Pénurie de devises — Bhavish Jugurnath : « La BOM devrait accélérer ses interventions »

Après avoir déclaré à l’issue de la réunion du Monetary Policy Committee que la situation est suivie de près concernant les nombreuses critiques d’opérateurs et particuliers liées au manque de devises sur le marché, le gouverneur de la  Banque de Maurice, Harvesh Seegolam, a annoncé la mise sur pied d’un Desk dédié aux complaintes concernant disponibilité des devises « with commercial banks. »

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Harvesh Seegolam avait déclaré jeudi dernier que la roupie « continue de refléter les principaux fondamentaux économiques de l’offre et de la demande, ainsi que les mouvements des devises internationales. »  La Banque centrale est intervenue sur le marché des changes lundi 8 juillet et a vendu pour USD 50 millions à Rs 46.76. Pourtant, les préoccupations des opérateurs et particuliers perdurent concernant la disponibilité de devises sur le marché ; c’est un problème récurrent.

« La raison de cette pénurie est double : les fournisseurs de Forex tels que les bureaux de change sont confrontés à des coûts opérationnels plus élevés et il existe un problème de liquidité plus large dans l’économie », explique l’économiste Bhavish Jugurnath. L’année dernière, la croissance plus faible dans la zone euro, qui est le plus grand marché touristique de Maurice, a été l’une des causes profondes du manque de devises dans le pays, dit-il, mais cette année, le tourisme a considérablement repris.

Même s’il n’y a pas une pénurie totale de devises sur le marché, les commerçants, en particulier les importateurs, se plaignent d’avoir du mal à trouver des devises dans le circuit bancaire pour régler leurs factures. « Je pense que c’est une question d’offre et de demande. Du 3 avril au 28 juin 2024, le volume des opérations de change s’est chiffré à USD 3,1 milliards, et les achats nets se sont chiffrés à USD 127 millions », rajoute Bhavish Jugurnath.

Par ailleurs, certaines pratiques contribuent également à exacerber le problème, selon l’économiste. Ainsi, des secteurs, comme l’hôtellerie et l’industrie manufacturière, qui gèrent d’importantes réserves de devises étrangères, « ne sont pas forcément enclins à les vendre sur le marché des changes, préférant se livrer à la spéculation, d’autant que la roupie s’est fortement dépréciée ces derniers mois face à la monnaie américaine.» C’est ce qu’il laisse entendre.

Le taux de change dollar-roupie, qui était en moyenne de Rs 44.50 entre septembre et décembre 2023, est passé à Rs 45.00 en janvier 2024. Il est à Rs 46.00 depuis février 2024. « Compte tenu de cette tendance, nous sommes plus proches d’un taux de change dollar-roupie de Rs 48.00 en septembre et supérieur à Rs 50.00 en décembre. La perte par rapport au dollar est de 1,7 %, tandis que celle par rapport à l’euro et à la livre sterling est respectivement de 5,3 % et 4,7 %. Je pense que la Banque de Maurice devrait poursuivre ses interventions sur le marché et à un rythme plus accéléré », préconise-t-il.

L’économiste estime qu’il faut s’attendre que le dollar s’apprécie par rapport à la roupie dans les prochains mois. Cependant, une forte augmentation des arrivées de touristes à Maurice, couplée à des exportations élevées devrait, selon lui, améliorer la disponibilité des devises étrangères sur le marché et pourrait, par la suite, contenir une potentielle dépréciation de la roupie. « Cependant, si encore une fois l’hôtellerie et le secteur manufacturier ne vendent pas les devises sur le marché des changes et se livrent à la spéculation, cela ne résoudra pas le problème de pénurie », concède-t-il.

Commentant la décision d’opérer un Desk consacré aux doléances, Bhavish Jugurnath trouve que c’est positif mais argue que la BOM devrait également réfléchir davantage « à la manière de réduire la spéculation et d’encourager les principaux secteurs tels que le tourisme, les entreprises du global business et l’industrie manufacturière à vendre leurs devises sur le marché. »

Il ajoute que des discussions seraient en cours concernant les lignes directrices à établir sur la pratique du Forward Rate. Une initiative qui devrait contribuer à atténuer la situation de crise.

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