UN TRAMWAY NOMMÉ DÉSIR : Belle prestation au théâtre…

« I don’t want realism. I want magic » [Blanche Dubois dans Un tramway nommé désir », Tennessee Williams]

- Publicité -

Je peux encore respirer l’odeur des planchers cirés de la salle de théâtre. Je peux entendre le souffle des spectateurs impatients de découvrir la scénographie saisissante d’une pièce écrite en 1947. Soudain, un ‘Ah’ collectif se fait entendre. Les comédiens entrent en scène. Je suis plongée dans la période de reconstruction après la Seconde Guerre mondiale. Mon regard se dirige vers Blanche, personnage central d’Un tramway nommé désir, pièce de Tennessee Williams mise en scène par Ashish Beesoondial.

La talentueuse Rachel de Spéville-Mamet a su s’incruster dans la peau de Blanche à merveille. Nous découvrons en effet grâce à ce personnage phare, tout l’art de la comédienne qui parvient à éveiller chez nous une kyrielle d’émotions. Nous retrouvons d’abord la duplicité d’une femme à la personnalité complexe, dissimulatrice, qui se crée un personnage de femme cultivée et raffinée pour cacher son passé délictueux. Après le suicide de son époux, Blanche ne cesse de tenter de se reconstruire  à travers le rêve et l’espoir : « I don’t want realism. I want magic », nous dit-elle.

La complexité du drame de Blanche est toutefois enclenchée par l’aspect rustre, les manières brusques et les paroles blessantes de son beau-frère Stanley Kowalski. Son obsession de découvrir le passé de cette dernière ne fera qu’accentuer la tension dramatique de l’intrigue. Aux illusions de Blanche se heurte la brutalité du réel. Il s’agit de la brutalité grinçante du machisme représenté par Stanley et sa bande d’amis. Révulsée par cet homme violent et misogyne, Blanche est néanmoins intriguée par son charme. La cruauté de la situation atteint son paroxysme lorsque Blanche est enfermée et violée par cet homme. L’hystérie, la détresse profonde et le désespoir de ce personnage féminin nous rappellent sans doute l’importance de l’empathie quant aux nombreuses mésaventures des femmes au quotidien. Personne n’est à l’abri de la férocité de l’homme.

C’est bien dans une perspective constructiviste qu’Un tramway nommé désir relève d’une écriture militante. Elle charge en effet le personnage Blanche de dénoncer l’exploitation impitoyable de la fragilité de la Femme par l’Homme. Tennessee Williams veut certes reconstituer cette fracture de la société phallocentrique et restaurer l’ordre des choses. C’est sans doute en ce sens qu’il assume une écriture décapante qui pourrait s’assimiler à une littérature de combat.

Quant à moi, je conserve la même idéologie qui m’a accompagnée à mon arrivée au théâtre : celle du rejet d’une mentalité fermée dans un monde ouvert. Ce soir, je repars les yeux pleins de magie, comme Blanche…

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour

- Publicité -