Ce cher Papa Noël ne s’est pas fait prier pour se fondre dans la masse. Vous l’avez sans doute rencontré sans même le reconnaître, ou du moins vous avez reconnu sa grosse bedaine dans les rues de la capitale à crier son désaccord contre les amendements au IBA Act, ou alors sur la côte du sud entachée de pétrole ou même sur la plage de Pointe aux Sables lançant de ‘gro gro zoure’ dans un kreol qu’il maîtrise à peine contre un certain propriétaire de catamaran qui a cru logique de détruire un morceau de plage rien que pour faire sortir son gros joujou de sa cour.
Exit le manteau rouge qui lui servait à surtout se protéger du froid. Enter le débardeur rouge et le petit short blanc qui met ses jambes en valeur. Sans oublier des savates dodo au cas où ça peut remonter sa cote auprès des lutines pendant que Mère Noël a le dos tourné.
Mare-Chicose
Il doit par contre se demander quel poste de responsabilité, bien rémunéré, il pourrait pourvoir à ses potentielles proies. Aussi, comment leur offrir un traineau dernier cri et des cadeaux mirobolants. Le « Candy Daddy » n’a plus autant de friandises que par le passé. Ce n’est pas qu’il ait des oursins dans la poche, “mais tiouuuu… Ou finn truve kouma les prix finn monte ? ”, nous lance-t-il lorsque nous le rencontrons au village du Père Noël, réimplanter du côté de Mare Chicose.
“Zis bizin met mask sinon mor toufe. Ca aurait été inenvisageable de nous approprier un terrain à Ebène.” En parlant de masque, le sien tient à peine autour de sa grande barbe blanche mais loin de lui l’idée de payer une contravention de Rs 2000 par les temps qui courent et encore moins d’être infecté par ces variants dont tout le monde parle. “C’est quoi le dernier déjà ? Micro-onde ?” Une booster dose est d’ailleurs à l’agenda. “Encore heureux que j’ai plus de 70 ans. Je suis éligible au Pfizer.”
Comme pour mieux s’acclimater à la vie mauricienne, il balade de temps en temps son traîneau collectant de la vieille ferraille, histoire de se faire quelques sous en les revendant à petit prix. Il aurait même été surpris sur le point de cueillir des ‘ti mang bien tann’ avant de se raviser par remord sans doute.
Sa fabrique de jouets, relocalisée à Maurice du côté de Mare-Chicose, n’a plus rien à voir avec celle qui faisait le bonheur des enfants. Désormais, les jouets sont fabriqués par de la main d’œuvre bon marché, des Bangladeshis qu’il a recrutés grâce à “enn kontak dan minister”. Une situation qui le rend malade, presque autant que l’est un de ses employés infecté à la Covid-19. “Et comme ils sont sous ma responsabilité, les frais médicaux sont à ma charge. Me ounn regarde prix de ses médicaments ?”.
“Sa boug koz for la”
Assis à son bureau, ou plutôt des palettes rouillées rafistolées qui lui sert de table de travail, il essaie de se souvenir de cette actualité sur les médicaments qui défraye la chronique en ce moment. “Molnu… piraviiir ? Hey vouzot, comment le fils de Geppetto et son acolyte Mr. Propre peuvent venir dire qu’ils n’étaient pas au courant de ce qui se passe dans leur fabrique ? C’est comme-çi, je venais vous dire que mo pa kone avek ki sanla Mère Noel inn ras. Sa boug koz for la. Kouma li apele ? Bafoul ? Non loudspeaker.”
Pour la Noël, il se demande bien comment il va faire voler son traineau. Pour les remplacer, il a du s’accommoder d’une meute de chiens errants “que nous retrouvons partout kot zot. Sel petit problem, ils n’en font qu’à leur tête. An gro, zot pa fer travay dir zot me galoup deryer tou minou”. Cependant, à observer son visage tracassé guettant la chaine de fabrication des jouets, nous devinons que Papa Noël en a gros sous le bonnet en ce moment.
Trainant ses savattes Dodo, il nous invite à découvrir la pièce ou sont stockées les matières premières pour fabriquer les jouets. “Comme vous pouvez le voir, il ne reste plus grand chose. Il va falloir al trase pour avoir du bois pour continuer la production. Mais je crains que misie la ne debarque à 7h du matin pour me demander des comptes sous les instructions de ce san lamour prop la”.