On aurait pu parler de la rentrée parlementaire du 18 octobre, des nouveaux coups de canif à la démocratie que cela annonce, des 103 questions auxquelles le Premier ministre n’a pas daigné répondre depuis le 29 mars 2022 ou encore des pitreries de ces femmes du MSM. Surtout de celles qui sont devenues les plus grandes défenseuses du Sun Trust après avoir allègrement retourné leur veste.
Oui, on peut entendre Naveena Ramyead se livrer à des contorsions qui feraient pâlir une danseuse de pole dance pour justifier que son patron, le Premier ministre et leader du MSM, batte le record de 103 questions non-répondues et même imputer ce qui constitue l’irrespect de Pravind Jugnauth vis-à-vis de la représentation nationale aux fonctionnaires.
Elle ne nous a, en revanche, pas expliqué comment les fonctionnaires qui exercent dans d’autres ministères arrivent eux, à déposer les réponses, d’ailleurs déjà préparées, sur la table de l’Assemblée nationale dans les heures qui suivent ou quelques jours après.
La seule conclusion à laquelle on doit arriver, avec les explications foireuses et fantaisistes de la Chief Whip, c’est que les fonctionnaires et autres conseillers grassement payés au Prime Minister’s Office sont d’une incompétence inqualifiable, alors même que ce sont ses hommes de confiance, si ce n’est ses propres parents, que Pravind Jugnauth a gaiement installé à son bureau.
Quant à Dorine Chukowry qui s’est cru autorisée à critiquer la ligne éditoriale de Week-End, cela ne nous étonne guère de la part de cette autre transfuge, en fait, une intermittente du mauvais spectacle. Lorsqu’elle ne pourfend pas avec véhémence le MSM pour son népotisme et sa politique de protection des “mawsi”, pour mieux embrasser et épouser carrément cette même culture ensuite, elle est tout aussi “efficace” dans la distribution de gâteaux “marie” avec son nom bien affiché sur le massepain ou la génoise, déclinés en plus de cinquante nuances du bleu.
Les pitreries dénoncées, passons au plus urgent : le rapport de la magistrate Vidya Mungroo-Jugurnauth est venu jeter un éclairage qui fait frémir sur les circonstances du décès de l’activiste du MSM à Quartier Militaire /Moka, Soopramanien Kistnen.
Les auditions, les approximations et les mensonges caractérisés de certains témoins devant l’enquête judiciaire, l’année dernière, étaient déjà très éloquents et très révélateurs de certaines pratiques glauques dans des officines publiques.
Si ce document revêt, en tout cas, un poids considérable et qu’il représente la preuve flagrante de l’existence d’une mafia au plus haut sommet de l’État, il constitue une nouvelle confirmation de ce que presse et opposition parlementaire et extra-parlementaire dénoncent depuis un moment déjà.
Dans toute cette affaire glauque et effrayante, il y deux personnes qui ne peuvent plus se dérober, dire “mo pa ti au courant” ou encore “attan nou ava gete”, le Premier ministre lui-même, ministre de l’Intérieur, responsable de la police, élu du numéro 8, et son colistier Yogida Sawmynaden.
Qui ne se souvient pas des déclarations catégoriques de Pravind Jugnauth qui, défendant bec et ongles son ministre du Commerce, l’avait exonéré de tout blâme après avoir affirmé être allé à la pêche aux informations.
On ne sait pas s’il avait déjà, alors, un radar spécial à sa disposition mais, devant la révélation des faits l’impliquant, Yogida Sawmynaden avait dû annoncer sa démission dans les locaux mêmes du Prime Minister’s Office, le 10 février 2021.
Avec la promesse de “comeback stronger”. Oui, comme dans les films sur la mafia. On se débarrasse de tous les gêneurs, de tous les documents, de toutes les traces et de toutes les preuves, pour faire comme si rien ne s’était passé. Et vendre la thèse qu’un des activistes du PM et de ses colistiers Yogida Sawmynaden et Leela Devi Dookun-Luchoomun s’était suicidé avec ses tripes à l’air et une partie seulement du corps carbonisé.
Ce qui est troublant mais pas si surprenant que ça lorsqu’on est en régime mafieux, c’est le délitement organisé des institutions au sein desquelles on place “nou dimoun” et l’enchaînement des défaillances de tous les organismes censés protéger le citoyen et faire respecter la loi et la justice.
Ce que décrit la vaillante magistrate, ce n’est pas tant l’amateurisme mais l’existence d’un système très affiné du cover-up organisé pour faire passer un crime politico-mafieux pour un suicide, parce que des puissants et des corrompus sont impliqués.
Sinon, comment expliquer que l’autopsie ait été dépaysée à l’hôpital Jeetoo alors que Telfair, le lieu où le cadavre de Soopramanien Kistnen a été retrouvé, est à quelques encablures de l’hôpital Candos ? Pourquoi ces versions intrigantes de la médecine légale ?
Pourquoi les traces d’ADN relevées sur les lieux du crime – parce qu’il est désormais établi, sans l’ombre d’un doute, qu’il s’agit d’un assassinat – n’ont pas été comparées à celles de tous les protagonistes de l’affaire et, surtout, pourquoi Yogida Sawmynaden a-t-il refusé de fournir un échantillon de son ADN ? Pourquoi cette soustraction à un moyen déterminant de faire avancer une enquête criminelle, si on n’a rien à cacher ?
Quant aux dessous des contrats Covid et les ramifications entre Yogida Sawmynaden, Jonathan Ramasawmy, Vinay Appanah, Deepak Bonomally, le couple Poonith et l’amie du ministre d’alors, Neeta Nuckched, il n’y a pas de mystère quant au système mis en place – alors que le PM présidait le comité national sur le Covid – pour piller les fonds publics avec ses Pack and Blister, ses bijoutiers et quincaillers devenus, du jour au lendemain, experts en fournitures de matériel médical.
Mais ça, l’ICAC n’en sait rien. Et, comme nous l’avons maintes fois dénoncé, ici même, il ne faut pas croire que l’affaire Kistnen n’est qu’un épiphénomène et que cela n’en dit pas plus sur la mafia qui prend le contrôle un peu partout. Allez au Champ de Mars pour voir une autre manifestation de ce qui est devenu, en fait, tout un système de gouvernement. Bienvenue en Mafialand !