Le gouvernement doit appliquer le rapport du Pay Research Bureau (PRB) avec effet rétroactif à partir de janvier 2020. C’est ce qu’affirme Jean Bruneau Dorasami, dirigeant syndical de l’All Civil Service and Other Employees Federation. Dans l’interview qui suit, il invite le gouvernement à honorer sa promesse pour la publication du rapport. Il ajoute toutefois que cette fédération syndicale est ouverte à toute discussion en ce qui concerne le mode de paiement des arrérages.
Le syndicaliste dit aussi apprécier la décision prise par le gouvernement pour la mise sur pied d’une commission d’enquête dans l’affaire Betamax. « La population a besoin de savoir ce qui s’est réellement passé car c’est l’argent des contribuables qui a été dépensé pour la signature et la résiliation de ce contrat », dit-il. En ce qui concerne la troisième phase de déconfinement du pays, il trouve que le gouvernement devrait proposer l’accès à nos plages par ordre alphabétique car il sera difficile de contrôler les Mauriciens qui souhaitent pique-niquer. Pour ce qui est de la hausse du prix du carburant, il pense que la majorité des automobilistes a compris que cela a été fait pour une bonne cause. Il pense cependant que le gouvernement ne peut pas continuer éternellement avec une telle décision.
Le ministère de l’Éducation a émis une circulaire disant que les membres du personnel enseignant qui ne sont pas vaccinés auront à prendre un congé sans solde. Quelle est votre réaction à ce sujet ?
En tant que syndicaliste, je pense que le ministère de l’Éducation et les syndicats concernés doivent négocier pour dégager une solution dans la durée dans l’intérêt de tout un chacun. D’après mes renseignements, il y a eu un malentendu au sujet de la vaccination. Il y a eu un manque d’harmonisation dans la communication au sujet du vaccin et c’est pour cela qu’il y a eu une réticence parmi les membres du corps enseignant pour faire la vaccination. Il faut aussi savoir qu’il y a parmi eux des gens qui ont un problème de santé et ne peuvent pas prendre le risque de se faire vacciner. Il faut prendre tout cela en considération avant de songer à sanctionner. Alors, il faut prendre les choses au cas par cas. Le bon sens doit prévaloir dans toute discussion.
Beaucoup de gens se plaignent de la cherté du coût de la vie. Maintenant que la roupie a connu une nouvelle dévaluation, le prix des produits va augmenter. En tant que défenseur des causes des travailleurs, comment voyez-vous tout cela ?
La hausse du coût de la vie interpelle tout le monde. Je pense que le gouvernement doit présenter très vite avec un mécanisme de contrôle des prix des produits de base. Il faudrait en même temps que le gouvernement se lance dans une campagne de sensibilisation pour inciter les gens à planter pour arriver à l’autosuffisance alimentaire. Il y a certaines mesures dans le récent budget pour encourager les gens à retourner vers la terre. Les gens peuvent prendre avantage de certaines mesures préconisées pour arriver à l’autosuffisance alimentaire.
Justement, quelle est votre appréciation du budget 2021-2022 ?
Ce budget a en tout cas été préparé dans un contexte économique difficile miné par la pandémie de COVID-19. C’est pour cela que je pense que ce budget est raisonnable.
Le pays aborde la troisième phase de déconfinement sanitaire. Le gouvernement a déjà songé à poursuivre l’octroi de l’assistance financière aux employés jusqu’à septembre. Comment voyez-vous tout cela ?
C’est une très bonne chose de la part du gouvernement de continuer à accorder une assistance financière aux plus vulnérables jusqu’à ce que la situation retourne à la normale. Mais je pense que dans le cadre de cette politique, il faudrait que cette assistance financière aille plus particulièrement aux “genuine cases” car nous avons entendu toutes sortes de choses par rapport à ceux qui méritent réellement une assistance financière. Je pense que le gouvernement doit continuer avec sa politique pour certains secteurs spécifiques qui sont à l’arrêt avec cette pandémie.
Pensez-vous que nos services de santé publique sont prêts pour la troisième phase de déconfinement national ?
Au début de l’épidémie, il y avait un cafouillage et la peur s’était installée parmi les employés du ministère de la Santé. Aujourd’hui, avec l’expérience acquise, je pense que le gouvernement et les employés du corps médical sont plus armés pour faire face à n’importe quelle éventualité, surtout avec l’arrivée des vaccins contre le COVID-19 sur le sol mauricien.
Le gouvernement a donné l’assurance que le rapport du Pay Research Bureau (PRB) sera publié cette année. Comment ce rapport devrait-il être appliqué, selon vous ?
On accueille favorablement l’assurance donnée par le ministre des Finances, Renganaden Padayachy, selon laquelle le rapport du PRB sera publié cette année. Le rapport doit être appliqué à partir de janvier 2020. Le gouvernement dot tenir sa parole. En ce qui concerne le mode de paiement des arrérages, nous sommes prêts à discuter avec le gouvernement. D’ailleurs, nous avons déjà formulé des propositions sur le mode de paiement et nous sommes ouverts à toute discussion.
Le ministre de la Fonction publique veut améliorer le fonctionnement de la Public Service Commission. Que faudrait-il faire, selon vous, pour l’améliorer ?
Tout le monde se pose des questions à propos des décisions prises par la Public Service Commission (PSC). Nous sommes tous d’accord que cette institution doit être plus transparente dans ses décisions. Pour l’améliorer, il faut apporter des amendements aux PSC regulations. Pour ce faire, le ministère de la Fonction publique doit s’engager dans des discussions approfondies avec les syndicats représentant les intérêts des fonctionnaires.
Le gouvernement a dépensé environ Rs 5,7 milliards pour honorer le jugement du Privy Council dans l’affaire Betamax. Maintenant, le gouvernement a décidé d’instituer une commission d’enquête sur cette affaire. Que pensez-vous de tout cela ?
Ce bien de mettre sur pied une commission d’enquête pour faire la lumière sur toute l’affaire Betamax. Il n’est jamais trop tard pour tirer toute cette affaire au clair. Le peuple doit savoir ce qui s’est passé depuis la signature du contrat jusqu’à sa résiliation parce que c’est l’argent des contribuables qui a financé ce fameux deal.
Les Mauriciens recommencent à aller à la plage depuis le 1er juillet, mais ils n’auront pas le droit de pique-niquer. Que pensez-vous de tout cela ?
Étant donné que nous traversons une période très difficile, économiquement parlant, il faut que tous les Mauriciens et Mauriciennes de la République coopèrent avec les autorités s’agissant du respect du protocole sanitaire mis en place par le gouvernement. La plage et la mer seront toujours là. Mais nos vies et notre santé peuvent être mises en péril si nous ne faisons pas attention. Nous devrions prendre beaucoup de précautions jusqu’à ce que la situation retourne à la normale. Je pense qu’il sera difficile de contrôler les Mauriciens sur les plages car les gens aiment bien pique-niquer. Pourquoi ne pas appliquer l’ordre alphabétique pour l’accès à nos plages afin d’éviter que la situation ne devienne incontrôlable ?
Comment accueillez-vous le fait que le prix du carburant a augmenté par environ Rs 2 pour financer l’achat de vaccins contre le COVID-19 ?
Le gouvernement cherche par tous les moyens à nous procurer des vaccins pour protéger la population contre ce virus. Dans un élan de solidarité, les propriétaires de véhicule sont appelés à contribuer pour l’achat de vaccins. Je constate que la majorité des Mauriciens ont accepté cette mesure gouvernementale temporaire pour protéger notre santé. Nous souhaitons cependant que le gouvernement enlève cette décision une fois qu’il aura suffisamment de vaccins pour immuniser la population.
Deux secteurs ne sont pas concernés par l’article 72 (A) de la Workers Rights Act. Il s’agit du port et de l’aéroport. Pensez-vous qu’il faudra retirer cette exemption ?
D’après mes renseignements, cette exemption était taillée sur mesure pour une compagnie qui est toujours en difficulté financière. Je pense que le gouvernement doit revoir cet amendement dans l’intérêt des travailleurs concernés. Mais il ne faut pas oublier que cette loi permet aux travailleurs concernés d’avoir recours au judiciaire pour faire respecter leurs droits.
Propos recueillis par
Jean-Denis PERMAL