dépourvu de toute présence humaine, commercer de manière défavorable avec les États Unis !
Si le propos du syndicaliste était d’amuser la galerie, c’est réussi, sinon il y aurait des questions à se poser sur son agenda et ses motivations réelles, lui qui s’est aussi embarqué dans une croisade contre Mahend Gungapersad, prenant ainsi à contre-pied les acteurs du secteur qui jusqu’ici ont salué les initiatives du ministre et sa décision de tenir, la semaine prochaine, les assises de l’Éducation.
Dans la série des propos irréfléchis et mal inspirés de ces derniers jours, il y a aussi ceux imputés aux employés de la National Empowerment Foundation (NEF) après que le Junior Minister à la Sécurité Sociale, Kugan Parapen ait fait une sortie en règle et, complètement justifiée d’ailleurs, contre le fonctionnement de cet organisme censé venir efficacement en aide aux plus démunis de la société. Il s’exprimait après les commentaires peu flatteurs faits par le directeur de l’audit sur la NEF dans son dernier rapport.
Le Junior Minister a eu le malheur de balancer une vérité connue de tous “c’est devenu un fourre-tout, que ce soit au niveau des prestations ou du recrutement”, a-t-il cinglé, avant d’asséner que “nou ena bann rapor ki ena bann minis, bann ‘Chairman’ ou mem bann CEO NEF presedaman kinn servi sa institision-la pou plas, anfin, pena lot mot pou dir li bann koler lafis.”
C’est la stricte vérité et c’est ce qu’un groupe d’employés a déjà dénoncé auprès des autorités et même de la Financial Crimes Commission. Qui ne sait que l’ancien président à temps partiel de la NEF, Raffick Sorefan, avait été accusé de “favoritisme” et d’ingérence dans la gestion quotidienne de cet organisme, alors placé sous la tutelle de Fazila Jeewa-Daureeawoo ?
Qui ne sait que le recrutement était fait selon les critères que l’on a pu entendre sur les enregistrements audio des Moustass Leaks ? Kugan Parapen a été poli en parlant de “koler lafis” parce que c’était, en fait, le règne par excellence des “chatwas” à la NEF.
S’il fallait un seul exemple pour illustrer le copinage qui a sévi et qui perdure, sur lequel le ministre Ashok Subron et son Junior Minister devraient urgemment se pencher, c’est celui de l’épouse de l’intime de Pravind Jugnauth, un dénommé Vikram Jootun, l’ancien directeur de la Mauritius Film Development Corporation, celui qui concoctait des vidéos sur les opposants du MSM.
Cette dame, Usha Jootun, également nommée sur le conseil d’administration de Landscope, utilisait ouvertement la NEF pour faire la promotion du Premier ministre. Elle s’arrangeait pour avoir le maximum d’activités dans la circonscription de Quartier Militaire/Moka.
Et à l’ère du changement , des employés de la NEF osent pousser des cris d’orfraie lorsque certaines évidences leur sont lancées à la figure ? Faut rapidement redescendre et accepter la réalité des faits, voyons !

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JOSIE LEBRASSE

 

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