Entre pertes de mémoire, dégradation des capacités motrices, changements d’humeur soudains et autres, les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer vivent un quotidien compliqué. Pour les proches, c’est aussi le cas. En marge de la journée Mondiale de la maladie d’Alzheimer, Pierre, 50 ans, nous raconte sa mère, Sonia, 80 ans, atteinte de cette maladie depuis une dizaine d’années.
“Je n’oublierais jamais ce jour où elle s’est réveillée et m’a appelé Monsieur. À ses yeux, j’étais devenu un étranger”, raconte Pierre. Les souvenirs de cette mère courage et travailleuse rejaillissent. Au décès de son père dans les années 70, “ma mère nous a élevés seul, ma sœur et moi ”. Étant de nature très indépendante, même à sa retraite, Sonia sortait tous les jours pour se rendre dans la capitale pour faire ses courses, payer ses factures, entre autres démarches. “Un beau jour, l’on se rend compte que les factures ne sont plus à jour, qu’elle oublie de prendre ses médicaments contre l’hypertension et qu’elle visite des commerces à plusieurs reprises pour demander la même information”. C’étaient là les premiers signes d’alerte et symptômes de la maladie d’Alzheimer, confirmé par la suite par un médecin.
“Li apel mwa misie”
Malgré les hauts et les bas, les oublis et non-dits, Pierre se souvient qu’elle a été autonome plusieurs années après le diagnostic. Elle rejoint The Alzheimer Association of Mauritius où elle devint l’une des patientes les moins affectées et des plus actives et dévouées. Sonia était aussi engagée dans un groupe de troisième âge à Beau-Bassin. “Toutefois, elle a été rattrapée par sa maladie durant le confinement en 2020. N’étant plus en mesure de s’adonner à ses activités et enfermée entre quatre murs toute la journée, son état s’est complètement détérioré”. En effet, ses capacités cognitives se sont détériorées davantage. “Elle ne nous reconnaissait quasiment plus. Ma mère est là, mais ce n’est plus elle”. Sonia ne reconnaît plus sa maison, et demande également souvent à ses enfants quand est-ce qu’elle va rentrer chez elle. La voix de Pierre est empreinte de tristesse et de regret à l’évocation de ces épisodes douloureux.
Démuni et impuissant
Cependant, le pire était à venir et les choses se sont compliquées quelques mois plus tard. Sonia perdit sa mobilité et n’arrivait plus à se lever du lit et à marcher toute seule. “Ses muscles ont été affectés. Depuis ce jour, ma sœur et moi devons tout faire pour elle. C’est-à-dire, lui donner ses repas, lui faire prendre son bain ou encore changer sa couche”. Pierre se sent souvent démuni et impuissant. Il confie que c’est dur de se dire qu’il n’y a aucun traitement contre la maladie d’Alzheimer. “On peut ralentir sa progression, mais pas en guérir. Étant donné l’âge avancé de ma mère, et du traitement médicamenteux lourd, les médecins nous l’ont déconseillé”. Pierre rajoute que sa mère a travaillé presque toute sa vie. “Nous ne sommes pas riches, mais aujourd’hui nous n’avons plus de problèmes financiers. Mais maman ne peut pas profiter, ne serait-ce que d’un dîner au restaurant. Elle est prisonnière de cette maladie qui la ronge chaque jour un peu plus”.