Jadis, le cadeau du Père Noël était systématiquement une surprise. Un jouet que chaque enfant découvrait au matin du 25 décembre. Personne n’en disconvenait. Parce que tout un chacun croyait en la magie du Père Noël. Puis cette image rocambolesque du traîneau rempli de cadeaux venant dans la nuit du 24 au 25 est partie en fumée… dans la cheminée.
Aujourd’hui, les enfants savent à l’avance quels cadeaux ils auront pour Noël. Rares sont ceux qui ne sont pas dans le secret des parents. Pour le cadeau inattendu et prématuré du Père Noël, qui vient d’être déposé par International IDEA, un Think Tank, institut international pour la démocratie et l’assistance électorale, la République de Maurice peut difficilement plaider l’absence de notification préalable.
Pas plus loin que fin novembre, soit entre le 22 et le 25, lors d’une de ses interventions à la tribune du Commonwealth Law Ministers Meeting à Maurice, Patricia Scotland, King’s Counsel, secrétaire générale du Commonwealth, avait donné une première indication de l’état de santé de la démocratie.
Patricia Scotland avait déclaré en substance que la démocratie a reculé d’au moins 30% dans le monde. Étant sur le sol mauricien, elle avait cru nécessaire de dire que Maurice constitue un cas à part. Et personne n’a cru nécessaire de s’interroger sur cette parenthèse des plus diplomatiques. De surcroît, avec un flegme très britannique.
Mais très vite, Maurice a été rattrapée par le Père Noël de l’International IDEA. Depuis la semaine dernière, Maurice, jusque-là un exemple en matière de démocratie en Afrique, et par extension dans le monde, se retrouve aux bancs de ceux qui se voient attribuer des bonnets d’âne en la matière.
Présentant les conclusions de cette étude, dont l’élément majeur est que la moitié des démocraties du monde sont en déclin, la presse internationale souligne que « les démocraties dont l’érosion démocratique est la plus grave incluent les États-Unis depuis l’année dernière, ainsi que le Brésil, la Hongrie, la Pologne, l’Inde et l’île Maurice, et qui sont passés de six à sept en 2022, avec l’ajout du Salvador ».
Une indication que Maurice a été admise à l’Intensive Care Unit de la démocratie depuis quelque temps déjà, vu que le dernier admis en date n’est autre que le Salvador. Donc, ce cadeau du Père Noël prématuré n’était pas si imprévu que ça. Ou encore qu’au sein de la République, l’on n’a pas porté attention à cette dérive de la démocratie.
Dans la conjoncture, et dans un monde où des déviations peuvent être encore corrigées, vu qu’il n’est jamais trop tard pour bien faire, il suffit tout simplement de se poser la question, tant répugnée par les hommes du pouvoir. Oui, dans le sillage de ce rapport accablant d’International IDEA, il faut bien se demander « Kot mo’nn fote ? ».
Des éléments de réponse, renvoyés par le miroir de la démocratie, devront baliser le chemin à parcourir pour recouvrer l’honneur perdu de la République de Maurice. Et à brève échéance pour éviter toute dégénérescence allant dans le sens du totalitarisme.
Certes, les séquelles de la pandémie du Covid-19, avec la mise sous cloche de toutes les libertés, dont celle de circuler librement pour limiter la propagation du virus, pèsent lourd au titre des profits et pertes au tableau de la démocratie.
Au lieu d’un Mea Culpa inquisiteur face à cette érosion du système démocratique, avec pour ingrédients comprenant entre autres la polarisation politique, des dysfonctionnements institutionnels et des menaces sur les libertés civiles, le rapport d’IDEA The Global State of Democracy 2022 – Forging Social Contracts in a Time of Discontent offre l’option d’un Felix Culpa pour redresser la barre.
Les trois voies dégagées pour renverser des facteurs extrêmement défavorables à la démocratie recèlent toute leur pertinence pour rétablir l’espace démocratique vital.
D’un point de vue générique, le Père Noël de la démocratie incite à se pencher du côté de l’urgence à défendre et à consolider la liberté de la presse, à assurer une transparence sans équivoque du processus électoral et à revoir l’équilibre des pouvoirs.
Toute ressemblance avec la réalité des pratiques démocratiques à Maurice ne pourrait être qu’être fortuite, comme pourrait l’inscrire le réalisateur Jean-Marie Poiré au générique de son film, ayant pour titre Le Père Noël est une ordure.
Mais pour que la démocratie ne soit pas confinée à la boîte à ordures, le moment n’est-il pas venu de s’interpeller par rapport à ces trois points susmentionnés ?
Mais surtout à ne pas se complaire au constat que près de la moitié des pays en Europe ont souffert d’érosion démocratique ces cinq dernières années…