Ce Big Bang tant attendu…

Après le document déjà effrayant sur l’état de l’économie publié en décembre dernier, que certains avaient cru rédiger par quelques plumes partisanes pour noircir le bilan du gouvernement MSM, voilà que le rapport de l’audit pour l’exercice financier 2023-24, publié mardi, vient reprendre son catalogue de gaspillage et de dilapidation des fonds publics tout en confirmant que l’endettement massif a atteint des sommets inégalés.

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Ce rapport est signé Dr Dharamraj Paligadu. Un nom devenu célèbre depuis la divulgation des enregistrements des Moustass Leaks dans lesquels on peut entendre l’ancien Premier ministre, Pravind Jugnauth, furieux, enjoindre Renganaden Padayachy à « amenn sa Paligadu là tout de suite » parce que ce haut cadre des Finances se montrait trop précautionneux par rapport au dossier des courses et qu’il tardait à favoriser le copain et bailleur de fonds Jean Michel Lee Shim.

Si des commentaires ont été divers et variés sur le rapport de l’Audit et qu’ils ont été nombreux à dénoncer cette rengaine annuelle de l’Audit et que les années passent sans qu’un iota ne change dans la manière de disposer des fonds publics et que tout cela sent la corruption, d’autres en ont profité pour sortir un peu n’importe quoi.

Il y a un syndicaliste qui a proposé que le directeur de l’Audit ait des pouvoirs pour « poursuivre » les fautifs, pendant que ceux du Directeur des Poursuites publiques viennent tout juste d’être rétablis dans toute leur exclusivité.

Et comme s’il y avait un concours de perles à sortir entre syndicalistes, il y a aussi cet autre qui, décidément, bien remuant depuis que ses complices ont été bottés hors du pourvoir, qui a trouvé une idée géniale : celle d’une allocation de mauvais temps pour les marchands ambulants. Et quoi encore ?!

Que dénonce encore une fois ce rapport de l’Audit ? Que les fonds publics sont jetés par les fenêtres, que les dettes des organismes publics sont colossales et que les déficits sont considérables dans la plupart des récents mastodontes créés comme Metro Express Limited.

Après ces constats, le moment de la décision viendra très vite. Des réformes structurelles audacieuses en conformité avec la promesse de rupture faite pendant la campagne électorale devront être enclenchées. C’est là que le rendez-vous de juin s’annonce crucial. Juin, c’est le mois du budget.

Après l’adoption du texte introduisant des indicateurs de performance, qui est un bon début dans l’assainissement de la gestion des finances publiques et la mise sur pied d’un comité présidé par le Junior Minister Dhaneshwar Damry pour assurer le suivi de la mise en œuvre du programme gouvernemental présenté le 24 janvier, viendra le temps des transformations.

Comme il sera question d’équilibre budgétaire, la question d’une politique fiscale juste va certainement se poser. Qui n’a pas été scandalisé d’entendre le Premier ministre révéler, à l’Assemblée nationale, il y a deux semaines, que des exonérations fiscales à hauteur de plus de Rs 6 milliards avaient été accordées aux promoteurs de Smart Cities ?

Lorsqu’on sait que ces « cities » sont des enclaves bien fermées et soigneusement gardées et où on doit toujours montrer patte blanche, sans jeu de mots, pour pouvoir y accéder, une révision de la politique foncière et fiscale est devenue urgente. Est-ce que ce genre de largesses doit se poursuivre ? À qui profite vraiment ces cadeaux fiscaux ?

Lorsque les municipalités reconstituées et les conseils de district auront retrouvé leur autonomie décisionnelle, la politique de financement des services devra aussi se poser. Les services ont un coût et il n’est que normal que la population participe d’une manière ou d’une autre.

Pour ne pas appliquer la taxe d’habitation pour tous, le gouvernement MSM avait aboli celle qui frappait uniquement les villes. Or, dans les campagnes, il y a des châteaux et des villas qui bénéficient de divers services publics sans payer le moindre sou à la collectivité. Le temps est venu d’introduire un impôt local forfaitaire pour tous avec quelques exemptions évidemment pour ne pas punir ceux qui vivent dans ces vieux hameaux hérités du cyclone Carol.

Il y a aussi la sécurité routière et le nombre grandissant de voitures et, surtout, l’étalage de cylindrées insolentes par leur taille et leur coût lorsqu’elles ne sont pas clinquantes et de mauvais goût avec leur plaques personnalisées ridicules. Si on ne doit pas émuler Singapour qui a fait de l’accès à la voiture une loterie, parce que, là-bas, le transport en commun est agréable, sûr et généralisé, il y a néanmoins matière à réflexion sur l’encombrement de nos routes et les interminables nouveaux projets routiers.

Des cadres supérieurs étrangers et même des directeurs de compagnie qui, eux, se déplacent au quotidien en petite voiture électrique, en trottinette ou à bicyclette sont impressionnés lorsqu’il visitent notre île par le nombre de voitures de luxe qu’ils croisent sur nos routes.

Allons-nous continuer avec cette politique fiscale qui fait finalement peu de différence entre petites citadines électriques ou hybrides et grosses voitures gourmandes de carburant. La politique devrait être « size matters » pour un petit pays dont la facture à l’importation de ce genre de commodités est phénoménale.

D’autres chantiers doivent également être revisités, comme celui du grand nombre d’espaces loués à grands frais par les services publics et qui ont fait pendant des années le bonheur des Avinash Gopee et autres. Avec son Landscope et les terres héritées du Illovo Deal de 2001, le gouvernement a les moyens de s’embarquer dans un programme d’aménagement de locaux pour ses besoins propres au lieu d’engraisser des promoteurs immobiliers privés.

Il y a aussi ces organismes publics créés pour caser des copains. Pourquoi, à côté des collectivités locales, il y a aussi MauriFacilties et la National Environment Commission? Avec cette duplication de tâches et la dispersion des ressources, le pays s’est en plus davantage encrassé. Voilà pourquoi le prochain exercice financier doit être ce Big Bang tant attendu.

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