Maurice, avec une zone économique exclusive de 2,3 millions de kilomètres carrés, n’aurait pas dû être dépendante de l’importation de poisson. C’est ce que relève le rapport de l’Audit qui déplore une absence de stratégie efficace pour développer ce secteur. L’économie bleue n’a jamais décollé et les projets d’aquaculture sont en suspens, relève le rapport.
Le Directeur de l’Audit estime que le ministère de l’Économie bleue aurait dû prendre les mesures nécessaires pour exploiter davantage les ressources de la Zone Economique Exclusive (ZEE). L’importation de poisson est passée de 113 462 tonnes pour l’année financière 2021-2022 à 130 008 tonnes en 2023-2024. Les importations de la dernière année financière s’élèvent à Rs 12,6 milliards.
Le rapport déplore le fait que le ministère n’a pas développé de plan stratégique efficace pour booster la pêche locale. L’une des raisons étant le changement fréquent d’Accounting Officers, qui ne permet pas de faire le suivi. Il y a également un fossé entre les prévisions du ministère et la demande réelle sur le marché. L’absence de professionnels formés dans le domaine au ministère est aussi regrettée.
L’Audit relève l’absence d’une évaluation des ressources halieutiques non-exploitées. De même, différents budgets avaient fait provision en vue d’octroyer des permis pour l’exploitation de ces ressources, mais cette démarche ne s’est jamais concrétisée. La raison évoquée est que le ministère n’avait pas des conditions claires rattachées aux permis. Ce qui implique que le ministère est passé à côté d’une opportunité économique et que le pays sera toujours dépendant de l’exportation. Le ministère a toutefois indiqué qu’il n’ira pas de l’avant avec ce type de permis.
Le rapport indique également que le National Ocean Council n’est toujours pas opérationnel et que le Fishermen Investment Trust a été démantelé après des années d’inactivité. Ce qui a laissé un fossé critique en matière d’économie bleue. Une situation qui découle d’une absence de direction stratégique du ministère, souligne le rapport.
L’absence d’initiative pour la pêche démersale est également déplorée. Actuellement, ce sont les pêcheurs locaux qui exploitent ces ressources et les prises sont évaluées à 6 000 tonnes par an. L’Audit recommande au ministère de mettre sur pied une stratégie efficace pour la pêche démersale.
Au chapitre de l’aquaculture, le rapport relève que la production a enregistré une baisse de 7,3% au cours de l’année financière 2021-2022 et de 5,7% lors de l’année financière 2023-2024. Les raisons étant les délais dans la mise en application des projets, l’absence de suivi et la mauvaise utilisation des ressources.
L’Aquaculture Master Plan de 2006 n’a pas été appliqué ces dernières années. Depuis 2018, il n’y a plus de projet d’aquaculture dans le lagon. Trois projets hors du lagon ont été mis en veilleuse, un nouveau cadre légal étant en préparation. Le rapport recommande la finalisation de ce cadre légal au plus vite afin de relancer la production.
Par ailleurs, le programme de régénération du lagon qui consiste à relâcher en mer, des petits poissons élevés en bassin, n’a pas donné les résultats escomptés. Des manquements au niveau de la surveillance ont été relevés, ce qui laisse penser que la pêche illégale n’a pas permis de collecter des données exactes.
Il en est de même pour le projet d’aquaculture destiné à l’élevage du cordonnier. Dix cages avaient été octroyées à des coopératives de pêcheurs. Celles-ci ont été endommagées par le cyclone Berguita en 2018 et n’ont pas été remplacées. Dans la foulée, le rapport fait également ressortir la mauvaise gestion des barachois. Des 21 barachois que détient le ministère, seuls 10 sont sous son contrôle et deux seulement sont en opération. Là encore, le rapport déplore un manque de décision politique.
PME
Dans l’attente du Risk
Management Framework
Sur le développement des petites et moyennes entreprises (PME), se référant au précédent rapport de l’Audit de 2022/23, l’Audit avait trouvé en octobre 2023 que la division des PME du ministère concerné n’avait pas encore élaboré de cadre de gestion des risques (Risk Management Framework).
Par conséquent, l’identification et la gestion des risques n’ont pu être effectuées. L’Audit recommande que l’Accounting Officer établisse une Framework Strategy pour la gestion de risques dans un délai raisonnable. La composition et le mandat du Comité de gestion des risques, y compris les rôles, les responsabilités et l’obligation de rendre compte, devraient être clairement définis et approuvés.
En janvier dernier, il a été constaté que le Risk Management Committee a été mis sur pied en octobre 2024, et que le Risk Management Framework serait finalisé dès que les officiers faisant partie du RM Committee complèteront le programme de formation au ministère du Service public, donc ce projet est considéré comme partly implemented.
Par ailleurs, sur le plan de la gouvernance et du respect des lois, le National Audit Office (NAO) a tiré la sonnette d’alarme à l’effet que les états financiers de la Small and Medium Enterprises Development Authority (SMEDA) pour les périodes du 1er janvier 2016 au 30 juin 2017 et du 1er juillet 2017 au 18 janvier 2018 n’avaient pas été soumis à l’Audit et avait recommandé que le ministère exerce un contrôle sur les Statutory Bodies et veille à ce qu’ils s’acquittent de leurs responsabilités légales en ce qui concerne l’établissement des états financiers, leur soumission à l’audit et leur transmission à l’Assemblée nationale. Entre-temps, les états financiers pour la période concernée ont été référés à l’Audit.
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National Wholesale Market
La mauvaise planification à l’Agro-Industrie dénoncée
La mauvaise planification du projet de création du National Wholesale Market (NWM) est dénoncée par l’Audit. La mise en place de ce projet fait suite à la demande des producteurs afin de disposer d’un système de vente en gros et de vente aux enchères moderne et adéquat. Toutefois, le coût du projet – initialement estimé à Rs 707 millions – a été ramené à Rs 390 millions afin de ne pas retarder sa mise à exécution et d’être en mesure d’aller de l’avant avec la construction du bâtiment principal.
Le NWM a été remis à l’Agricultural Marketing Board le 27 décembre 2021 mais n’a été inauguré que le 27 juillet 2023. Au 30 juin 2024, l’AMB avait déboursé Rs 128 941 532 pour achever tous les travaux auxiliaires du NWM.
Coûts supplémentaires
Après la remise du site en 2021 tous les travaux auxiliaires, y compris le forage, la fourniture, l’installation, les essais et la mise en service de la station d’épuration des eaux usées et du générateur de secours, l’achat d’ordinateurs et de logiciels pour NWM, entre autres, ont dû être entrepris par l’AMB au coût total de Rs 98,5 millions.
Par ailleurs, les revenus de Rs 10 259 400 générés au cours de l’exercice 2023-24 n’ont pas couvert les dépenses de fonctionnement et administratives de Rs 24 366 824 encourues par l’AMB. L’audit constate que le contrat de bail pour le NWM n’est pas encore finalisé. Le NWM, d’une superficie de 35 000 m2, a été construit sur un terrain de l’État, sans aucun contrat de location.
Le 1er août 2024, le ministère du Logement et de l’Aménagement du territoire a envisagé d’accorder un bail industriel de 60 ans à l’AMB afin que ce dernier puisse demander un permis de construire et d’occupation des sols pour commencer la construction d’ouvrages complémentaires sur site, à savoir une cantine, un nouveau bureau et des poteaux de portail électriques. En septembre 2024, le titre de propriété n’était toujours pas formalisé. Le contrat pour des travaux supplémentaires au NWM a donc été maintenu en suspens.
Le 29 mars 2023, l’AMB a attribué le contrat pour la construction d’une station d’épuration des eaux usées (STP) à une entreprise pour un montant de Rs 25 158 751. Cependant, lors de l’exécution du projet, il a été constaté qu’aucune disposition n’était prévue dans le dossier d’appel d’offres pour des travaux de câblage électrique afin d’alimenter l’équipement en électricité. Par conséquent, des fonds supplémentaires ont dû être alloués aux travaux de câblage de l’équipement STP.
Le 6 juin 2024, l’AMB a demandé des fonds supplémentaires à hauteur de Rs 2,5 millions pour l’achèvement des travaux supplémentaires, mais les fonds n’ont pas été mis à disposition.
D’autre part, non seulement le nombre de parkings prévu est nettement insuffisant mais une partie de l’espace parking est utilisée pour la vente aux enchères des fruits. Ce qui complique la situation et donne lieu à des embouteillages à l’entrée du BWM.
Par ailleurs, il n’y a pas de système d’élimination des déchets approprié. Des légumes pourris étaient empilés dans un coin de l’enceinte, ce qui provoque des odeurs nauséabondes. Le bureau de l’audit a fait une série de recommandations pour remédier à la situation.
Par ailleurs, le rapport de l’Audit a constaté une baisse dans la production de poussins au Poultry Breeding Centre (PBC). En fait, il y a eu une baisse de 54 % des œufs destinés aux couveuses. Le volume de vente des unités de poulets est passé de 252 307 en 2022-2023 à 118 346 en 2023-2024, soit une baisse de 53%.
L’année dernière, en raison de la présence de la salmonelle, la production des poussins ainsi que la vente des poussins ont été interrompues. Les volailles ont été incinérées alors que quelque 58 422 œufs ont été détruits. Le rapport a souligné que l’officier responsable de PBC n’avait pas de plan de biosécurité et d’entretien à jour.
Le rapport de performance du ministère de l’Agro-Industrie et de la sécurité alimentaire pour l’année financière 2023-2024 n’avait pas été soumis au terme du délai de 31 octobre 2014. De plus, les rapports financiers de pas moins de sept corps para étatiques tombant sous la responsabilité du ministère n’ont pas été soumis au bureau de l’Audit pour les besoins du présent exercice.