Jean-Yves l’Onflé et Eric Laviolette :
L’amour au-delà des préjugés
Jean-Yves l’Onflé et Eric Laviolette se sont rencontrés en 2003. À l’époque, l’artiste-peintre travaillait dans un atelier de poterie à la Craft Academy à Quatre-Bornes. Pendant sa pause-déjeuner, Jean-Yves L’Onflé allait souvent acheter un casse-croûte à la pâtisserie où travaillait Eric Laviolette. Ce dernier raconte :
“La première fois où j’ai vu Jean-Yves, mon cœur battait la chamade. J’ai tout de suite su que je voulais qu’il fasse partie de ma vie”. Entre les deux hommes naît une belle amitié qui se transforma en amour. Avec les tabous persistants dans la société, être un couple homosexuel n’était pas facile. “Les difficultés ne venaient pas de ma famille, mais de mon entourage. Les gens nous regardaient d’une autre façon et nous lançaient des mots déplacés”, raconte l’artiste-peintre. Les débuts furent compliqués, mais avec le soutien des proches, le couple a été en mesure de surmonter les épreuves.
“Au cours des années, les gens ont commencé à voir l’artiste que je suis, engagé dans le social et au service des jeunes et de son village. Et j’ai commencé à avoir le respect des autres”. Eric Laviolette est aujourd’hui fleuriste. Les deux hommes ont cheminé ensemble et sont des professionnels reconnus dans leur secteur. “Malgré le fait qu’il y a encore beaucoup de préjugés, nous continuons à vivre notre vie”. En 2007, les amoureux ont emménagé ensemble à Tamarin et fêteront en décembre leur 19e anniversaire. Le conseil que Jean-Yves donne aux jeunes, “qu’ils soient lesbiennes, gays, hétéro, transgenres, c’est l’amour qui compte. Il ne faut jamais baisser les bras et toujours se faire respecter”.
Sanjay et Gina Brambodary, non-voyants :
S’aimer aveuglement
Sanjay, 55 ans, et Gina, 53 ans, sont mariés depuis 30 ans. Ensemble, ils ont quatre enfants âgés entre 19 et 28 ans et un petit-fils de 7 ans. Tous deux non-voyants, ils se sont rencontrés 35 ans de cela au Centre Lois Lagesse à Beau Bassin. Ce fut un vrai coup de foudre des deux côtés. Sanjay raconte avoir fait le premier pas. Cinq ans après, ils se sont mariés et vivent depuis une magnifique aventure à deux. “Comme tous les couples, nous avons de beaux jours, comme des périodes plus sombres”, relate Sanjay. Beaucoup de personnes dans leur entourage n’étaient pas favorables à cette relation, “étant donné que nous sommes tous deux des non-voyants”. À la naissance de chacun de leurs enfants, ce fut un vrai parcours de combattant au quotidien. “Bien que nous ayons eu l’aide de la famille, nous avons eu à nous débrouiller pour les élever, les éduquer et veiller à ce qu’ils ne manquent de rien”. Sanjay tient à souligner qu’être non-voyant n’empêche pas de vivre comme les autres. “Pour toutes les tâches de la vie quotidienne, on m’a toujours encouragé à me débrouiller seul et à être indépendant”. De rajouter, qu’au cours des années, leur amour a pris une nouvelle dimension et s’est surtout solidifié. “Aujourd’hui, il y a toujours des hauts et des bas, nous avons des désaccords, tout n’est pas parfait, mais c’est cela qui fait la beauté de la vie”.
Gisèle et Claude Ah-Yu :
un coup de foudre qui dure depuis 65 ans
A tous ceux et celles qui leur demandent leur secret pour réussir une vie de couple, Claude, 91 ans, et Gisèle Ah-Yu, 90 ans; révèlent sans hésitation que “l’histoire parfaite n’existe pas. Il faut certes de l’amour mais pas uniquement.” Dans quelques semaines, le 28 février précisément, Claude et Gisèle Ah-Yu fêteront leurs 65 ans de mariage.
Cette longue et belle histoire d’amour s’est bâtie sur de solides bases confient-ils : “Il faut toujours prendre en considération que chaque personne est différente. Que vous êtes mari et femme, conjoints, partenaires ou en couple, il faut accepter l’autre tel qu’il ou elle est, avec ses qualités et ses défauts.” Dans leur couple, l’amour n’a jamais cessé de grandir grâce à la compréhension et la volonté de vivre ensemble toute leur vie et à tout prix.
1954. Claude Ah-Yu, en dernière année d’étude d’infirmier, est en service dans la salle d’urgence de l’hôpital Civil (aujourd’hui l’hôpital Dr. Jeetoo). Gisèle accompagne son neveu qui s’était blessé. “Dès l’instant que j’ai posé les yeux sur Gisèle, j’ai été ébloui par son allure, sa splendide beauté et sa robe à la fois belle et simple.” se souvient Claude Ah-Yu.
Après les soins, l’heure de la séparation arriva. Comment allait-il pouvoir la revoir ? “J’étais tellement pris par mon travail que mes temps libres étaient comptés. Sans compter que j’habitais Rose-Hill et elle Port-Louis.”
Pris de panique à l’idée de ne plus jamais revoir Gisèle, l’ingéniosité de Claude prit le dessus pour demander à Gisèle d’accompagner son neveu pour son pansement le lendemain matin.
Son service prenait fin à 7h du matin mais Claude ne bougea pas de l’hôpital. Il devait absolument trouver une autre astuce pour la rencontrer à nouveau, et cette fois-ci, hors de l’hôpital. Le rendez-vous fut fixé pour le samedi suivant à 13h au Cinéma Majestic.
Claude Ah-Yu y était bien avant l’heure. À la sonnette annonçant le début de la séance, point de Gisèle à l’horizon. “J’ai cru sincèrement qu’elle ne s’intéressait pas à moi et je me suis dit qu’il fallait penser à l’oublier. Mais après deux ou trois minutes, à mon grand étonnement, j’ai remarqué une silhouette svelte dans la sombre allée, tenant la main d’une petite fille. Cette silhouette, je la connaissais que trop bien déjà, elle était restée gravée dans mon esprit.”
Depuis ce jour, ils ne sont jamais quittés. Après les rendez-vous, une fois toutes les semaines, Gisèle lui demanda de faire sa demande formelle à ses parents. Après l’envoi de la fameuse lettre de demande, entre autres enquête et rencontre familiale, le jeune couple a prononcé leur « oui » dix mois après leur rencontre.