L’amendement au Code pénal afin de dépénaliser l’interruption volontaire de grossesse dans des cas spécifiques a été adopté, hier soir, par une majorité de 50 voix pour, 14 contre, une abstention et en l’absence de quatre parlementaires. La présentation d’une loi pour remplacer celle datant de 1838 a été qualifiée d’historique, hier, par le Premier ministre, Navin Ramgoolam, qui a placé le texte de loi dans le cadre du respect des droits humains. « Women’s rights are human rights », a insisté hier le Premier ministre. Il a, toutefois, précisé que le gouvernement ne veut nullement introduire l’avortement sur demande et que même dans le cas d’une grossesse à la suite d’un cas d’abus sexuel, si une femme décide de ne pas interrompre sa grossesse même si la loi l’y autorise, elle pourra le faire et bénéficiera du soutien des autorités gouvernementales. Il a annoncé que son ministère compte se pencher sur les mesures en vue de faciliter l’adoption.
Intervenant dans le cadre des débats sur le texte de loi hier après-midi, le Premier ministre a estimé que les amendements du Code pénal afin de dépénaliser l’interruption volontaire de grossesses dans des circonstances spécifiques ont une portée historique. Il s’est réjoui du niveau des interventions des parlementaires des deux côtés de la Chambre qui ont su se placer au-dessus des considérations politiques pour se concentrer sur le bien-être des femmes forcées à avoir recours à l’avortement dans des conditions dangereuses.
Ce n’est pas la première fois que la dépénalisation de l’avortement est mis sur le tapis, a-t-il dit. Ce sujet avait dans le temps fait l’objet d’une motion parlementaire de Sanjit Teelock. Ce dernier avait interpellé à plusieurs reprises le gouvernement sur la question de dépénalisation de l’avortement. Le Premier ministre d’alors avait répondu que les débats sur la question se poursuivraient jusqu’à ce qu’il y ait un consensus.
Le Premier ministre a expliqué qu’au moment de la présentation du texte de loi au parlement le 4 mai dernier, il semblait que les prises de positions de part et d’autre étaient irréconciliables. Il a depuis reçu une abondante correspondance à ce sujet dont de Mgr Maurice Piat, Mgr Alain Harel, Mgr Ian Ernest. Ces derniers ont, par la suite, été reçus par l’Attorney General Yatin Varma et leurs propositions sont, dans la mesure du possible, prises en compte dans le texte de loi.
Tout en respectant la foi de toutes les sections de la population, le Premier ministre a insisté sur le fait que Maurice est un État laïc. « Mauritius is a secular State. Government act in a secular manner », a-t-il dit.
Le Premier ministre a observé que selon les dernières statistiques, quelque 18 691 avortements ont été enregistrés avec tous les risques que cela comporte. Plusieurs femmes ont trouvé la mort. Il a observé que ce sont surtout celles qui n’ont pas les moyens qui sont forcées d’avoir recours à l’avortement clandestin car celles qui ont les moyens peuvent toujours se faire avorter dans de bonnes conditions ou se rendre à l’étranger pour le faire. Il a rappelé que les droits des femmes font partie intégrante des droits humains et que l’Equal Opportunity Bill interdit toute discrimination à l’encontre des femmes. Il a aussi souligné que le droit à l’avortement dans des cas spécifiques fait désormais partie des droits humains.
Avec ce texte de loi, a souligné le Premier ministre, le gouvernement honore ses obligations internationales.
Résumant les débats au terme de 52 interventions étendues sur cinq séances parlementaires, l’Attorney General Yatin Varma a remercié tous ceux qui y ont participé.
L’Attorney General a aussi remercié le leader de l’Opposition Paul Bérenger pour ses trois propositions dont deux ont été retenues. C’est ainsi que le gouvernement a accepté que les femmes cherchant à interrompre volontairement leur grossesse soient examinées par trois spécialistes au lieu de deux, soit deux gynécologues et un autre spécialiste dans le domaine approprié. S’agissant de la compétence des spécialistes devant déterminer si une femme a bien été victime de viol, Yatin Varma expliqué, après consultation avec les membres de la profession légale, qu’il n’est pas difficile de conclure à la suite d’un examen médical si une grossesse a été provoquée par un viol tenant en compte du traumatisme physique et mental observé chez la victime. Les spécialistes pourront examiner la victime qu’après que le cas de viol eut été rapporté à la police. Toute fausse déclaration constitue un délit punissable par la loi, rappelle-t-il.
Concernant la proposition du leader de l’opposition consistant à demander à la victime de jurer un affidavit, Yatin Varma a observé que cela nécessite beaucoup de démarches légales et d’être présent en cour. Cela pourrait s’avérer une expérience traumatisante pour une victime déjà traumatisée, estime-t-il. Dans le cas d’une adolescente victime d’inceste qui se retrouverait enceinte et dont les parents n’autorisent pas l’interruption de grossesse, une fois que l’enfant aurait rapporté le cas à un instituteur, un médecin, à un ami ou à des membres de la profession médicale, un membre du personnel de l’établissement scolaire doit notifier immédiatement le secrétaire permanent du ministère de la Femme qui s’adressera promptement à un magistrat pour un protection order. « Je n’ai aucun doute qu’une enfant victime d’inceste doit être enlevée de la résidence de son agresseur et que le secrétaire permanent pourrait dans de tel cas autoriser l’interruption de grossesse à la suite d’inceste ». L’Attorney General s’est dit convaincu que la loi changera la vie de beaucoup de filles et de femmes de manière positive.
IVG — RAMGOOLAM: « S’élever au-dessus des considérations partisanes »
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