Après avoir longtemps prévu comme un scénario improbable, sinon impossible, le regroupement des trois partis de l’opposition historiquement implantés dans l’histoire parlementaire du pays, le leader du MSM a dû se résoudre à bricoler et trouver des parades maintenant que cette alliance s’est concrétisée et qu’elle a parfaitement réussi ses sorties à Mare d’Albert et à Vacoas.
Le dernier remaniement, contraint, en raison des déboires de deux de ses grands « soldats », terme dont ils aiment se réclamer, Rajanah Dhaliah, qui a démissionné de son poste de PPS, et Maneesh Gobin, muté à un poste où il essayera de se faire oublier entre deux missions et trois avions, n’est, en fait, que la toute dernière des actions prises par le pouvoir pour essayer d’endiguer la vague de mécontentement qui a gagné le pays, qui bouleverse ses plans et qui fait craindre une éventuelle débâcle. Le bricolage au jour le jour ne s’arrêtera certainement pas là.
Comme avant même qu’elle n’annonce avoir décidé de briguer les prochaines élections sur la même plate-forme, l’alliance PTr/MMM/PMSD avait conclut un accord pour affronter ensemble les municipales. Le gouvernement, craignant une déconvenue programmée, avait décidé de repousser pour la troisième fois l’organisation des élections municipales qui auraient normalement dû se tenir en juin 2021. C’était à la veille de l’échéance et sous le motif ridicule qu’une réforme des administrations régionales est nécessaire. Pour masquer une fuite en avant, on peut difficilement faire plus ridicule!
Et comment faire du neuf avec du vieux et donner à une équipe qui squatte les collectivités locales, dépourvue d’imagination et sans relief depuis 2015, un semblant de fraîcheur, c’est procéder à un remplacement des premiers magistrats.
Les maires, qui s’étaient incrustés pendant de longues années, ne s’étant pas particulièrement signalés par la qualité de leur gestion et l’abondance de leurs résultats. On les a remplacés par d’autres illustres inconnus qui sont censés révolutionner l’administration avant juin 2025, selon le nouveau calendrier des échéances décidé par un gouvernement pour qui la démocratie a peu de sens.
Remaniement des administrations locales, puis celui du conseil des ministres, ou comment continuer à essayer de limiter la casse. C’est ce à quoi est obligé de s’employer un Premier ministre qui, ignorant les enseignements, pourtant limpides, des élections générales de novembre 2019, a cru pouvoir exercer indéfiniment un pouvoir absolu, autoritaire et personnel, la conversion de la rue où il habite, la fameuse Angus Road, partiellement convertie en voie à sens unique, étant la toute dernière illustration de cette propension à se croire propriétaire du pays.
Ce qu’il ne sait pas, c’est que ce genre de décisions qui peut paraître normal à ses yeux et à ceux de son gouvernement de suiveurs dociles, irrite considérablement les citoyens obligés de faire des détours interminables pour rejoindre leur destination. Et lorsqu’on y ajoute la présence provocatrice et permanente d’un pauvre agent de police, c’est ajouter un peu plus au ressentiment de la rue.
Le remaniement express de jeudi après-midi est, en fait, un « panic dan baz » qui ne dit pas son nom. Est-ce que ce tout dernier jeu de chaises musicales préviendra l’érosion de confiance dans l’actuel gouvernement ? Pe seye mem, mais c’est peu probable que l’exercice soit conclusif, d’autant que les permutations opérées n’ont réussi qu’à accentuer les frustrations en interne, notamment parmi les transfuges nouveaux et anciens qui attendent toujours leur « récompense ».
Les deux nouveaux entrants Anjiv Ramdany et Dorine Chukowry sont déjà tournés en ridicule sur les réseaux sociaux, des internautes se plaisant à agiter les archives pour exposer leurs contradictions ou leur légèreté. On rappelle ainsi que le nouveau ministre de la Fonction Publique a pu trouver un chemin « carrossable » – prononcé en anglais au Parlement – vers un maroquin et, celle du Commerce, sa légendaire déclamation assassine sur les « scandales » du Sun Trust et la protection des « mawsi ». C’est de bonne guerre !
Maneesh Gobin, le secrétaire général du MSM et colistier de Rajanah Dhaliah qui est co-cité dans l’affaire Stag Party et celui dont le ministère a délivré un bail à Grand-Bassin contre des pots-de-vin, garde son poste d’Attorney General, celui que Rubina Jadoo-Jaunbaccus, épinglée par la commission d’enquête sur la drogue, convoitait, mais il est dépouillé du porte-feuille de l’Agro-industrie pour retrouver celui des Affaires Étrangères qui a été complètement dévalué par le MSM.
Pour le reste, le choix des uns pour le conseil des ministres et des autres pour un poste de PPS, c’est dans la triste logique du dosage communautariste et même de la provocation avec la nomination d’un Kenny Dhunoo, celui qui a accumulé les indélicatesses en temps record. Mais le MSM de Pravind Jugnauth, c’est ça, la prime aux médiocres et aux « faneurs » patentés.
Dans tout ce remue-ménage, une question taraude ceux qui ont suivi le parcours d’un Ivan Collendavelloo, celle de savoir où sont passés l’amour propre, la dignité et le respect de soi de cet homme. C’est vrai que ceux quo osent encore se réclamer du militantisme ont développé une faculté à avaler couleuvres et boas avec une indécente délectation. A-t-il seulement le sens de l’histoire celui qui démissionna comme député pour une signature, mais qui finit sa carrière dans la plus honteuse des postures ?
Heureusement que, dans tout ce tableau sombre, il y a ces jolies lueurs qui viennent de nos sportifs dont certains ne doivent absolument rien à ceux qui, drapés de leur folklorique attribut orange partisan, essayent désespérément de s’approprier le fruit de leurs efforts constants, de leurs sacrifices et de leur culture de la gagne.
Il y a cette joie, ces sourires post-victoire, ces nombreux médaillés d’or drapés du quadricolore, cette belle image du malvoyant mauricien Rosario Marianne consolant et réconfortant un concurrent réunionnais. C’est un baume au cœur bienvenu en ces temps de grande tourmente.