Vincent Lagarde, président de la société NATEC Medical, spécialisée dans la fabrication de dispositifs médicaux et située à Ebène, revient sur la situation du COVID-19 à Maurice. S’il apprécie les « mesures strictes » mises en place par le gouvernement pour contrôler la propagation du virus, celui qui a été élu entrepreneur de l’année en 2015 à l’AfrAsia Tecoma Award, se dit prêt à travailler avec l’Etat pour effectuer des tests RT-PCR dans son laboratoire. Sur le plan mondial, Vincent Lagarde estime que l’économie sera affectée et que notre pays « ne sera pas épargné ».
Quelle est votre appréciation de la manière dont les autorités mauriciennes
gèrent la crise du COVID-19 ?
C’est un travail remarquable que fait tout le monde à Maurice, incluant le corps médical, la force policière et autres. C’est une situation difficile pour l’île Maurice et le monde en entier. Les autorités ont très rapidement mis en place une série de mesures strictes. Un lockdown total semblerait être à ce stade la meilleure façon, hormis un Mass Testing pour contrôler la propagation rapide du virus.
Nous dirigeons-nous bien vers une récession mondiale et combien de temps pensez-vous qu’elle durera ?
Au moment où je vous parle, on ne sait pas combien de temps durera la crise de coronavirus ni dans quel état le monde et Maurice se retrouveront par la suite. Je prévois que la situation économique de l’île sera la même qu’ailleurs, que l’économie se contractera, que les échanges diminueront et que potentiellement un grand nombre de personnes dans le monde du travail perdront leur emploi.
Quels sont les atouts de Maurice pour faire face à cette possible récession ?
Tout d’abord, Maurice a une situation géographique privilégiée, notamment entre l’Asie et l’Afrique, et est facile d’accès à l’Europe. Le commerce et le
tourisme pourront reprendre graduellement selon les zones géographiques. De plus, nous sommes sur une île, ce qui a le grand avantage de pouvoir contrôler les entrées. D’autre part, comme évoqué ci-dessus, les strictes mesures prises pourraient très bien empêcher le nombre de malades catastrophiques comme constaté dans d’autres pays. Une certaine reprise des activités pourrait être considérée plus tôt qu’ailleurs.
Les facteurs, selon vous, qui permettraient une reprise économique dans le pays ?
Je note que les mesures de sécurité (port de masques, distanciation sociale, etc…) sont de plus en plus respectées par la population. C’est l’élément essentiel pour stopper la propagation de cette épidémie, donc de mettre un terme au couvre-feu sanitaire pour une reprise rapide au plan économique à Maurice.
Pourquoi avez-vous choisi l’île Maurice comme base d’opération ?
L’aventure NATEC a commencé en 1998 aux Etats-Unis, où je me suis
installé avec ma famille après mon expérience française. J’ai créé là-bas ma société. Je me suis associé avec un entrepreneur américain dans le Connecticut.
Lors de vacances à Maurice en 1997, l’idée m’avait séduit de délocaliser une partie de la production : la main-d’œuvre est qualifiée, abondante, bilingue et les conditions salariales avantageuses. Avec la situation de plein emploi, qui régnait aux Etats-Unis à cette époque, il devient plus judicieux de délocaliser complètement l’entreprise à Maurice avec, dans la foulée, le rachat des parts de mon associé américain. Le gouvernement à travers la MEDIA, l’ancien BOI, offrait alors de sérieux avantages aux entrepreneurs comme moi venant s’implanter à Maurice. Voilà comment démarre la belle histoire avec l’île en 2000.
Revenons à l’actualité, avez-vous augmenté votre capacité de production durant cette épidémie ?
Nous fabriquons des dispositifs médicaux (des cathéters à ballonnet d’angioplastie pour la cardiologie interventionnelle, la radiologie, la gastroentérologie et l’urologie) et il y aura toujours un besoin de nos produits pour sauver des vies, mais nos perspectives de croissance ont changé dans l’immédiat. Au mieux, nous aurons une baisse de 20% de notre chiffre d’affaires. Nous avons dès les premiers jours mis en place une cellule de crise, et toute l’équipe de direction travaille dur pour gérer au mieux cette crise et les conséquences de celle-ci.
Offrez-vous d’autres services qui peuvent aider l’île Maurice dans cette période de Covid-19 ?
Bien sûr. Nous avons la technologie et la capacité de stériliser les masques réutilisables grâce à l’oxyde d’Ethylène. Ce produit tue tous les virus connus. Nous nous tenons donc à la disposition des fabricants de masques. Nous faisons cela de façon régulière et obligatoire pour nos produits car nos cathéters doivent être exempts de toutes particules, microbes et bactéries qui pourraient les contaminer afin qu’ils puissent aller dans le corps humain en toute sécurité.
Vous avez mentionné un Mass Testing comme une meilleure façon de contrôler la propagation rapide du virus. A votre niveau, y a-t-il un soutien additionnel que vous pouvez apporter aux autorités de la Santé à Maurice pour mieux contrôler cette situation ?
Notre laboratoire Abiolabs Ltd se tient aussi à la disposition du gouvernement afin de pouvoir faire les tests RT-PCR, qui sont essentiels pour sortir du confinement. C’est une chance unique pour un pays d’avoir un laboratoire comme le nôtre.
Parlez-nous plus d’Abiolabs Ltd…
Créé en 2015, Abiolabs Ltd est un laboratoire accrédité ISO 17025 par Mauritas, situé à Ebène. Nous allons étendre notre scope aux analyses ADN/ARN très bientôt. En plus de ces compétences, nous fournissons aussi les services de qualification pour les hottes à flux laminaire; équipements indispensables pour assurer la sécurité des personnes en virologie et bactériologie. A ce titre, nous sommes les seuls équipés et compétents à Maurice pour effectuer ces services.
Le laboratoire Abiolabs est-il bien équipé pour proposer le RT-PCR test ? Nous disposons d’équipements nécessaires pour effectuer le test – extracteurs d’air, centrigeuses, micropipettes, vortex, micro-centrifuges et un RT-PCR Quant Studio 3 (machine identique à celle de Candos). De plus, nous utilisons en routine ces machines depuis plus de six mois pour la recherche ADN.Nous disposons aussi des services d’un expert international dans le domaine et de cinq techniciens formés à toutes ces techniques.
Combien de tests Abiolabs peut faire par jour ?
En considérant notre personnel et nos équipements, notre capacité d’analyse actuelle est de 300 tests par jour.
Abiolabs offre-t-il déjà ce service de RT-PCR test au public ?
En fait, nous attendons toujours notre licence qui est en cours au niveau du ministère de la Santé. Nous espérons une réponse très rapide pour apporter notre soutien à la société mauricienne.