De plus en plus de Mauriciens, éveillés et lucides, sont très inquiets, car notre santé économique et financière est au plus bas. Qu’importent les diatribes lyriques et sempiternelles de Renganaden Padayachy dans son français impec au Parlement, la crainte de finir comme le Sri Lanka gagne de nombreux compatriotes.
En effet, la situation qui dégénère au Sri Lanka, pays pas trop loin de chez nous, et qui est secoué par une crise économique, sociale et politique sans précédent, polarise autant l’attention que le conflit Russie/Ukraine. À la base de cette dégénérescence, des problèmes de dettes publiques, des projets qui, en réalité, se sont révélés de véritables éléphants blancs, le tout servi par une politique de copinage et de protection des proches de ceux se trouvant au pouvoir. Et, bien entendu, un gouvernement qui a évité, à tout prix, de faire face à la dégringolade qui menaçait le pays, surtout après la crise sanitaire causée par le Covid-19, et amplifiée depuis peu par le conflit russo-ukrainien.
Comme un air de déjà-vu ? Loin de nous de souhaiter notre propre malheur, mais si le gouvernement de Pravind Jugnauth persiste à faire la sourde oreille et à n’écouter que ses « spin doctors », qui ne font que l’enfoncer dans son propre trou, qui peut prédire ce qui va nous arriver ? Les prémices d’une explosion sociale, ici, sont déjà latentes.
Des débordements, comme à Plaine-Magnien cette semaine, où des habitants ont précipité les départs des représentants du gouvernement, nommément les ministres Bobby Hurreeram et Stéphane Toussaint, ainsi que le député Kavi Doolub, en témoignent. Ce ministre, qui avait jeté violemment par terre une édition de notre quotidien il y a quelques jours, a taxé l’incident, sur les réseaux sociaux, de l’œuvre de quelques personnes ayant un agenda politique. Il a subrepticement évité d’évoquer son départ sous escorte policière parce que cela chauffait grave !
À force de pratiquer (à outrance !) la politique de l’autruche, à force de multiplier les refrains éculés et insipides du style « tou korek », à force de refuser de prendre le taureau par les cornes, à force de s’abriter derrière ses super-conseillers et ses grands chefs, qui lui concoctent en réalité une recette bien empoisonnée, Pravind Jugnauth semble bien, hélas, mal barré. Et ça, ce n’est pas nous qui le disons, mais bien les rapports chiffrés et appuyés du PAC et de l’Audit.
La population en a ras le bol de cette politique qui consiste à faire plaisir aux proches et aux petits copains/copines, tandis que le peuple, lui, est contraint de se serrer la ceinture et de sacrifier ses moindres plaisirs. La situation aurait pu être autre si seulement des décisions réfléchies étaient prises, en consensus bien entendu, avec les parties concernées, et non des nominés politiques. Et si des projets étudiés, destinés à améliorer la vie des citoyens, avaient été réalisés. Mais non. Au pays du fils du Roi Soleil, les dépenses démesurées et extravagantes, comme pour le métro par exemple, et les projets mirobolants, comme le complexe de Côte-d’Or et le Safe City Network, ont davantage cours que la satisfaction du peuple. Que celui-ci n’arrive plus à manger à sa faim, qu’il doive sacrifier l’avenir de ses enfants, que certaines familles n’aient plus d’emploi, qu’elles ne peuvent plus aspirer à faire étudier leurs enfants… Tout cela n’a aucun effet sur Pravind Jugnauth et son gouvernement.
Plutôt, ils se concentrent sur des voyages, comme ces va-et-vient à la Dubaï Expo 2020. Avec à la clé des déplacements en nombre où l’on note la présence, encore une fois, des petits copains et copines, des « parents de », bien entendu. Et évidemment, voyages en classe affaires, quand ce n’est pas carrément en première. Plus séjours et traitements royaux dans des hôtels haut de gamme. Tout cela aux frais du contribuable, qui n’en finit pas de casquer !
Xavier-Luc Duval, le leader de l’opposition, souhaite un mini-budget dans un souci d’aider la population, avec le coût de la vie qui prend l’ascenseur chaque jour. Prions pour que Pravind Jugnauth réponde positivement à cet appel. Les Mauriciens ne sont pas dupes. S’ils sont, pour la majorité, silencieux pour l’heure, cela ne durera pas éternellement.
Husna Ramjanally