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Virage manqué

Alors que tous les signaux climatiques sont au rouge, et que la transition énergétique devrait être l’une de nos principales priorités, nous peinons toujours à nous engager vers une décarbonation de notre société. Une société en recherche constante de croissance soutenue, et de facto donc de plus en plus énergivore. Certes, l’on peut toujours espérer, surtout à l’approche de la COP 27, que le monde prendra enfin conscience de l’urgence climatique. Ce qui n’a résolument pas été le cas jusqu’ici puisque, malgré les promesses faites lors des précédentes conférences, peu auront été tenues dans les détails, et aucune dans leur globalité.

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Si la transition énergétique est une nécessité, une question doit malgré tout être posée, sans bien entendu chercher à en minimiser l’importance, à savoir si cette toujours pour l’heure utopique transition n’arriverait finalement pas trop tard… Car ce n’est un secret pour personne : nous détenons depuis maintenant plusieurs décennies de toutes les données techniques nécessaires que pour avoir compris que seule cette transition nous éviterait de nous prendre le « mur », autrement dit de franchir le cap du non-retour. Soit encore, dit autrement, une planète qui, sous l’effet de l’emballement, ne ferait plus que de se réchauffer. Jusqu’à faire disparaître, peut-être, toute forme de vie de sa surface.

À cette question, la réponse est implacable : OUI, il est trop tard ! Trop tard en tout cas pour envisager une transition telle que le terme le sous-entend. La faute à l’extraordinaire faculté humaine à reporter au lendemain les problèmes du jour. Car c’est un fait que si, à la fin des années 80’/début des années 90’, voire même il y a seulement 20 ans, le monde avait réalisé l’importance d’investir massivement dans les énergies renouvelables, nul doute alors que nous n’en serions pas là aujourd’hui. Sans compter que nous ne semblons toujours pas trop avoir envie de ne serait-ce que « migrer » vers cette absolue nécessité.

Après plusieurs décennies de sous-investissement donc, nous voilà face à un problème bien plus cornélien encore, puisqu’entre-temps, bien entendu, nous n’avons non seulement pas ralenti le pas, mais nous l’aurons même accéléré. Ce qui constitue en l’état un crime contre l’humanité, certes sans préméditation, mais résultant malgré tout d’un laxisme général caractérisé. C’est d’ailleurs en substance ce que clament de plus en plus d’experts, à l’instar de Johan Rockström, directeur de l’Institut de Potsdam pour la recherche sur l’impact climatique, mais aussi contributeur du rapport collectif Earth For All : A Survival Guide for Humanity, publié récemment par le Club de Rome, soit 50 ans après le fameux rapport Meadows.

Dans ce nouveau rapport, l’on ne retrouve plus que deux scénarios de croissance. Le premier, baptisé Too Little, Too Late, voir perdurer l’orthodoxie économique. Avec pour résultat une hausse des inégalités sociales et un réchauffement climatique de +2,5 °C d’ici 2100. Et un second, appelé Great Leap, où le monde se mobiliserait enfin pour opérer plusieurs changements sociétaux fondamentaux, comme l’éradication de la pauvreté et des inégalités, la mise en place de structures permettant une alimentation mondiale plus végétale et, bien sûr, une décarbonation rapide de l’énergie.

Aujourd’hui donc, plus de transition possible. Car qui dit transition, dit aussi une série d’actions prises sur un certain laps de temps pour atteindre le but recherché. Autrement dit, doucement, trèèèsss doucement. Or, le problème, c’est que le climat, lui, n’est pas disposé à attendre la fin de nos tergiversations. La Terre tournait déjà autour du Soleil bien avant notre apparition, et elle continuera de le faire pendant encore quelques milliards d’années, quoi qu’il nous arrive. Aussi, la seule chose qui pourrait faire dévier de sa trajectoire le changement climatique, et l’on dit bien juste « dévier », serait un changement total de paradigme économique et industriel. Ce qui semble, du point de vue de nos instances dirigeantes, pour l’heure encore totalement impensable. Autant dire que si transition il y a, ce sera plus que probablement celle d’une Terre regorgeant de vie vers une planète en ayant perdu toute trace.

 

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