S’est éteint, vendredi de la semaine dernière en Australie, où il s’était établi, le Dr Clovis Velin, agronome, ex-employé du gouvernement mauricien et de la Banque Mondiale
Clovis Vellin faisait partie des Mauriciens visionnaires des « glorious sixties » comme l’écrivait un de ses amis. Un de ces Mauriciens qui ont marqué leur époque et laissé des souvenirs encore vivaces dans la mémoire collective, plus de cinquante ans plus tard.
Né à Beau-Bassin dans une famille de dix enfants, Clovis se révéla, comme ses frères et soeurs d’ailleurs, un excellent élève. Après ses études secondaires, il prit de l’emploi comme professeur de géographie au collège du St Esprit, puis au collège Royal de Curepipe. Ses anciens élèves parlent encore de lui comme d’un enseignant ayant marqué leurs années d’études. Par la suite il commença des études d’agronomie à Maurice avant d’aller passer son doctorat à l’étranger. Entre ces deux périodes, il lança à Maurice le mouvement des Youngs Farmers qui réconcilia les jeunes tentés par les métiers en col blanc à l’agriculture. Sous son impulsion des dizaines de fermes de Young Farmers relançant, en utilisant des méthodes modernes l’agriculture et l’élevage, virent le jour dans toutes les régions du pays, plus particulièrement dans les régions rurales. L’industrie sucrière décida de soutenir le mouvement et mit à la disposition des jeunes fermiers en herbe des portions de terre et du matériel pour l’irrigation durant la période de l’entrecoupe. Oxfam décida, de son côté, d’envoyer des volontaires formés pour encadrer les jeunes mauriciens lancés dans cette aventure.
Après l’indépendance Clovis Vellin alla terminer ses études à l’université de Cornell aux États-Unis et revint à Maurice avec son doctorat. Il retrouva son poste d’Education Officer avant d’être nommé par le gouvernement pour diriger la Development Work Corporation. Clovis Vellin fit partie des hauts fonctionnaires et des dirigeants de corps paraétatiques mauriciens d’autrefois qui n’avaient pas leur langue dans leur poche, connaissaient le fonctionnement des institutions sur le bout des doigts et savaient dire non aux ministres. Surtout quand ces derniers avaient tort. Le 31 décembre 1972, l’Express le désignait comme « Mauricien de l’Année 1972 », rendant hommage à sa contribution à la performance de la DWC. Dix jours plus tard, il est limogé de ses fonctions et retourné au ministère de l’Education comme Education Officer.
C’est sans doute le refus d’accéder aux désirs d’un des membres du gouvernement qui valut à Clovis Vellin d’être limogé. Dans son édition du 9 janvier 1973 l’Express écrivait : “L’annonce du limogeage du Dr Vellin a provoqué hier la consternation et en général l’opinion est satisfaite qu’il s’agit d’un règlement de comptes mesquin de la part de certains prestiges écorchés. Le Dr Vellin est en effet connu et admiré pour son manque de souplesse à l’égard des ingérences.” Si le gouvernement de l’époque trouvait que Clovis Vellin n’était pas digne de travailler pour son pays, les dirigeants de la Banque mondiale avaient une tout autre opinion. C’est ainsi qu’ils utilisèrent les multiples compétences du Mauricien et lui offrirent un poste de consultant. Au sein de cette institution, il eut une belle carrière internationale qui lui fit faire le tour du monde. Au moment de prendre sa retraite, il choisit d’aller rejoindre la majeure partie de ses frères et soeurs s’étaient établis en Australie et s’installa dans l’Etat du Queenslands. C’est là qu’il s’est éteint vendredi de la semaine dernière, assis dans son fauteuil préféré et avec, soulignent ses proches, un sourire sur le visage.