Entêtant, ce refrain de Tiken Jah Fakoly qui martèle le crâne ces jours-ci, avec tout ce qui se passe autour de nous. Plus rien ne nous étonne, en effet. Au fil des semaines, les innombrables scandales, d’une part, et de l’autre ces sorties sans vergogne de politiques, voire même du Premier ministre, qui s’y est mis cette semaine, tantôt encore de compatriotes occupant des postes constitutionnels, comme le CP Dip, sont à la fois inquiétants, peu ragoûtants, souvent révoltants, et surtout choquants !
Au chapitre des scandales, il y a ces luxueuses villas de rêve, avec parfois piscine, aux intérieurs cossus et dorés, que l’on découvre via les médias classiques et les réseaux sociaux surtout. Avec le but principal, évidemment, de les diffuser le plus largement possible, comme pour bien s’assurer qu’un max de gens voient bien toute cette extravagance qui s’étale sous leurs yeux… Et il y a encore ces propriétés privées, bien cachées des regards, ce ranch, ces berlines, ces yachts ou autres engins hors de prix. Tous ces signes extérieurs de richesses (mal acquises) dont on prend plein les mirettes. Comme pour dévier notre attention et que l’on ne se demande pas « mais comment tout cela a-t-il pu perdurer durant toutes ces années » ?
Puis il y a le Premier ministre, qui s’en est pris, même s’il n’a pas été aussi direct qu’Anil Kumar Dip, au bureau du DPP. La libération conditionnelle de l’activiste social et politique Bruneau Laurette énerverait-il à ce point les uns et les autres que l’élégance et la diplomatie en soient devenus… caducs ? Aurait-on imaginé un chef de gouvernement s’en prendre avec autant de virulence que Pravind Jugnauth l’a fait – et à deux reprises cette semaine – à des institutions et des hommes/femmes, qu’il ne nomme pas, mais que nous n’avons aucune peine à deviner ?
La séparation des pouvoirs ne serait-elle plus que chimère ici ? Si le judiciaire est le dernier rempart contre les abus de toutes sortes, peut-on en dire autant de l’exécutif et du législatif ? Ce que le citoyen lambda se demande, c’est pourquoi autant d’acharnement envers le DPP Rashid Ahmine et la magistrate Jade Ngan Chai King, qui a pourtant élaboré ces conditions ultra-strictes pour la remise en liberté de Laurette ? Heureusement qu’il existe encore quelques derniers Mohicans pour qui la notion de “gentlemanship” détient toute sa valeur !
Doit-on s’offusquer des chants à forts relents communaux à l’égard d’une communauté par les prétendues « élites » de notre système scolaire ? La polémique concernant ce groupe d’étudiants du RCC fait rage. Mais est-ce bien surprenant ? De réforme en réforme, notre scolarité fait de moins en moins de place pour le développement des valeurs humaines de nos enfants.
La réaction (tardive) du ministère de l’Education qui, pour être politiquement correct, est « choqué », s’axe autour de l’annulation du prochain Sports Day (sic) du collège, qui sanctionne ainsi tous les étudiants. Quelle est la logique derrière cela ? Le sport, c’est connu, aide à la construction d’un esprit d’équipe. Et pourquoi punir tous les élèves, quand on sait qui sont ceux « ki’nn fote » ?
Encore une fois, le Conseil des Religions a parfaitement raison de réclamer le retour de l’instruction des valeurs morales. Ce qui équivaut à accepter, en même temps, que parents et enseignants ont, sur ce plan, failli à leur mission. Pas tous, bien évidemment. Mais un bon nombre, hélas !
Dans sa chanson Plus rien ne m’étonne, Tiken Jah Fakoly déclare : « Ils ont partagé le monde. » Chez nous, ils ont dilapidé le bonheur de notre peuple bigarré, sa pluralité formidable, sa beauté métissée… et jouent avec sa paix légendaire. Il y a certes une sacrée beauté de voir toutes ces communautés vivre « in peace, justice and liberty » sur notre petit lopin de terre de l’océan Indien. Mais pour des pyromanes, cette diversité peut devenir le couteau qui blesse au plus profond d’une plaie encore ouverte. Nous avons eu la bagarre raciale sanglante de 1967 et les émeutes de février 1999. À la quasi-unanimité, les Mauriciens disent : « Assez ! »
Nos 55 ans d’indépendance démarrent sur des notes bien tristes. Méritons-nous cela ?
Plus rien ne m’étonne !
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