Clinique

— Dis-moi un coup pourquoi ton cousin cherche les numéros des journalistes ?

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— Il veut faire une conférence de presse.

— Ah bon ! Ne me dis pas qu’il va entrer dans un parti politique.

— Non. C’est pour dénoncer les cliniques qui au lieu de soigner les malades les exploitent.

— Qu’est-ce qui s’est passé comme ça.

— Il y a dix jours, son fils a fait un malaise et on l’a emmené en clinique où il a été admis en urgence.

— C’était grave ?

— Non, puisqu’on l’a « discharged » le lendemain même.

— Mais alors, quel est le problème ?

— Ecoute bien : quand mon cousin arrive à la clinique on lui dit que pour admettre son garçon il faut qu’il laisse un dépôt des Rs 50, 000.

— Il n’avait qu’à faire un chèque.

— Non. Il fallait que ce soit du cash ou bien un paiement par carte ou virement bancaire.

— La clinique n’admet pas un malade en urgence si on n’a pas déposé une somme d’argent d’avance ?

— Ça même, toi. Alors mon cousin s’est débrouillé pour faire faire le paiement d’avance par carte. Ce n’est que quand il a eu le reçu du transfert qu’il a pu faire admettre son enfant.

— Tu crois que si ton cousin n’avait pas pu faire le paiement d’avance la clinique n’aurait pas admis son garçon malade ?

— On dirait toi. On lui a dit a la comptabilité que s’il restait de l’argent sur l’avance on allait lui rendre quand le malade allait sortir. Mon cousin a alors vu le médecin qui avait admis son garçon qui lui a dit qu’il allait le garder en observation en ICU pour la nuit.

— A part cette affaire de dépôt d’argent-là, tout s’est bien passé ?

— Attends un coup. Le lendemain matin une nurse téléphone à mon cousin pour lui dire que les deux docteurs sont passés, ont signé la « discharge » et que le malade peur quitter la clinique après avoir payé le compte…

—… mais d’où il sort le deuxième docteur ?

— C’est la question que mon cousin pose à la nurse, qui lui répond qu’elle ne fait que suivre les instructions.

— Et qu’est-ce que ton cousin a fait alors ?

— Quand on lui a donné la facture à la clinique, il y avait effectivement un deuxième docteur à qui il fallait payer Rs 3700. Pourquoi, a demandé mon cousin ? La dame de la caisse lui a répondu qu’il fallait poser la question au premier docteur…

—… qui n’était pas là… comme par hasard…

— Non, attend un coup. Il y a mieux. La dame de la caisse lui dit que le bill est de Rs 36, 000 et qu’on allait lui rembourser ce qui restait du dépôt dans sept jours.

— Sept jours ? Mais il fallait juste faire un transfert sur la carte bancaire de ton cousin. Ça prend même pas cinq minutes, toi. Nous sommes supposés être dans une cyber island, non !

— C’est ce que mon cousin lui a dit. La dame a répondu qu’elle était désolée, mais qu’elle ne faisait que suivre les procédures.

— Quelles procédures ?

— Celles de la clinique. Mon cousin a alors demandé à voir le responsable de la comptabilité. On lui a passé un quelqu’un au téléphone qui n’a pas voulu dire son nom.

— Pourquoi ?

— Il a dit que c’était la procédure. Il a expliqué que les employés qui font le remboursement ne travaillent pas le week-end et qu’il fallait attendre lundi pour leur signature.

— Ton cousin a accepté ça ?

— Qu’est-ce qu’il pouvait faire ? Le responsable sans nom — qui a sans doute peur de recevoir une claque d’un parent de malade — lui a dit qu’il fallait suivre les procédures de la clinique. Mais mon cousin lui a dit, fort au téléphone, qu’au lieu de soigner les malades la clinique exploitait financièrement la douleur de leurs parents.

— Bien envoyé.

— Des parents de malades qui faisaient la queue à la comptabilité ont dit que mon cousin avait raison, que la clinique exigeait de se faire payer d’avance, mais prenait son temps pour rembourser.

— Qu’est-ce que ton cousin a fait alors ?

— Il a été obligé de prendre son reçu pour aller chercher son garçon. En chemin, il a rencontré le docteur qui avait fait l’admission et lui a demandé d’où sortait le deuxième médecin à qui il fallait payer Rs 3700 !

— Qu’est-ce que le docteur a répondu ?

— D’après toi ? Que c’était le protocole d’admission de la clinique !

— Si je comprends bien dans cette clinique si ce n’est pas le protocole c’est la procédure ! Mais le patient ou son parent paye toujours !

— C’est exactement ce que mon cousin a dit au docteur en levant la voix.

— Qu’est-ce que le docteur a dit ?

— Tu vas pas croire, toi. Il a dit à mon cousin de ne pas causer fort comme ça, et qu’il allait tirer le fee de l’autre docteur sur le bill.

— Quoi ?

— Oui, toi. Mon cousin lui a dit que si on pouvait tirer aussi facilement du bill de l’autre docteur, c’est qu’on n’avait pas eu vraiment besoin de lui ?

— Qu’est-ce que le docteur a répondu ?

— Il a répété : ne causez pas fort comme ça, je vais tout aller tirer le nom du docteur sur votre bill. C’est pour toutes ces raisons que mon cousin veut lancer l’association des malades et de leurs parents exploités par les cliniques.

— Mais pourquoi est-ce que ton cousin a fait admettre son garçon dans une clinique kraz krazé ? S’il était allé dans une grande clinique, il n’aurait jamais eu ce genre de problème.

— Tu crois ? Ce n’est pas dans une clinique kraz krazé que mon cousin a été, mais dans une des supposées meilleures cliniques de l’île !

J.-C A

Jean-Claude Antoine

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