Béryl, la première magicienne mauricienne

À partir de cette semaine, aura lieu au Caudan Arts Centre, MISDIRECTION, le premier Festival de Magie de l’île Maurice. Nous sommes allés à la rencontre de son organisatrice et productrice, Béryl Trupin, qui est également la toute première magicienne mauricienne.
Fille de la chanteuse mauricienne Brigitte Camoin et du magicien français Patty Bad, Béryl dit avoir été influencée par ses deux parents. « J’ai hérité de la rigueur de ma mère dans le travail et de la passion de mon père pour la magie.

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Depuis petites, ma sœur et moi vivions dans les coulisses des spectacles de magie que notre père présentait dans son cabaret. Nous étions tout le temps fourrées dans les loges des artistes. Et puis, quand j’ai eu 14 ans, mon père m’a emmenée aux Championnats du Monde de Magie à Stockholm. C’était la plus grosse manifestation de magie au monde où la profession vient présenter ses derniers numéros, où l’on peut se procurer les dernières innovations magiques et où, surtout, les agents recruteurs signent des contrats avec les artistes pour les spectacles à travers le monde. C’était une semaine de concours, de conférences et de galas. C’est là que je me suis rendue compte que la magie, c’est un travail sérieux et que je voulais le faire pour pouvoir, un jour, participer en tant qu’artiste à ces championnats. »

Est-ce que la magie repose sur un don mystérieux au départ, ou alors est-ce que ce sont des techniques qu’il fait apprendre et maîtriser ? « La magie est un art reposant sur des techniques. Évidemment, il faut avoir un don et développer ce don, et ça demande autant de travail qu’un pianiste, qu’un musicien, qu’un danseur ou que tout autre artiste. » Et comment avez-vous appris : en vous inscrivant tout simplement à une école de magie ? « Aujourd’hui, avec internet, on peut accéder de manière plus simple à la magie qu’autrefois. Moi, quand j’ai commencé, je n’avais pas tout ça. J’avais un papa magicien qui m’a appris à être autonome. Il m’a dit : tu veux être magicienne, très bien, apprends à le devenir en lisant, en étudiant tel et tel livre, en pratiquant les tours. Il regardait en tant que critique quand je présentais un numéro, mais il ne m’apprenait pas à en faire. J’ai appris toute seule dans les bouquins et les dvd de l’époque, et puis avec les amicales de magiciens. Par la suite, j’ai fait partie de l’Équipe de France de Magie pour aller représenter le pays aux championnats du monde. Je suis restée trois ans dans cette équipe où j’ai beaucoup appris. »
Tout ça ressemble à une profession normale dans laquelle on apprend, on passe des concours, on entre dans une équipe. Où se situe la magie, alors ? « Le numéro qu’on montre au spectateur doit dégager une émotion qui emportera le public dans le merveilleux, dans l’émotion magique. Il faut parvenir à insuffler une émotion à la technique de base… et ça prend des années de travail ! Il faut apprendre à écrire, à scénariser, à avoir une connaissance de la chorégraphie et des jeux de lumières, car la magie est un art total qu’il faut mettre en scène. Pour cela, il faut posséder une sensibilité de création particulière. »

Ces qualités, Béryl doit les posséder puisqu’elle se produit sur scène depuis qu’elle a 18 ans dans des spectacles, d’abord, en vedette américaine avec un seul numéro, puis dans des galas en groupe, des événementiels, des concours, avant de monter son One woman show, un numéro avec, entre autres, des ballons dont elle est très fière. « C’est la réalisation d’un rêve que j’ai pris des années à monter entre contraintes techniques et difficultés financières, mais j’ai réussi à voler avec des ballons sur scène et au-dessus des spectateurs. »

Quel est le numéro de magie qui restera associé à Béryl, la première magicienne mauricienne ? « Aucun en particulier, parce que je suis associée à plusieurs numéros et que je suis en perpétuelle évolution. J’en ai créé plusieurs et j’ai réalisé, après coup, que chacun d’entre eux, qui ont tourné et obtenu des prix, correspond à une étape de ma vie. Ça prend toute une vie pour maîtriser cet art, parce que c’est un apprentissage permanent. »

« Je crois que le public mauricien est prêt pour des spectacles d’art magique de très haut niveau »

On peut être magicienne tout en étant féministe dans cette profession où la femme est largement minoritaire ? « Pendant longtemps, dans le monde de la magie, la femme a été une collaboratrice qui passait au magicien ses accessoires. C’était généralement une jolie fille sexy et un peu potiche. Quand j’ai commencé, je n’ai pas voulu entrer dans ce cliché et j’ai créé History Mask, un numéro où j’apparais masquée. Je voulais qu’on me juge sur mon talent, pas sur mon physique. » C’est aujourd’hui chose acquise puisque la réputation de Béryl est bien établie et qu’elle est traitée en égale par ses collègues.

Est-ce que la magie est une profession qui nourrit celui ou celle qui la pratique ? « Bien sûr et on peut très bien en vivre. C’est une niche et la demande est bien supérieure à l’offre, surtout quand, comme moi, on fait un peu de tout : des grands galas en passant par les fêtes d’entreprises, les soirées privées, les compétitions et le One woman show. Ça marche très bien pour moi en Europe. » Si c’est le cas, pourquoi venir présenter un spectacle à Maurice où le public est très restreint par rapport aux capitales ou aux grandes villes européennes ? « Tout d’abord, parce que je suis Mauricienne. Ensuite, parce qu’il existe un bon public pour la magie à Maurice. La preuve : le spectacle LÀ-HAUT que j’ai présenté en mars dernier est celui qui a rassemblé le plus de spectateurs au théâtre du Caudan jusqu’à maintenant. Des deux spectacles prévus au départ, on en a finalement présenté 13, un record de représentations sold-out au Caudan Arts Centre depuis sa création ! »

Comment est-ce que la magicienne explique ce succès ? « Je crois que le public mauricien est prêt pour des spectacles d’art magique de très haut niveau. J’étais déjà revenue à Maurice avant pour participer à des fêtes, des spectacles privées dans des hôtels, mais je n’avais jamais fait de la scène devant un grand public. J’ai été bluffée par l’accueil qui m’a été réservé et c’est pendant LÀ-HAUT que j’ai annoncé que j’allais revenir pour organiser un spectacle de magie ; mieux : le premier festival de magie de l’île Maurice. Je tiens ma promesse avec MISDIRECTION et le public mauricien est au rendez puisque nous devons déjà ajouter une nouvelle date à celles qui étaient prévues. »

Que signifie le titre du spectacle, MISDIRECTION ? « La misdirection est la capacité du magicien de faire entrer le public dans un monde merveilleux. En fait, c’est un détournement d’attention : on dit au public de regarder à gauche alors qu’en fait, il se passe quelque chose à droite. Ce festival regroupe des magiciens qui ont obtenu des prix dans les festivals internationaux et qui présenteront des numéros dans diverses catégories de magie. Depuis la magie comique, en passant par le close up, la magie de proximité, la manipulation, des numéros d’ombre, de quick change, sans oublier les grands classiques. »
Pour ce premier Festival de Magie à Maurice, Béryl sera entourée de Maxime Minerbe, Hugues Protat, Pathy Bad, Mr Triton, Oscar Baraldi, Yannis Why et Jimmy Delp, des noms connus dans le monde de la magie. Est-il facile d’organiser un tel festival, est-ce qu’il suffit de claquer les doigts et de réciter une formule secrète pour que les choses se mettent en place… comme par magie ? « Pas du tout ! Monter un festival de magie est comme créer un numéro : ça prend du temps et il faut avoir de la passion, de la patience et ne pas avoir peur de prendre des risques.

La mise en place du festival a été difficile d’autant plus que nous avons eu moins de sponsors qu’attendus. Mais ceux qui nous soutiennent ont été formidables et heureusement que le public mauricien a répondu présent au niveau des réservations ! Nous allons le remercier en lui proposant un spectacle qui l’emportera dans le monde du merveilleux de la magie, en lui donnant le meilleur de ce que nous savons faire. »

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