MV WAKASHIO – COURT OF INVESTIGATION : « Personne ne montait la garde sur le pont à l’heure du naufrage ! »

  • C’est ce que laisse entendre le Deck Cadet Officer de 21 ans, Marc Martinez

Les auditions de la Court of Investigation – instituée suite au naufrage du MV Wakashio le 25 juillet dernier au large de Blue-Bay – ont vu quatre membres de l’équipage du navire japonais battant pavillon panaméen être interrogés sur la tenue de la fête d’anniversaire à bord ce jour-là. Les explications fournies par le Deck Cadet Officer Marc Martinez devant le président, l’ancien juge Abdurafeek Hamuth, et ses deux assesseurs, les Marine Engineers, Jean Mario Geneviève et Johnny Lam Kai Leung, tendent à indiquer que « personne ne montait la garde » à l’heure du naufrage du vraquier.

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Ainsi va l’affirmation de Marc Martinez qui a retenu l’attention lors de la dernière séance de la Court of Investigation. Le Deck Cadet Officer de 21 ans a expliqué que le Chief Officer lui avait dit de ne pas assurer la surveillance cet après-midi du 25 juillet. Il est revenu sur son rôle parmi les membres de l’équipage du MV Wakashio et a indiqué qu’il a rejoint ce navire en mars 2020 pour une formation s’inscrivant dans le cadre de ses études poussées sur le plan maritime. Selon lui, il devait suivre les instructions du Chief Officer à la lettre, car ce dernier était le responsable de sa formation à bord du vraquier. « On m’a assigné la tâche d’accompagner le Chef Officer sur le pont pour la surveillance », a-t-il affirmé lors de cette séance de questions-réponses, par moments menée par l’Assistant Solicitor General, Me Rajkumar Baungally aussi bien que par le président et ses assesseurs. Le Deck Cadet Officer a avancé qu’il avait pour habitude d’effectuer plusieurs tâches dont le « lookout » à l’aide de jumelles mais aussi l’apprentissage de la vigilance radar à bord pour identifier les « risques ». Il a soutenu que ce fatidique 25 juillet 2020, le Chief Officer lui avait signifié qu’il pouvait se reposer et ne pas effectuer son tour de garde. « Lorsque je suis descendu dans le Mess Room pour dîner, le Chief Officer m’a dit que je pouvais aller faire la fête. J’ai vu qu’il y avait des boissons alcoolisées mais je n’ai pas bu », a-t-il déclaré. Et de poursuivre son récit selon lequel vers 18h20 il était monté sur le pont pour capter le réseau de téléphonie car il savait que le navire devait passer près de Maurice.

Marc Martinez a aussi mis en exergue que le Chief Officer lui a demandé à un certain moment de lui apporter des pistaches. Il aurait obtempéré, affirmant même qu’il aurait vu son supérieur hiérarchique en compagnie du capitaine, et que selon lui, le navire était en mode pilotage automatique. À une question du président de la Court of Investigation, Abdurafeek Hamuth, il a répondu que s’il avait été sur le pont ce soir-là, il aurait pu donner l’alerte.

Avant Marc Martinez, la Court of Investigation a écouté la version d’Eric Lamprea, un des marins qui étaient à bord. Ce dernier – qui compte plus d’une vingtaine d’années d’expérience en mer – a affirmé qu’il avait communiqué avec ses proches alors que le MV Wakashio était dans les eaux de Malaisie et ce, par le biais d’une AIS Sim Card. Il a soutenu qu’il n’était sous aucune pression d’appeler sa famille alors que le navire traversait Maurice. Eric Lamprea a reconnu qu’il s’agit là d’une pratique dangereuse que de se rapprocher d’une île en vue de capter le réseau mobile. Le marin a confirmé sa présence à la fête d’anniversaire le 25 juillet dernier mais a indiqué n’avoir rien remarqué de particulier et n’avoir pas vu le capitaine consommer de l’alcool.

Pour sa part, Philippe Gwanko, comptant aussi de nombreuses années en mer, a expliqué que son rôle était de s’assurer de la maintenance sur le pont du navire. Le marin est revenu sur son shift et a précisé qu’il devait lui aussi effectuer le « lookout » de minuit à 4 heures du matin. Et de souligner qu’il avait coutume de travailler avec le Second Officer Robert Seguya. De plus, Philippe Gwanko a affirmé que, le jour du naufrage, il avait bu de la bière à l’heure du diner. Et de préciser avoir vu des bouteilles de whisky sans pour autant savoir qui parmi eux en consommait.

Pressé de questions par Me Baungally, Philippe Gwanko s’est attardé sur les moyens à sa disposition pour monter la garde. Il a souligné qu’il est difficile, voire impossible, de détecter des récifs après 18 heures, précisant que ce genre de détail est seulement connu à travers les cartes de voyage et le système de radar.

Le dernier membre d’équipage du MV Wakashio à faire l’objet d’une audition dans le cadre de cette Court of Investigation est Dhruv Tandel, affecté à la cantine. Il aurait aussi l’habitude de cuisiner pour le capitaine, le Chief Officer et le Chief Engineer. Dhruv Tandel dit avoir vu trois bouteilles de whisky ce jour-là à la cantine.  Il a affirmé que le capitaine, accompagné du Chief Officer et du Chief Engineer, lui ont demandé d’apporter une des bouteilles de whisky dans la tour de commande. Il dit avoir laissé leur diner ainsi que la bouteille sur place et indique n’avoir rien vu de particulier car il faisait noir et que seules les lumières des portables étaient actives.

La prochaine audience de la Court of Investigation sur le Wakashio se tiendra le 3 février prochain.

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