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Centres « marron » et État policier

Nadeem Permessur (48 ans) et Mohamad Sayfuddin (Salman) Sauterelle (21 ans) ont trouvé la mort dans des circonstances atroces. Dénominateurs communs entre ces victimes : primo, ils combattaient une dépendance aux drogues et, secundo, ils avaient été confiés à des centres autoproclamés de structures d’aides et de traitements pour addictions. Autoproclamés, car comme l’a bien qualifié le travailleur social Ally Lazer, ces centres ne sont ni reconnus ni enregistrés par l’État. Donc, ils opèrent comme des centres « marron ».

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Ce n’est pourtant pas la première fois que l’on entend parler de ces centres clandestins. Ces dernières années, à diverses reprises, quelques « rescapés » et « évadés », carrément, ont témoigné, preuves à l’appui, de ce qu’ils qualifient de « lieux de tortures », de séquestration et d’autres supplices. Les décès de ces nouvelles victimes ne constituent donc nullement une information inédite pour les services gouvernementaux. Les centres de traitement pour addictions tombent d’ailleurs sous la responsabilité directe du ministère de la Santé. Qu’à fait ce gouvernement pour réprimer ces prétendus « docteurs miracles » qui, dans certains cas, usent de religion, de force extrême, de violences même, entre autres « formules » pour guérir les addictions ? Rien ! Que nenni. L’OMS a défini l’addiction comme une pathologie, et donc une maladie. Pas un travers que l’on guérit à coups de gourdins ou autres…

Avec la mort de Nadeem Permessur dans les locaux de l’un de ces centres, et le fait que le corps de Salman Sauterelle ait été retrouvé dans la banlieue de la capitale, dans une région infestée par la drogue, alors que sa mère l’avait confié à un centre situé à Vacoas, pousse le ministère de la Santé dans une chasse aux sorcières. Mieux vaut tard que jamais, ou après la mort, la tisane ? Parce que ces deux morts auraient pu être évitées. Parce que s’il avait eu la volonté, le ministre aurait dû et pu avoir pris des mesures bien avant.

Maintenant que le réveil a sonné dans les bureaux de la Santé, le message circulé est de décourager les parents à confier leurs enfants et proches à ces centres « marron », et de les diriger plutôt vers ceux qui sont dûment enregistrés et reconnus par l’État. Cela semble évidemment couler de source !
Par contre, ce que le ministère de la Santé ne dit pas, c’est qu’il n’y a, à ce jour, dans le pays, qu’une poignée de ces centres enregistrés. Et de ce déjà petit nombre, il n’y en a que deux ou trois qui peuvent offrir des traitements contre les addictions en résidentiel. Le public ne sait pas non plus que, malgré tous efforts conjugués, les appels de ces centres d’augmenter leurs ressources humaines et capacité financière restent lettre morte. Et que, par incidence, ces centres, qu’il s’agisse des prestations en ambulatoire ou en résidentiel, se retrouvent avec des listes d’attentes de victimes de tous âges, hommes et femmes, venant de toutes les régions du pays. Alors comment satisfaire tous ces demandeurs ?

Et le ministère veut que ces parents ne confient pas leurs enfants à des centres « marron » ? Combien connaissent le calvaire et l’enfer que vivent ces parents au quotidien ? Oui, ces parents ont eu tort de laisser leurs parents et proches entre les mains de « charlatans ». Mais dans le désespoir, quand on sent que l’on va se noyer, ne se raccroche-t-on pas à la moindre brindille ? Rs 20 000 en échange de retrouver son enfant/proche « clean » n’est alors pas cher payer…
Ceci n’excuse nullement qui que ce soit. Il s’agit avant tout de comprendre la détresse et la désespérance de ces mères, pères, frères et sœurs et enfants de toxicomanes. Qu’ils soient accros au Brown Sugar ou aux drogues synthétiques, ces victimes infligent chaque jour un enfer à tous autour d’eux, tandis qu’eux s’autodétruisent. Depuis plusieurs mois maintenant, travailleurs sociaux et société civile ont mis en avant les souffrances des parents. Qui depuis des décennies durant pleurent des larmes de sang. Qu’à fait l’État jusqu’ici pour eux ?

Par ailleurs, l’on ne peut passer sous silence le traitement abusif qui a été réservé aux manifestants de Rann Nu Later cette semaine. Encore des signes d’une fin de règne et d’un gouvernement fonctionnant comme un État policier ?

Husna Ramjanally

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