La petite île Rodrigues continue d’être une source d’inspiration pour les Mauriciens dans le cadre de la République. Elle a en effet été la première à mettre en œuvre la proportionnelle dans son système électoral. Cette fois, elle nous donne la leçon de l’alternance du pouvoir.
Dimanche dernier, les élections régionales se sont déroulées de manière exemplaire, avec un taux de participation de 77,7%. Les résultats définitifs ont donné lieu une suspense, qui n’a cependant pas duré longtemps, soit le temps pour la commission électorale de publier la liste des élus sur la base de la proportionnelle et, de l’avis des observateurs, c’est sans surprise que l’alliance de l’opposition a pris le dessus sur l’OPR en obtenant un siège de plus. Elle dirigera donc le gouvernement régional avec neuf sièges, contre huit à l’OPR. Chapeau donc aux électeurs rodriguais, aux partis ayant présenté des candidats à ces élections, et au commissaire électoral, qui malgré ses déboires à Maurice, a été à la hauteur de la situation à Rodrigues.
Ainsi, après deux mandats successifs, l’OPR, qui s’est présenté pour la première fois aux élections sans Serge Clair, siégera dans l’opposition. La réaction de Francisco François, présenté à un certain moment comme un remplaçant potentiel de Serge Clair, est tout à son honneur. « Je respecte le choix des électeurs et leur appartenance aux partis politiques. Mais il ne faut pas oublier que Rodrigues, c’est notre île, et que nous devons continuer à la faire progresser dans la bonne direction », devait lancer le député rodriguais, qui occupe également les fonctions de PPS pour Rodrigues. Sur un plan politique, il se dit confiant que son parti est en mesure de revenir au pouvoir.
La cérémonie de prestation de serment des membres de l’Assemblée régionale a lieu ce samedi en présence du président de la République, Pradeep Roopun, et du leader de l’opposition et du PMSD, Xavier-Luc Duval. Ce dernier avait redoublé d’efforts pour amener les partis de l’opposition rodriguaise à conclure une alliance électorale de dernière minute au soir de la veille du dépôt des candidatures. Sa présence à Rodrigues est aussi symbolique, car elle marque également un retour du PMSD aux affaires dans l’île. Il a gagné son pari.
On ne sait cependant s’il pourra relever à Maurice le défi de réunir tous les partis de l’opposition, à un moment où les discussions entre l’Entente de l’Espoir et le Parti travailliste semblent piétiner. Le porte-parole du groupe parlementaire travailliste, Arvin Boolell, s’est hasardé vendredi à tirer les premières leçons des élections régionales à Rodrigues, en affirmant que « les alliances ne doivent pas être conclues avant la dissolution du Parlement » et en « favorisant une stratégie de “Step by Step” ». On ignore à ce stade si son approche corrobore avec celle du leader du Ptr, Navin Ramgoolam, qui continue ses négociations avec les autres partis de l’opposition, représentée par Paul Bérenger. Jusqu’à maintenant, il ne s’est pas encore exprimé ouvertement à ce sujet.
En attendant, le défi, pour la nouvelle administration rodriguaise, est élevé, à un moment où l’île est toujours affectée par la pandémie. Les nouveaux dirigeants avaient placé la barre haute en exprimant leur volonté de consolider l’autonomie de Rodrigues, et avaient présenté le problème du stockage et de fourniture d’eau comme une de leurs priorités.
Le problème de l’eau est en effet capital pour la relance non seulement de l’agriculture, mais également de l’industrie touristique, qui constituent des piliers du développement économique de l’île. Sans compter le développement portuaire et aéroportuaire, secteurs essentiels pour l’ouverture de Rodrigues sur le monde, et bien entendu, la création d’emplois pour endiguer l’exode vers Maurice.
Toutefois, la clé de tout développement, à Rodrigues, réside dans la qualité des relations que la nouvelle administration compte développer avec le gouvernement mauricien, et leur capacité d’intégrer l’île Rodrigues dans la République, tout en préservant son identité propre. Le chantier est immense. Souhaitons donc bonne chance à cette nouvelle administration !