Si beaucoup d’entre nous se préparent au déconfinement annoncé par le Premier ministre pour le 4 mai prochain, si la situation le permet bien entendu, dans le même souffle, ils sont tous aussi nombreux ceux qui abordent avec scepticisme cette nouvelle étape. Et pour cause : peut-on envisager un « retour à la normale » quand on sait que la situation, tant ici, chez nous, que dans la région, et pire sur l’échiquier international, est totalement bouleversée ? Toutes les données ont changé. La pandémie de Covid-19 a tout chamboulé !
Le la a été donné dès cette semaine avec l’annonce de la mise sous administration volontaire de la compagnie d’aviation nationale, Air Mauritius. Une compagnie qui était déjà dans le rouge, doit-on le rappeler, et dont la gestion a été, à maintes reprises, décriée par les syndicalistes et les politiques de tous bords, déplorant tous des ingérences politiques. Et sans être ainsi une victime directe du Covid-19, cette mise à l’arrêt brutal du convoyeur national ne fait qu’inaugurer, hélas, une liste de mauvaises nouvelles qui composera les semaines à venir. Une liste qu’on ne souhaite certainement pas longue. Mais comment ne pas broyer du noir avec tout le marasme économique qui s’étend de par le globe ?
Déjà, plusieurs compagnies locales ont signifié des coupes importantes et des révisions conséquentes à la baisse des salaires de leurs employés. Et n’oublions pas que de nombreux compatriotes ont carrément chômé durant ces six semaines qu’aura duré le confinement. Cette situation perdurera encore un certain temps, indiquent les observateurs sociaux et économiques. Les nombreux Mauriciens qui sont employés dans les hôtels, par exemple, ne sont pas au bout de leurs peines. Idem pour une foule d’autres métiers, où ceux qui y sont engagés ne pourront, dès la levée du confinement, retrouver une situation professionnelle classique.
C’est clair : il y a eu une période pré-confinement, et une après-confinement. Cet après, il ne se conjuguera pas forcément au même temps de ce que nous avons connu avant l’avènement de la pandémie mondiale de Covid-19. Le monde tel qu’on l’a connu jusque-là voit actuellement ses repères changer dramatiquement. Il n’y a, on ne cessera de le répéter, aucun autre précédent similaire. Ce qui amène donc une configuration inédite. Dans la mesure où on se retrouve dans un contexte de recommencement, de renouveau. Une occasion en effet de faire table rase de certaines pratiques qui se sont révélées néfastes pour le commun des mortels. Et de mettre en pratique de nouvelles, qui aideront la masse, dans son ensemble, à garder la tête hors de l’eau, le temps de travailler à une nouvelle dynamique sociale et économique.
Et sur ce chapitre, il serait indiqué de prendre en considération des réflexions et propositions de plusieurs observateurs sociaux, qui se sont déjà exprimés dessus, sans que cela ait nécessairement directement trait à notre présente condition de confinement. Citons par exemple les suggestions de Lalit en matière d’exploitation de notre territoire marin, ainsi que des terres agricoles. Deux aspects qui, d’une part, donneront du travail à nombre de ceux qui se seront retrouvés sur le pavé. Et si les développements suivent la bonne perspective, cela permettra, dans un deuxième temps, d’arriver graduellement également à une situation plus positive pour l’ensemble du pays. Les propositions relatives de Lalit ne sont pas utopiques. Elles engendrent, si elles sont bien mises en pratique, des emplois à long terme. Faisant partie de son manifeste, tel que présenté aux dernières élections générales, fin 2019, ces mesures de Lalit préconisent ainsi de remplacer les champs de cannes par des plantations agricoles, ce qui permettra de générer des emplois stables, tout en assurant la sécurité alimentaire. Sur le plan de la pêche, le parti de gauche encourage l’exploitation de la Zone économique exclusive.
Des projets pour rebâtir notre économie. Des pistes pour, dans un court terme, trouver des solutions afin que ne s’installe pas une atmosphère morose et de déprime. Une partielle sortie de secours pour éviter que l’on ne sombre dans une période marquée par l’insécurité et le danger. Car il va de soi que si le pays compte un nombre important de chômeurs, la situation du « law and order » sera rapidement… incontrôlable. Ce qui ne manquera pas de donner lieu à toutes sortes de dérapages.
On ne pense pas que Pravind Jugnauth et son gouvernement souhaitent voir le pays piquer du nez. Plusieurs politiques de l’opposition l’ont déjà déclaré : cette crise sanitaire est une période où, plus que jamais, tout le monde doit être mis à contribution. Et avoir un « think tank » comprenant nos meilleures cellules grises ne doit en aucun cas obéir aux diktats de quelques politiciens qui se croient les seuls maîtres du monde !