— Pourquoi tu dis que je suis comme un programme d’austérité du FMI ou de la Banque Mondiale !
— Mais c’est comme ça même qu’ils ont fait avec Maurice dans les années ’80, toi. Mon papa parle encore de ça !
— La BM et le FMI avaient raison, toi. Ils ont fait ça parce que le gouvernement d’avant avait, comme celui de maintenant, dévidé les caisses de l’État, toi.
— C’est pas pareil, quand même. Dans les années ’80, le gouvernement avait dévalué la roupie deux fois.
— C’est exactement ce que le gouvernement d’aujourd’hui est en train de faire. La seule différence c’est qu’il ne le dit pas : il le fait enba enba.
— Ayo arrête de répéter tous que les partis de l’opposition disent tous les samedis dans leur conférence de presse.
— Et toi, arrête de faire comme un chatwa du gouvernement qui répète tout ce que les ministres disent dans leurs points de presse !
— Tu vois comme tu es : tu ramènes tout à la politique. Allons plutôt changer de sujet de conversation.
— Il vaut mieux parce que je vais te faire perdre des points.
— Ayo, tu me fatigues, je te dis ! Alors, ton bonhomme et tes enfants sont contents avec ton programme d’austérité ?
— Content pas content, c’est la seule manière pour essayer de garder la tête en dehors de l’eau.
— Ayo, tu sais qu’on ne peut plus arroser son jardin ou nettoyer sa terrasse. L’eau est rationnée maintenant.
— Apres la mort la tisane.
— Pourquoi tu dis ça ?
— C’est pas quand les réservoirs sont presqu’à sec qu’il fallait rationner l’eau, mais bien avant, quand on pouvait encore faire des économies d’eau. Tu as vu le nombre de personnes qui ont nettoyé leurs maisons et leurs murs avec des jets d’eau !
— Mais il faut bien faire le grand nettoyage de fin d’année, toi.
— Pas quand dans certaines régions du pays, les gens doivent faire la queue devant les camions-citernes de la CWA !
— Mais avant, on croyait que la pluie d’été allait tomber, comme d’habitude.
— C’est ça le problème à Maurice : on croit que tout va continuer éternellement comme avant.
— Ayo, qu’est ce que je vais te diren !? On nous a élevé comme ça. Je suis d’accord que les temps sont durs et qu’il faut faire attention, mais pas comme tu fais, toi. Surtout en cette période de fêtes.
— Mais c’est justement en période de fêtes qu’on fait le plus de dépenses inutiles. Avec tous ces soldes ou promotions, on te fait acheter n’importe quoi pour plus cher que d’habitude.
— Mais qu’est-ce que tu fais de la magie de Noël et du plaisir d’offrir ?
— Répètes même les slogans des commerçants, toi ! La magie de Noel c’est surtout celle des commerçants ! Quand au plaisir d’offrir…
–…ne me dis pas que tu n’as pas donné de cadeaux à ta famille pour Noël ?!
— Cette année, on s’est donné des cadeaux utiles.
— Qu’est-ce que tu veux dire par là ?
— On donné une bouilloire à ma fille, on a offert une douche électrique qui rationne automatiquement l’eau comme cadeau à mon garçon…
— …ah bon, tu as fait ça ?! Et qu’est-ce que tu as donné à ton bonhomme : un toaster ou un micro-ondes?
— Ne fais pas ton foutan avec moi, je te dis là, hein ! On s’est offert un four économique pour remplacer le vieux qui était devenu trop vieux et consommait beaucoup d’électricité.
— Ton bonhomme et tes enfants ont accepté tout ça ?!
— Au début, ça a été un véritable pugilat, te te dis. Ils ont hurlé, protesté, puis grogné. Comme j’ai pas cédé d’un pouce, ils ont fini par comprendre que si on ne faisait pas ça, on n’allait pas s’en sortir. Surtout que, tout le monde le dit : 2023 va être pire que 2022 au plan économique.
— Je n’arrive pas à croire que tu as fait tout ça !
— Comme disait un ancien ministre MSM, il faut savoir « adapt or perish ». Sinon, on est cuit, toi.
— Mais qu’est-ce que tu feras pour le déjeuner de famille du 1er janvier chez toi. Tu as cancelled ?
— On va faire.
— Tu as cassé ton programme d’austérité, juste pour ce jour-là ?
— Tu vas croire toi-même. Je vais faire le déjeuner mais j’ai mis de nouvelles règles.
— Quelles nouvelles règles ?
— J’ai envoyé un message à toute la famille pour faire savoir qu’on allait faire un déjeuner BYO.
— Qui c’est ce BYO, un nouveau « caterer » qui fait bien ?
— BOY veut dire Bring Your Own. Chacun amène son manger, ses drinks et ses gadjacks pour le déjeuner.
— C’est comme ça même qu’on fait dans les bals mauriciens en Australie : chacun apporte son panier-repas.
— Exactement.
— Tu sais combien de critiques tu vas avoir avec ton déjeuner BYO ?
— Ça ne va pas changer grand chose. Ils me critiquaient quand je faisais tout le déjeuner moi-même, en payant tout de ma poche.
— Ils vont dire que tu es devenue la dernière des avares.
— Ils diront ce qu’ils voudront. En tout cas, moi, je vais finir mon mois de janvier sans problème.
— Je ne comprends pas ce que tu veux dire.
— Je te dis que je ne vais pas avoir besoin d’aller faire un emprunt vers le 15 pour finir le mois, parce que j’aurais dépensé mon argent dans les cadeaux de Noël et le déjeuner du 1er janvier , comme certains que je connais.
— Qu’est ce que tu veux dire par là ?
— Rien du tout. Bonne année, toi.
Économies (suite et fin)
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