Des pêcheurs lançant leurs filets dans les eaux chatoyantes de Mahébourg, des pirogues dormant sur le sable, des cases créoles dont il ne reste qu’une poignée dans l’île, des flamboyants bordant une allée où passent des femmes revenant du champ et une charrette à boeufs, avec en toile de fond une montagne. Les thèmes de prédilection de Kishan Jagunduth Beejadhur révèlent sa nostalgie pour des paysages typiques d’antan, non exploités encore par le tourisme. Si les thèmes sont classiques, les tableaux, eux, nous les font voir avec un regard neuf. La preuve : les tableaux du peintre sont de plus en plus sollicités dans les diverses galeries, particulièrement en ce moment, en prélude à l’ouverture du Centre commercial de Bagatelle.
Cela fait une vingtaine d’années que Kishan Beejadhur vit de sa passion. Dans son douillet atelier aménagé à l’étage de sa jolie maison fleurie à Mahébourg, les thèmes qu’il exploite sont des lieux communs. Mais, ce qu’il en fait peut être comparé à un vieil objet rouillé qu’on aurait nettoyé et astiqué encore et encore jusqu’à ce qu’il resplendisse dans toute sa beauté. Ce qui fait que le public n’est jamais lassé. Ses oeuvres, au contraire, frappent par l’impression qu’elles donnent de se retrouver devant la scène dépeinte et de pouvoir y pénétrer. Mais aussi par leurs couleurs, leur lumière et la mise en relief des petits détails qu’il réussit grâce à la maîtrise du couteau et de la peinture à l’huile. Au début, confie le peintre, « j’utilisais une lame de rasoir qui m’aidait à affûter mes crayons. Quand j’ai vu qu’il manquait quelques détails dans ma peinture, j’ai cassé la lame en deux pour faire une retouche et j’ai vu que cela apportait un joli effet. Ensuite, j’ai découvert le couteau que je manie depuis une vingtaine d’années ». Pour utiliser cet accessoire, selon Kishan Beejadhur, il faut être sûr de soi car « la couche de peinture étant épaisse quand on utilise le couteau, on ne peut rectifier une fois qu’on a travaillé ».
Comme bien d’autres enfants qui sont attirés par la peinture, l’amour pour cette matière a débuté de la même manière chez Kishan Beejadhur. Et une fois au collège, l’initiation à l’art devient une matière, à ses yeux, « plus importante » que les autres. Quelques années après, en Form IV et Form V, il reçoit même des commandes des « élèves et des profs ». C’est là qu’est né « un désir de devenir artiste peintre ». Comme il est autodidacte, il fait l’acquisition de manuels et se familiarise davantage aux styles des grands peintres tels Rembrandt et Miller. Il s’inspire également des peintres impressionnistes, style dont il s’influence toujours aujourd’hui. Au niveau des couleurs, « j’ai été voir du côté de Manet et de Renoir ». Aujourd’hui, ses travaux relèvent davantage du figuratif.
En cachette
« À la maison, quand je peignais, la famille n’était pas très contente car l’art n’était pas bien vu. C’est donc surtout à l’école que je peignais et en cachette à la maison », raconte-t-il, avec un sourire puéril que le souvenir de ses vécus d’enfance fait réapparaître. Mais, rien à l’époque ne laissait présager qu’il gagnerait sa vie uniquement à travers la peinture « car ce n’est pas donné à tout le monde ». Avec humilité, il attribue cela à « la chance d’avoir des gens qui sont intéressés par mes peintures ».
RENCONTRE: Kishan Beejadhur, peintre nostalgique des paysages folkloriques
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