On the Campaign Trail : Fenêtre sur Mahébourg (No 12) et son emblématique Georges Ah Yan

L’infatigable travailleur social: « Budget pour hôpitaux 5 étoiles ailleurs, mais pas pour Mahébourg – fer leker fermal sa »

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Indépendamment de toute campagne électorale, il est le porte-voix de ce village historique du Sud-Est de Maurice, celui qui a accueilli les premiers colons au début du peuplement. Aujourd’hui, Georges Ah Yan, figure emblématique et incontournable à Mahébourg, n’a nul besoin de présentation. D’autant qu’il est constant dans sa lutte pour améliorer la qualité des services publics, notamment de la santé, en faveur des habitants du Sud-Est. Bientôt 20 ans, qu’il s’est engagé dans la lutte pour que le niveau de l’hôpital de Mahébourg soit rehaussé en vue de faciliter ceux qui en ont le plus besoin.

À la veille de la dissolution de l’Assemblée nationale et la publication des Writs pour le dépôt des candidatures et du Polling Day, Georges Ah Yan, avec l’appui de la Fédération des Citoyens Engagés, fait monter les enchères. La menace d’une grève de la faim, faute de satisfaction des demandes au niveau de ce centre hospitalier, pourrait brouiller sur le terrain les cartes des éventuels candidats de la majorité sortante en quête d’un Pravind Jugnauth 3.0.

Toutefois, il n’y a pas que le dossier de l’hôpital de Mahébourg, qui gêne, le travailleur social, fort de son expérience et de sa présence sur le train, énumère les problèmes en suspens. Il jette une phrase lourde de sens : « Il y a actuellement 850 jeunes de 16 ans à 35 ans sous traitement de la méthadone à Mahébourg. C’est alarmant ! »
Une fenêtre sur chef-lieu du Sud-Est, qui en dit long, avec Georges Ah Yan.

En 2002, vous avez milité contre la fermeture de l’hôpital de Mahébourg. Plus de 20 ans après, vous réclamez un meilleur service. Que s’est-il passé pendant tout ce temps ?
Je dois dire qu’il n’y a pas eu de grands changements. Le 15 mars 2002, le ministère de la Santé, alors sous la responsabilité d’Ashock Jugnauth, avait pris la décision de fermer l’hôpital de Mahébourg et le transformer en un dispensaire. Pour les soins plus importants, il fallait aller à Rose-Belle. Nous n’étions pas d’accord car il y avait beaucoup de personnes habitant le long de la côte Sud-Est, des villages éloignés comme Grand’Sable ou Bambous-Virieux, pour qui le trajet jusqu’à Rose-Belle était long. Imaginez ce que cela représentait en cas d’urgence.

Après quatre années de lutte, nous avons appris que d’après les règlements de l’Aviation civile internationale, il est obligatoire d’avoir un hôpital dans un rayon de 5 kilomètres autour de l’aéroport. Or, l’hôpital de Rose-Belle est situé à 9 km. Seul l’hôpital de Mahébourg répondait à cette exigence. J’ai menacé d’alerter l’Aviation civile internationale. Ashock Jugnauth m’a dit que j’étais antipatriote. Je lui ai répondu : ‘si pou mor nou mor ansam’.

C’est ainsi qu’il a été contraint de ne pas fermer l’hôpital de Mahébourg. Nos députés à l’époque étaient Anil Gayan, Soodesh Roopun et Ivan Collendavelloo. Je peux dire qu’ils ne nous ont pas soutenus. Le 1er avril 2005, les services ont repris. Toutefois, 20 ans après, l’hôpital n’est toujours pas opérationnel à 100%. Il n’y a pas de spécialiste On Call, la maternité a été fermée, les patients sont envoyés à Rose-Belle pour la majorité des soins, à partir de 16h il n’y a plus de service de X-Ray ni de dentiste…

C’est un calvaire ici, en particulier pour les patients sous traitement de dialyse qui doivent se rendre à Rose-Belle et retournent tard. C’est pour cela qu’avec la Fédération des Citoyens engagés, nous avons repris le combat pour que l’hôpital de Mahébourg devienne un hôpital Full-Fledged. À moins que le gouvernement ne veuille le confier à des parties privées.

D’après vous, y a-t-il risque d’une privatisation de l’hôpital de Mahébourg ?
Écoutez, l’Aviation civile internationale exige qu’il y ait un hôpital dans la Catchment Area de l’aéroport. Si le ministère de la Santé ne veut pas renforcer le service à l’hôpital de Mahébourg, afin de pouvoir offrir les soins nécessaires en cas d’accident, peut-être qu’il a un autre projet. Nous avons attendu 20 ans pour que l’hôpital soit pleinement opérationnel, mais à chaque fois on nous dit qu’il n’y a pas le budget nécessaire.

On ne peut nous laisser vivre dans un rêve. Pourtant, il y a beaucoup de médecins spécialistes qui ne travaillent pas. Pourquoi ne pas en recruter quelques-uns pour l’hôpital de Mahébourg ? Quand je regarde ailleurs, je vois qu’on trouve bien les moyens pour construire des hôpitaux cinq étoiles… Fer leker fermal sa.

Pour vous, est-ce une discrimination envers les Mahébourgeois ?
Voyons les faits et laissons la population juger par elle-même. À Flacq, il y avait déjà un grand hôpital avec tous les services nécessaires, mais on a fermé cet hôpital pour en construire un plus grand, plus sophistiqué. Je ne suis pas en train de dire que les Flacquois ne le méritent pas. Je ne suis pas jaloux de leur hôpital cinq étoiles. Mais je me demande comment on peut trouver les moyens pour certains et pas pour d’autres.

De plus, ici, nous avons déjà les infrastructures. Il n’y a pas à construire. Il nous faut seulement les équipements et le personnel nécessaires. Comme je l’ai dit, imaginez la douleur de toutes ces personnes qui habitent le long de la côte Sud-Est, qui doivent voyager jusqu’à Rose-Belle pour recevoir des soins. Encore, s’ils arrivent à trouver un transport car il y a également un gros problème de transport dans cette région. L’OMS préconise la proximité. Ici, on nous dit non, l’hôpital de votre village n’est pas équipé pour vous offrir des soins, il faut aller à Rose-Belle.

Nous sommes à la veille des élections générales. Votre démarche ne risque-t-elle pas d’être interprétée comme une tentative de récolter des votes ?
De 2002 à ce jour, j’ai été constant dans mon combat. L’hôpital de Mahébourg a toujours été l’une de mes priorités. Je n’ai pas attendu la veille des élections pour mener mes revendications. Avec la Fédération des Citoyens engagés, nous avons fait 40 meetings. Nous sommes allés de village en village, pour sensibiliser sur l’hôpital de Mahébourg. Beaucoup de personnes m’encouragent dans ce combat.

Oui, je serai candidat aux prochaines élections générales mais avec la Fédération des Citoyens engagés. Pas avec un parti du Mainstream. Me présenter aux élections générales est une manière pour moi d’essayer de porter la voix des Mahébourgeois à l’Assemblée nationale. Autrement, je continuerai à crier dans le désert.

Cette fois-ci, je me présenterai avec deux colistiers, à savoir, Brummel Laurent, un scientifique marin, qui a travaillé pendant 30 ans en Australie et Nouvelle-Zélande. Il habite actuellement à Mahébourg. L’autre candidat, c’est le Dr Bassoodev Goolub, qui a grandi à Trois-Boutiques. Ce village fait aussi partie de la circonscription Mahébourg/Plaine-Magnien (No 12). Pour ma part, c’est peut-être la dernière fois que je me présente aux élections.

Quels seront les autres thèmes de votre campagne ?

Le transport demeure une priorité. Savez-vous qu’à Mahébourg, à partir de 17h30, il n’y a pas de bus pour aller vers Flacq, les villages de la côte Sud-Est ou encore Chemin-Grenier ? Les gens doivent prendre des taxis sans permis. Que va-t-il se passer, si un accident se produit un jour ? Les propriétaires d’autobus ont des Grants avec le gouvernement, mais ils décident à quelle heure ils vont arrêter de rouler. Il y a des enfants qui reviennent des leçons particulières, des travailleurs qui rentrent du travail, toutes les personnes se retrouvent sur une gare déserte.

Un autre thème important, c’est la situation des skippers commerciaux. Tout le monde sait que dans la région Sud-Est, la mer est souvent houleuse. La météo interdit des sorties en mer. Les pêcheurs ont droit à une allocation de mauvais temps de l’ordre de Rs 875 par jour. C’est très bien pour eux. Mais les skippers, n’ont-ils pas leurs familles à nourrir ?

Comment font-ils quand ils ne peuvent pas travailler ? Ne devraient-ils pas également avoir une indemnisation ?
Nous sommes en train de les réunir actuellement, pour pouvoir présenter un dossier au ministère concerné, afin que les skippers puissent bénéficier aussi d’une allocation de mauvais temps. De plus, ces skippers sont aussi des victimes de la marée noire du Wakashio. À ce jour, ils n’ont eu aucune indemnisation.

L’autre préoccupation : les infrastructures sportives. Par exemple, il n’y a pas un terrain de foot où les jeunes peuvent s’adonner à ce sport à Mahébourg. Alors que nous savons tous qu’il faut donner l’opportunité à nos jeunes de pratiquer des activités sportives pour qu’ils ne tombent pas dans les fléaux de la drogue et de l’alcool. Il y a actuellement 850 jeunes de 16 ans à 35 ans sous traitement de la méthadone à Mahébourg. C’est alarmant !
Vous parlez d’absence d’infrastructures sportives alors que vous avez un ministre des Sports dans votre circonscription…

Écoutez, le stade Harry-Latour a bien été rénové, mais il n’est pas accessible aux jeunes de Mahébourg. Ce terrain de foot est utilisé pour les matches de deuxième division. Il y avait deux grands terrains de foot à Beau-Vallon qui ont été transformés en MUGA. Il y a des petits terrains pour 5-6 personnes, alors que le foot se joue à 11. Combien de Mahébourgeois peuvent y jouer du football ? Rien qu’à Mahébourg et Ville-Noire, il y a environ 24 000 à 25 000 personnes.

Il n’y a pas que les infrastructures sportives qui manquent. Il n’y a pas de jardin d’enfants. Nous avons un front de mer qui n’est pas entretenu. Il n’y a pas de poubelle et il y a de l’herbe partout. Allez voir dans quel état est le Mahébourg Waterfront le lundi après-midi après la foire. Pourtant, Mahébourg est un village touristique.

Vous avez été élu conseiller du village de Mahébourg en 2020. Quelle a été votre contribution depuis ?
Malheureusement, le conseil de village ne peut faire grand-chose car il n’a pas de budget. À part organiser des tournois de carrom et de domino. Cela répond-il d’ailleurs à la réalité des jeunes aujourd’hui ? À mon avis, il faut des sports collectifs, qui vont mobiliser les jeunes et les amener à collaborer. Nous ne sommes plus à l’époque où les gens viennent regarder la télé dans les Village Halls.

La seule activité qui existe encore à Mahébourg, c’est la régate. Là encore, c’est grâce à la volonté des pêcheurs et autres amoureux de la discipline qui ont su maintenir la tradition. Quelle est la contribution des autorités ? À mon avis, c’est une activité qui mérite d’être encadrée et renforcée. C’est un patrimoine.

Après des années d’attente, les travaux au marché de Mahébourg ont démarré. Quelle en est votre appréciation ?
Les travaux ont commencé et j’espère qu’ils seront terminés. Car il y avait aussi un projet de construction d’une foire près du stade Harry-Latour qui est en suspens. Les travaux ont bien démarré, mais le contracteur a abandonné le chantier. Rs 47 millions ont déjà été dépensées pour ce projet. Le coût total était de Rs 85 millions. Les travaux avaient atteint peut-être 30% à 35%. La question est combien de temps ces structures en métal installées vont tenir avec l’air salin de Mahébourg ? Peut-être qu’il faudra tout recommencer si le gouvernement décide d’aller de l’avant avec ce projet.

Pour ce qui est du marché, les travaux avancent à grands pas. Les marchands sont contraints de vendre leurs légumes dans la rue, à côté, en même temps qu’on est en train d’entreprendre des travaux. J’espère que ça va aller vite et que tout retournera à la normale.
Avez-vous déjà commencé votre campagne électorale ou attendez-vous la dissolution de l’Assemblée nationale ?
Notre campagne a déjà démarré. Nous allons sensibiliser les votants sur notre programme, mais aussi, sur la nécessité de voter pour des personnes de la localité. Comme je l’ai dit, Brummel Laurent et moi-même habitons à Mahébourg et le Dr Goolub est originaire de Trois-Boutiques. Il faut voter pour des personnes qui connaissent la réalité de la circonscription pas pour des étrangers qui vont disparaître par la suite.

Une semaine de manifestations pacifiques

Georges Ah-Yan et ses collègues de la Fédération des Citoyens engagés manifestent depuis lundi dernier, devant l’hôpital de Mahébourg, de 10h à 11h30. Cela fait suite à une rencontre avec le surintendant de l’hôpital, il y a quelques semaines. La Fédération a fait 13 propositions à transmettre au ministère de la Santé. Parmi, il y a la réouverture de la maternité, la présence de médecins spécialistes, la possibilité d’effectuer des prises de sang à partir de 6h du matin, afin que les personnes concernées puissent aller travailler.
En l’absence de réaction de la part du ministère, a prévenu Georges Ah-Yan, une grève de la faim sera organisée à partir du 4 octobre prochain.

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