La visite officielle de deux jours effectuée par le Premier ministre indien, Narendra Modi, s’est avérée être un succès à plus d’un titre. Beaucoup de Mauriciens qui ont suivi de près cette visite ont vu le Premier ministre indien sous un nouveau jour. Il s’est présenté comme un leader d’envergure mondiale avec un charisme capable de galvaniser les foules, mais également comme un visionnaire avec un projet non seulement pour la région de l’océan Indien, mais également pour l’ensemble de ce qu’il appelle le « Global South ». Lorsque l’occasion leur a été donnée, les Mauriciens se sont déplacés en nombre pour le voir. Cela a été le cas à l’aéroport à son arrivée, mais également au centre de Trianon, dans l’après-midi de mardi, ou encore au Champ de Mars pour la cérémonie de lever de drapeau, ce 12 mars.
Sa visite a aussi été marquée par la conclusion de pas moins de huit protocoles d’accord touchant un large éventail de domaines, dont l’utilisation de devises locales aussi bien en Inde qu’à Maurice. Mais aussi la création d’un Mauritius Automated and Clearing System qui pourrait permettre aux pays du COSESA et de l’Afrique australe de traiter avec l’Inde en roupies indiennes. Une ligne de crédit en roupie indienne a par ailleurs été mise à la disposition de Maurice pour le financement du Water Pipeline Replacement Project dans l’île. Il est aussi question de la formation de diplomates et de fonctionnaires.
Deux accords concernent le développement et la sécurité maritime. Ainsi, les gouvernements mauriciens et indiens pourront partager ces informations privilégiées concernant les navires commerciaux (“white shipping information”). En tenant en compte que la coopération en matière de défense et la sécurité maritime restent des piliers clés du partenariat stratégique, les observateurs s’attendent à ce que l’Inde apporte une aide sensible au développement de l’économie. Lequel développement passe par la modernisation des services et des infrastructures portuaires, avec l’aide financière de l’Inde, mais également de la France et du Japon, entre autres.
Parmi les priorités dans ce secteur figurent la création d’un service maritime régional, mais également la construction éventuelle d’un port de pêche. « Un océan Indien libre, ouvert, sécurisé et sûr est notre priorité commune. Nous sommes déterminés à apporter notre plein soutien à la sécurité de la zone économique exclusive de Maurice » a souligné le Premier ministre Modi.
Sur un plan géopolitique la coopération entre l’Inde et Maurice aussi s’est consolidée. « Le partenariat entre nos deux pays sera renforcé et sera élevé au rang de partenariat stratégique renforcé », a laissé entendre le Premier ministre indien. De plus, après le lancement de SAGAR lors de sa visite à Maurice en 2015, il a choisi le territoire mauricien cette fois pour lancer le MAHASAGAR, acronyme de Mutual and Holistic Advancement for Security and Growth Across Regions, et qui concerne une série de projets dans le Global South.
Sur plan politique, cette visite a donné un coup de pouce au gouvernement mauricien et au Premier ministre, Navin Ramgoolam, qui a prononcé un de ses meilleurs discours à un banquet organisé en l’honneur de son homologue indien. Il a placé cette visite dans un contexte historique, mais sa référence au Freedom Fighter indien Chandra Bose n’est pas fortuite. Ce dernier est en effet présenté comme une figure historique majeure en Inde par Narendra Modi. Aussitôt son arrivée au pouvoir, il avait d’ailleurs fait installer une statue de Chandra Bose à l’India Gate, haut lieu de mémorial à Delhi.
Le soutien inconditionnel accordé par l’Inde à Maurice concernant les Chagos a également toute son importance dans le cadre des pourparlers entre Maurice et la Grande-Bretagne. Seul point noir lors de cette visite : les journalistes mauriciens considèrent, non sans raison, que leur dignité et leur droit n’ont pas été respectés durant cette visite. Malgré le changement du gouvernement, les mêmes fonctionnaires et les mêmes officiers de politique continuent en effet de traiter la presse, MBC exceptée, comme des moins que rien. D’ailleurs, le terme « Statement to the press » est un misnoner puisque les journalistes mauriciens ont été relégués au fond de la salle. Certains officiers de police ont, sur l’ordre d’on ne sait pas qui, brillé par un manque de respect envers les membres de la presse au Vaghjee Hall mercredi matin. Espérons que ce ne soit pas une remarque lancée dans le désert.
Jean Marc Poché