Depuis son installation à la tête de l’Éducation, Mahend Gungapersad s’est signalé par une série de décisions. En prélude à la tenue des Assises sur l’Éducation, annoncées pour avril, il s’est engagé dans une démarche de consultations avec les principaux stakeholders de l’Éducation. Une façon de faire comprendre que le mot d’ordre demeure la rupture avec le Mo Konn Tou de la précédente locataire de l’Education House.
Les deux principales décisions sur le front académique annoncées et adoptées pour la rentrée se résument d’abord au critère d’admission au Higher School Certificate (HSC). Trois Credits, au lieu de cinq, seront nécessaires pour entrer en terminale du secondaire. Donc, moins de grincements de dents ce jeudi avec la proclamation des résultats du School Certificate.
Puis l’élimination-couperet de l’Extended Programme au début du cycle secondaire. C’est vrai, depuis sa conceptualisation, l’Extended Programme pour les recalés du Primary School Achievement Certificate (PSAC), ayant succédé à la Rat Race du Certificate of Primary Education (CPE), a été systématiquement décrié. Le diocèse de Port-Louis, qui a aligné critiques et propositions, s’est toujours fait l’apôtre d’une dimension inclusive incontournable dans le système d’éducation.
Donc, ces deux mesures de l’ère du ministre Gungapersad pointent vers cette inclusion, avec pour objectif qu’aucun enfant ne soit laissé en bordure de l’autoroute de l’Éducation. Évidemment, des mesures transitoires en avant-goût des promesses des Assises de l’Éducation.
L’élimination de l’Extended Programme en faveur de l’introduction du Foundational Programme in Literacy, Numeracy and Skills et son intégration au cursus secondaire à partir de la présente année scolaire ont été applaudies. Mais a-t-on pris en considération, peu importe le taux de réussite de cette catégorie d’étudiants aux examens du National Certificate of Education, les effets psychologiques de cette décision sur ces élèves constituant l’Extended Programme Cohort de ces trois dernières années ?
C’est vrai que le système d’éducation demeure élitiste. Ceux qui, il y a 60 ans, fréquentaient la School se vantent encore aujourd’hui de leur appartenance à cette Alma Mater. Et ce, même si pendant les 40 années subséquentes, ils ont connu des carrières professionnelles hors pair.
C’est aussi vrai que l’inclusion n’est nulle autre que le parent pauvre de l’Éducation nationale. Dans cette transition vers le Foundational Programme in Literacy, Numeracy and Skills, que proposent les pédagogues à ces élèves du secondaire avec le Badge Extended Programme en ce début d’année ?
Aussi cruel que cela puisse paraître : « Zot pe perdi ankor enn lane dan kolez. Zot pa pou pas NCE. Al MITD plito ! » C’est peut-être vrai. Comme il est tout aussi vrai que tous les élèves du Mainstream ne réussiront pas ce même NCE. Personne n’en disconvient. Mais ceux qui sont derrière cette attitude d’exclusion réalisent-ils le découragement inscrit en lettres d’or dans la tête de ces adolescents à la croisée des chemins de la vie en entendant cette quasi-injonction de retourner au collège ?
Et demain, comme une prude sans limites, l’on ne s’épargnera pas pour s’exclamer : « Get sa kinz-an, li pe vann ladrog. » Tout simplement, l’école lui a fait comprendre qu’il n’était pas à sa place.
Cette posture élitiste ne prend-elle pas à contre-pied la valeur intrinsèque d’inclusion de la filière des écoles techniques ? Le proviseur du Collège technique Saint-Gabriel, qui a fêté ses 50 ans en décembre, n’affirme-t-il pas que « les collèges techniques permettent une revalorisation de ces jeunes ? Ce n’est pas parce que l’académique n’est pas leur fort qu’ils doivent être réorientés vers des voies perçues comme inférieures. Ce n’est pas seulement l’académique qui fait marcher le pays. »
Le rôle de l’enseignant – autrefois on disait du maître – est de faire briller les forces de l’élève pour faire pâlir les faiblesses. La balle de la maladresse de BZD est probablement partie. Un changement de regard est encore possible.
Mais il reste encore une année pour ces pédagogues afin d’accompagner de manière efficace ces élèves de l’Extended Programme devant prendre part aux examens du NCE de 2025.
À bas ce pseudo-élitisme qui a gangrené le système d’éducation à Maurice. Place à une école plus inclusive, dont les valeurs reconnues à l’international se résument à :
- une école qui adapte ses structures aux élèves, et non l’inverse,
- la prise en compte de l’élève dans ses différentes dimensions, dans son environnement, dans ses richesses et dans son potentiel (et pas uniquement dans ses manquements ou ses faiblesses),
- une collaboration entre l’ensemble des professionnels impliqués dans la formation, l’encadrement et le suivi des élèves.
Et surtout, tendre vers une école plus inclusive, c’est tout simplement œuvrer à une école pour tous et une place pour chacun.
Surtout à 15 ans, ne pas être soumis à un discours au ton docte et teinté de découragement et de défaitisme.
Ou encore à 15 ans, les conditions pour l’épanouissement des talents cachés ou latents doivent être privilégiées.