En fin de semaine la campagne électorale s’est intensifiée sur le terrain à Rodrigues. A coups de meetings publics, d’exercices de porte-à-porte, de déclarations et de Live sur les réseaux sociaux, et autres réunions dans les villages à travers l’île jusqu’à fort tard le soir, des fois jusqu’aux petites heures du matin, chaque candidat veut mettre toutes les chances de son côté afin d’obtenir un siège au sein de l’Assemblée nationale.
Officiellement, le Mouvement Rodriguais (MR) de Nicolas Von Mally, où Jean Reddy Augustin et Marie Martheline Edouard sont candidats, et l’Organisation du Peuple de Rodrigues (OPR), dont Francisco François (lui-même leader du parti) et Marie Roxana Collet briguent les suffrages, ont respectivement présenté leur programme électoral lors d’une conférence de presse à une semaine d’intervalle.
Les activistes et militants des partis, ainsi que les candidats indépendants, sont très actifs un peu partout dans l’île. Mais cette fois, l’enjeu est de taille, car c’est la première fois que l’on voit autant d’engouement pour des élections nationales, où cinq partis, une alliance et deux candidats indépendants sont en lice.
À la nuit tombée, les esprits se sont quelque peu surchauffés. Sur les réseaux sociaux, chacun harangue les membres de sa famille, ses amis et connaissances à voter pour sa formation politique. Il y a également des échanges de bas étages et autres ingérences dans la sphère privée à l’encontre des adversaires politiques. Que ce soit de la part des politiciens ou des sympathisants.
Lors des meetings publics, des politiciens cherchent à rallier le plus grand nombre de sympathisants à coups de menaces, d’intimidations, de « pou fou deor », ou de « Nou’nn tir zot foto ek zot pou bizin reponn », alors que d’autres appellent que la campagne se passe dans le calme jusqu’à la proclamation des résultats.
Des internautes allèguent également avoir vu des activistes politiques distribuer des coupures de banque (Rs 1 000, Rs 2 000) à des électeurs potentiels dans plusieurs régions. « Certains agents se promènent au vu et au su de tout le monde avec des valises remplies d’argent. Kot sorti sa bann larzan-la ? », peut-on lire sur les réseaux sociaux. Certains en font même le sujet de railleries. « Pa ankor ariv dan nou vilaz. Pa tarde do ! » disent d’autres sur un ton moqueur. Et dans certains villages, « manze bwar » sont distribués gratuitement par les agents politiques à la nuit tombée.
Certains dénoncent aussi que « ape aste kart idantite ziska Rs 20 000 ». Des observateurs politiques tentent d’appeler au calme avec des arguments justifiés. « Il n’est pas utile de se battre ou de se bagarrer à cause d’un politicien. Car après avoir été élu, il ne se souviendra plus de vous », écrivent avec justesse des internautes.
Ce qui peut toutefois jouer au trouble-fête, c’est le taux d’abstention, qui risque d’être élevé. Il est clair que certains, déçus et frustrés par le gouvernement régional de l’Alliance, décideront tout simplement de ne pas exercer leur droit civique, car ils ne voteront en aucun cas pour l’OPR. Il en va de même pour certains sympathisants de l’OPR. « Mo pou kass enn poz trankil lakaz. Mo pa pou al fatig mwa avek politisien mwa. Zot ki pou asize gagn larzan apre. Mwa mo pou dan bez mem mwa », soutient le Rodriguais lambda.
Cependant, il convient de reconnaître que le MR a fait une remontée considérable et inattendue dans certaines régions, après sa défaite cuisante de 2019, où le PMSD Rodrigues est devenu le deuxième plus grand parti de l’île, derrière l’OPR, battant à plate couture le MR, qui jusque-là occupait cette position.
Mais l’os le plus dur à avaler pour tous les protagonistes sur le terrain demeure l’OPR, car ce parti a déjà prouvé dans le passé que quand sa machinerie électorale se met en branle avec toute sa structure, il est difficile de faire face à un « rouleau compresseur » de cette envergure, qui est capable, à lui seul, de tout broyer sur son passage.
Pour certains, l’OPR part favori avec son slogan Korize Nou Ale . Alors que pour d’autres, l’Alliance a déjà gagné d’avance avec son Nou Pil Lor Zot. Toutefois, il serait plus sage de se méfier des surprises de dernières minutes. Après tout, l’électeur est le seul maître de ses choix. Dans l’isoloir, il est le seul souverain le jour du scrutin.