Le Monetary Policy Committee de la Banque de Maurice a décidé de renverser la tendance par rapport au taux directeur bancaire, soit après plus de dix ans (2011). Cet instrument de la politique monétaire a été rajusté à la hausse de 15 points, passant de 1,85% à 2%. «
L’augmentation du taux directeur constitue un signal transmis au marché pour faire comprendre que des mesures appropriées seront prises pour contenir l’inflation », a déclaré le gouverneur de la Banque de Maurice, Harvesh Seegolam lors d’un point de presse, hier après-midi après la réunion du MPC. Il souligne que la Banque centrale est très préoccupée par la portée des pressions inflationnistes dans le pays.
Les conséquences de l’invasion de l’Ukraine par la Russie et l’inflation en hausse ont visiblement dominé les délibérations de cette première réunion du MPC pour l’année 2022 . Le gouverneur de la Banque centrale reconnaît que l’inflation intérieure s’est accélérée en janvier et en février 2022 en raison de pressions résultant des prix des carburants et des produits alimentaires, en particulier des légumes frais. Il a ainsi commenté les derniers chiffres de Statistics Mauritius.
Le gouverneur de la Banque de Maurice avoue que ce taux est bien supérieur aux estimations antérieures de la Banque centrale. « Nous continuerons à suivre la situation et si la situation le demande, nous convoquerons une réunion du MPC avant la date prévue en juin prochain », ajoute-t-il.
Passant en revue la situation de l’économie nationale, Harvesh Seegolam s’évertue à défendre la thèse d’une trajectoire de reprise. Il fait comprendre que la réouverture complète des frontières nationales en octobre 2021 et le déploiement de protocoles sanitaires complets pour accueillir en toute sécurité les voyageurs vaccinés à Maurice ont insufflé l’élan dont le secteur du tourisme avait besoin.
Le pays a accueilli environ 262 000 touristes depuis la réouverture complète des frontières jusqu’à fin février 2022. Au cours du mois dernier, environ 53 000 touristes ont visité Maurice conformément à ce qui était ciblé par les autorités. Les dépenses moyennes par touriste au dernier trimestre de 2021 ont augmenté d’environ 40 % par rapport au niveau d’avant la pandémie. De plus, la durée moyenne de séjour est passée à environ 12 nuits, contre 10 nuits pendant la période pré-pandémique.
Les réservations pour les trois prochains mois sont encourageantes. La France a fait passer Maurice de la liste orange à la liste verte, ce qui implique une levée de toutes les restrictions de voyage. Cela devrait apporter un soutien supplémentaire au secteur, compte tenu de l’importance de la France en tant que marché pourvoyeur de touristes.
Plus récemment, la réouverture complète des voyages entre La Réunion et Maurice devrait contribuer positivement à l’industrie. Il fait état de la nécessité de déployer des efforts supplémentaires pour assurer la bonne performance du secteur touristique et atteindre l’objectif de 1 million de touristes en 2022 comme annoncé par le gouvernement.
Harvesh Seegolam indique que les commandes continuent d’augmenter dans les entreprises du secteur manufacturier même si les ruptures d’approvisionnement et les pénuries de main-d’Å“uvre pèsent toujours sur les capacités de production. Les services financiers, la construction et les technologies de l’information devraient gagner du terrain cette année et continuer à contribuer positivement à la croissance. Il estime que le pays peut potentiellement atteindre une croissance de 7% à 8% cette année.
Interrogé par la presse concernant ces prévisions optimistes, Harvesh Seegolam estime que « ce taux de croissance est à notre portée à condition que les prévisions concernant les arrivées touristiques se concrétisent. »
Au niveau des marchés des changes, le gouverneur rassure que « la Banque a vendu un total de 45 millions de dollars aux banques et un montant total de 80,5 millions de dollars à la State Trading Corporation. Depuis le début de la pandémie en mars 2020, la Banque a vendu un total de 2,8 milliards de dollars sur le marché ».
La dernière intervention en date du 7 mars confirme que 15 millions de dollars ont été vendus sur le marché local au taux de Rs 43,25 le dollar. Les réserves officielles brutes de change du pays s’établissent à environ 7,8 milliards de dollars à fin février 2022 (représentant 20 mois d’importations). La Banque reste déterminée à maintenir un régime de taux de change flottant, visant à refléter les mouvements des principales devises sur les marchés internationaux ainsi que les conditions du marché intérieur.
Au chapitre de la stabilité financière, il ressort, entre autres, que les moratoires et certaines des mesures d’allègement du COVID-19 ont été prolongés jusqu’en juin 2022 .
D’autre part, la Banque a mené une enquête auprès de toutes les banques pour évaluer leurs expositions à la Russie et à l’Ukraine. « Les résultats montrent que l’exposition directe du secteur bancaire à ces économies n’est pas significative », tente-t-il de rassurer.
Harvesh Seegolam concède que la guerre russo-ukrainienne peut affecter le commerce transfrontalier et les flux d’investissement entre les pays. Son impact sur Maurice dépendra de la durée du conflit et de ses effets sur nos principaux partenaires commerciaux. Il relève toutefois que la guerre présente des risques à la baisse pour les différents scénarios de croissance.