En ce moment, Baba Gaïa se porte très bien. Si bien qu’elle se pince les bras en se demandant : « Il est où le piège?” Rien à l’horizon ne peut lui enlever sa joie de vivre et son rire communicatif. Et c’est toute excitée qu’elle nous révèle son nouveau statut : « Je suis dorénavant une full-time artiste/auto-entrepreneur. » En effet, le 31 mars était son dernier jour de travail en tant que Communication coordinator. Un emploi qu’elle précise avoir adoré exercer pendant ces trois dernières années, car il lui a été permis, en plusieurs occasions, d’exprimer sa créativité.
À l’instar de la réalisation de la grande fresque murale du Mahoghany Shopping Promenade à Beau Plan. Sauf qu’un burn out lui a fait prendre conscience qu’elle avait un choix à faire : poursuivre son job et arrêter sa passion ou démissionner pour vivre uniquement de sa passion. Au fond d’elle, la réponse était déjà là. 8 ans, depuis sa toute première exposition le moment était enfin venu pour elle de se lancer à 100% dans l’art.
Avec ses stylos, ses pots de peinture ça fait déjà un moment que la talentueuse Baba Gaïa monte en popularité. L’univers coloré, aussi bien sur du papier, du canevas, en passant par les murs ou la toile, l’ont en effet très vite démarquée. N’essayez pas de la classer dans une catégorie distincte. Cette diplômée en Interior Design et Graphic design, trouve toujours le moyen d’en sortir et d’étonner.
À bientôt 29 ans, la franco-mauricienne, explique avoir toujours été quelqu’un qui n’hésite pas à fabriquer sa propre porte si jamais certaines ne s’ouvrent pas. Le « Ti Baba » est ainsi aujourd’hui une femme épanouie. Dorénavant, elle se consacrera uniquement à l’art, et ouvre sa boîte où elle compte vendre des objets de déco, ses tapis 100% fait-main, ses canevas, ses teintures, des chaises un peu design et autres pièces uniques…
Bref, de tout ce qu’elle est capable de créer. Elle a toujours aimé dessiner, peindre, et faire des choses de ses mains. Mais, le processus pour s’affirmer en tant qu’artiste lui a pris du temps : “Au fond de moi, j’ai toujours voulu être artiste. Mais je ne m’étais pas projetée. Finalement, c’est dingue à dire, les pièces du puzzle ont pris leurs places tout seul.”
À la base, Baba Gaïa, de son vrai nom Pascale Mamet, a commencé par des dessins sur papiers. Au bout d’un moment, l’envie de faire des choses de ses mains l’a rattrapée : “J’aime couper, j’aime casser, j’aime utiliser des outils différents.” Son terrain de prédilection : les plantes et la nature. Aquatique aussi bien que terrestre. Et bien entendu toujours dans des tons chauds.
Enfant, elle se souvient que sa passion a simplement commencé par les stylos couleurs : “Sans savoir ce que j’en allais faire. Je gribouillais.” Son père mauricien et sa mère réunionnaise étaient tous les deux très bricoleurs. Baba Gaïa a grandi en mariant les différentes formes d’art, les façonnant à sa manière, en se les appropriant. Une fois l’étape expérimentation en bricolage, à la poterie, à la pâte à modeler passée, elle s’est remise, durant ses années au lycée, à gribouiller des bandes-dessinées et des doddles. Entre ses va-et-vient entre La Réunion et Maurice, l’artiste en herbe s’est construite.
Puis, après le Bac et un an à Montpellier, elle a décidé de poser ses valises à Maurice. Elle fait la rencontre de Gaël Froget qui lui permet d’exposer au Hennessy Park Hotel, puis Laëticia Lor de The Third Dot qui l’invita à participer à plusieurs expositions dont Borderline.
Baba Gaïa croit dur comme fer dans la loi d’attraction. Son parcours s’est enchainé, car elle explique avoir osé relever les défis pour y parvenir. Des « réussites » qui lui ont cependant demandé beaucoup de travail et persévérance.
L’autodidacte est d’avis que la chance et le hasard y ont aussi contribué puisqu’au moment où elle s’est lancée publiquement, son style – très floral, très nature – était à la mode : » Probablement, ça a aidé à ce que les gens aiment mon travail”.
Pour se différencier, la jeune femme n’a pas hésité à utiliser des outils tel qu’Instagram pour partager spontanément ce qu’elle créait et réalisait “ Instagram m’a servi de port-folio. Mais je ne veux pas que les gens aient cette vision que c’est facile de mettre sa photo sur Instagram pour se faire connaître. Il s’agit pour moi d’une plateforme de travail où je pouvais partager mes créations et un peu de ma personnalité.”
“Être artiste, c’est bien mais pour en vivre, il faut bosser très dur.” Quoique, poursuit-elle, elle reconnait avoir été quelque part privilégiée dans la vie : “Je n’ai pas été pistonnée pour être ce que je suis aujourd’hui. C’est assez délicat à formuler et je pèse vraiment mes mots, car ça peut être sujet à controverse en quelque sorte. J’ai peur que ça enlève tout le travail que j’ai fait. Mais dans un sens, je dois être honnête à dire que j’ai eu la chance de rencontrer les bonnes personnes au bon moment. Si je n’avais pas eu ces opportunités grâce aux personnes rencontrées, les choses auraient été différentes.”
Une question lui trotte d’ailleurs dans la tête : “Est-ce que si je n’étais pas franco-mauricienne, est-ce qu’on m’aurait donnée les mêmes chances ? “Ce sont des choses qui me travaillent un peu j’avoue” Raison pour laquelle l’une de ses priorités est de se consacrer à des projets communautaires pour remettre un peu de vie et de couleurs dans la vie des gens et dans des endroits qui n’ont pas forcément accès à l’art.
Contrairement à quelques années de cela, Baba Gaïa sait qui elle est. C’est-à-dire une femme ouverte d’esprit, créative, réaliste, spontanée, qui essaie d’être authentique au maximum, qui se considère chanceuse, qui a beaucoup reçu, mais qui veut beaucoup donner, quelqu’un de vrai. Quelqu’un avec plusieurs racines. Et c’est ce qu’elle exprime dans ses créations. “Si je n’étais pas qui je suis, si je navais pas ce vécu, mes peintures ne ressembleraient pas à ça. Mes créations sont le reflet de mon identité.”
C’est d’un pas très décidé et affirmé que la full-time artiste se sent d’attaque pour faire évoluer son art. “Baba ne va pas se contenter de vivre de son art, elle va vivre de ses multiples talents.” Elle sera à la fois très émotive, brute et pleine de combinaisons de couleurs vives qui transmettent son sentiment d’équilibre harmonieux.
Elle a déjà toutes les clés en main pour y parvenir, mais ne veut rien négliger. Ses objectifs : faire de Baba Gaïa une marque connue et reconnue, l’exporter à l’international et s’entourer de gens pour travailler. “Je ne m’imagine pas réussir sans emmener des gens avec moi. Je veux améliorer ma vie et aussi la vie des gens autour de moi.”
Pour le moment, elle ne se voit pas quitter Maurice, car elle estime avoir encore beaucoup de choses à réaliser. Mais tout en étant basée ici, elle sera plus libre pour voyager et vivre d’autres expériences artistiques.
Après l’exposition Experience EdItion qui s’est tenue à La Galerie du génie, Baba Gaïa a déjà du pain sur la planche. Elle travaille sur le branding et l’identité visuelle de festival mauricien international, le Mauritius Open Air Festival, et se déplacera donc à Londres en juillet. L’occasion de s’aventurer dans plusieurs autres pays pour travailler sur d’autres concepts artistiques. “Baba gayn so nissa dan tou, Si je fais qu’un truc ça me gave et je sature. J’ai ce besoin d’alterner pour stimuler ma créativité.” conclut-elle.