MUBARAK SOOLTANGOS
Le triste événement du décès de Ruwaidah à 13 ans, en phase de grossesse, fait la une de l’actualité depuis deux semaines. Toute l’Ile Maurice est interpellée soit pour son acceptation des mœurs sociales hors du commun, soit pour son incapacité à gérer le problème de la sexualité précoce qui souvent mène à des grossesses indésirées.
Cependant, cette affaire a un dessous pernicieux qui est beaucoup évoqué en privé et qui, malheureusement, a atteint les médias. Le nom Ruwaidah donne lieu à un amalgame, selon moi, au bord de la malhonnêteté. Sinon, comment expliquer que les demandes d’explication ne sont faites qu’à des personnes de foi musulmane, hier un Imam, aujourd’hui un politicien de la même ethnie alors que dans d’autres cas on ne s’intéresse pas aux opinions des dignitaires religieux. Ce phénomène de société, on en a fait un problème musulman. Puisque c’est un fait mondial qu’à chaque fois qu’un musulman fait une entorse ou commet une abomination, de son propre chef, on pointe un doigt accusateur vers l’Islam; je vais donner le point de vue islamique sur cette affaire.
Le Saint Coran dit à ce propos qu’on doit attendre l’âge de ‘maturité’ avant de se marier. La maturité, physique et intellectuelle, est un stade bien au-delà de la puberté, et si le Coran voulait dire l’âge de la puberté, il l’aurait spécifié clairement. Les parents sont libres, comme cela s’est pratiqué en Inde millénaire, de contracter un mariage pour leur fille sous réserve qu’elle ne cohabite pas avec son mari avant l’âge de la maturité. Le ‘Fiqh’ (jurisprudence islamique) donne droit, cependant à la fille de résilier ce mariage si à sa maturité, elle refuse de partager sa vie avec le mari désigné. Le consentement est obligatoire dans le mariage islamique, et qui dit consentement dit aussi le droit de rejeter le choix de ses parents si la mariée désignée n’y consent pas.
Quant à la définition de l’âge de maturité, le “Fiqh Hannafi” (jurisprudence de l’Imam Abu Hanifa), à laquelle la grosse majorité des musulmans adhère, dit qu’il n’est pas donné à tout un chacun de le fixer, mais seulement à l’État. Le Coran spécifie par ailleurs que nous sommes dans l’obligation d’obéir à ceux ‘qui sont en autorité’. À Maurice, les autorités ont fixé l’âge minimum du mariage à 16 ans. C’est une loi juste, pas en contradiction avec l’Islam, à laquelle tout citoyen, musulmans ou pas, doit obéir. Nous ne pouvons demander une mini-constitution pour chaque groupe religieux comme semble le soutenir Ismaël Nazir.
Cet amalgame de mariage précoce avec l’Islam trouve son origine dans le fait que le Prophète Muhammad (pssl) avait contracté le mariage avec Hazrat Ayesha un an avant l’Hégire (émigration à Médine) alors qu’elle avait neuf ans. Hazrat Ayesha l’a rejoint dans son couple après quatre ans, alors qu’elle avait 13 ans, sans qu’elle se soit prévalue de son droit d’annuler le mariage. Étonnamment, il n’existe qu’une seule instance dans l’histoire de la vie du Prophète, notamment dans le livre de Traditions “Sahih Bukhari” où la vie conjugale à 13 ans d’Ayesha est mentionnée. Cet âge ne trouve confirmation dans aucune autre source, et il y a, au contraire, plusieurs autres sources historiques qui fixent l’âge de son mariage à 20 ans. L’avis du narrateur de Sahih Bukhari n’a apparemment été retenu uniquement qu’en vertu de sa réputation d’homme digne de confiance et n’a pas été contesté.
Mais puisque la perception générale, quoiqu’invraisemblable, est que Hazrat Ayesha a vécu avec le Prophète à partir de l’âge de 13 ans, je vais aussi donner une explication à cela. Ce mariage a été contracté à une époque où c’était pratique courante. Aujourd’hui, un tel fait peut paraître choquant (alors qu’on reste hypocritement silencieux sur la pratique de la sexualité à grande échelle à cet âge dans le monde) mais il ne l’était pas à l’époque. Les coutumes et usages étaient différents, et nous ne devrions pas juger ce qui s’est produit alors, par nos usages modernes. Il est aussi un fait que, dans certains pays, le climat et la nourriture font que les filles atteignent la maturité à un jeune âge.
J’espère que mes précisions ont fait la lumière sur le point de vue islamique et que les gens s’abstiendront de pointer du doigt l’Islam sans connaissance de cause.